Quantcast
Channel: EMMILA GITANA
Viewing all 4542 articles
Browse latest View live

LE DERNIER JOUR DE MA VIE

0
0

Je n’éteindrai jamais l’incendie qui m’habite, ni la chaux vive de mes ailes, ni l’incandescence sur ma peau qui se souvient de caresses anciennes. Je ne désarmerai jamais mes saines colères autour des cercueils d’enfants, ni mon dégoût de toute l’injustice arrogante des hommes. Mes fatigues traverseront ce désert où seul je cherchais l’ombre d’une oasis et l’eau fraîche d’un frère choisi. Non je n’effacerai jamais les mots absents de mon père, leur naïve ferveur sur des pages sans voix. Pour que revienne l’enchantement d’une autre adolescence, l’herbe se dressera sous mes pas jusqu’au rivage. Des voiles se lèveront sur l’horizon bleu et le vent dans les haubans chantera encore la chanson du sang et de l’argile pour l’exacte île promise où dort tout l’ennui de mes vieux jours. Alors, je prendrai la mer comme au premier jour terrestre et ne restera de moi que la salive d’un poème oublié.

.

BRUNO RUIZ

2018

.

gros temps 2


SAVE GHOUTA...!

0
0

Pendant plus de vingt ans, le scalpel était mon compagnon
Danser entre mes doigts, pendant que je fais mon travail très tranquillement
À la fin de chaque journée, je lui murmure:
Vous avez très bien fait, et nous en avons sauvé beaucoup ensemble
Mais tout a changé maintenant
Le scalpel n'était plus ce qu'il était
Mes doigts ne peuvent plus le supporter
Comme si une partie de mon âme était prise dans ses dents, et qu'elle ne pouvait plus supporter les blessures, elle en était témoin
Enfants sans pièces
Sans yeux
Sans visages
Les femmes et les familles couvertes par des feuilles pleines de terre de la terre natale, avec plus de sang de ses enfants
L'odeur de la poudre à canon et sa couleur noire abhorrée plane sur ces visages affamés et flétris
Les cris des enfants, les lamentations des femmes, l'oppression des hommes, l'impuissance des médecins, ont atteint mon scalpel mort, créant un esprit de misère à l'intérieur, qu'il a cessé de fonctionner après ce qu'il a vu, mais ces cris n'ont pas atteint coeurs du monde pour le réveiller

Aujourd'hui, tous ceux qui sont venus à nous sont des corps fins et maigres qui n'ont pas goûtéà la nourriture depuis des jours. Enterrés avec leurs enfants sous les décombres de ces barils qui ne distinguent pas entre les pierres et les humains
Aujourd'hui, sous les décombres de notre patrie, ils m'ont apporté une mère dans son septième mois de grossesse, avec deux de ses enfants
Si je vous disais que la misère du monde se retrouvait aux yeux de ces enfants, je ne décrirais pas assez
Le premier enfant sans jambe droite et a un bras cassé. L'autre a perdu son œil et des éclats d'obus sont entrés dans sa poitrine, et la mère lutte pour survivre. Les éclats d'obus ont brisé tout son corps mince qui nous a envoyés dans nos mains pour assister à son dernier souffle.
Je la vois lutter pour la survie, ses yeux sont fixés sur ses petits étant dans cette situation
Le père les a laissés, morts, il y a quelques mois
Ils me les ont apportés dans une couverture, parce que nous avons perdu nos civières patientes, nous les avons utilisées comme lits, parce que les lits sont pleins
Je vous supplie d'imaginer avec moi, juste un instant cette scène et cette couverture déchirée et déchirée qui portait les quatre vies: la mère, son fœtus et ses deux enfants.

Un collègue m'a chuchotéà l'oreille
Peut-être que nous pouvons sauver son bébé
Pour la première fois, je me suis assis en pensant avec ma tête baissée
"Le sauvons-nous, ou le laissons-nous heureux avec sa mère sans voir la laideur de ce monde,
Est-ce que je le laisse partir avec elle
Non non
Ma mission est de le sauver
j'ai regardé autour
Ses enfants déchirés
Son âme qui quitte son corps
Le bruit des avions et des barils explosifs
Les pleurs des enfants qui brûlent le coeur
Et mon collègue chuchote:
Qu'est-ce que tu attends
Allons

Il y a une vie que nous devrions sortir
J'ai regardé mon scalpel et mon ami
À quelle vie allez-vous le sortir?
Le monde des tonneaux, du feu et de la déception?
Le monde des orphelins, de l'oppression et de la faim?
Qui allait l'allaiter?
Qui va changer ses pampers?
Qui va le bercer?
Qui va l'entendre pleurer?
Oui, il a un dieu qui ne l'abandonnera pas, mais je suis devenu incapable, avec mon scalpel, même de penser
La voix de mon collègue m'a réveillé de mes fantasmes
"Son coeur s'est arrêté"
Je vais le sortir maintenant, avec ses morts
Et pour la première fois de ma vie, je ne pouvais pas le faire, mon scalpel m'a arrêté. Je l'ai mis sur la table, et je suis parti en silence.
Mon collègue a continué son travail, les yeux pleins de larmes, en me regardant avec surprise
Tout cet incident ne prit que quelques minutes, mais il marqua une blessure d'une année, une blessure faite de défaite et d'impuissance. Je n'imaginais pas que j'avais lu dans les histoires des massacres des Tatars, des histoires d'inquisition, ou même des contes du pharaon.

Monde, leaders et rois du monde:
Votre silence sur ces massacres touchant des centaines de milliers de civils innocents, qui n'ont rien fait d'autre que d'être sur une terre appelée "Al Ghouta de Damas" est une honte
Je ne vais pas vous demander de sauver #Ghouta, mais de sauver votre humanité
Sauvez votre peuple
Vos enfants
Et sois sûr que ce bébé qui sort de sa mère martyre est sous ta responsabilité
Le nourrir
Garde-le au chaud
Donnez-lui le droit de mener une vie décente
Arrête ces monstres du ciel avec les barils de la mort
Venez rejoindre les enfants de Ghouta
Touchez leurs visages, écoutez les bruits de leur estomac affamé
Ne sont-ils pas humains?
Annoncez que vous vous souciez de tous les humains, pas seulement de votre sang, cela sauverait ce qui reste de l'esprit de Dieu en vous

 

.

 

DOCTEUR HOUSAM ADNAN

21 février 2018

 

.

 

HOUSAM ADNAN

Housam Adnan

 

.

 

From the womb of the dead
For more than twenty years, the scalpel was my companion
Dancing between my fingers, while I do my work very quietly
At the end of each day I whisper to it:
You did very well, and we saved many together
But everything changed now
The scalpel wasn’t what it used to be, lately
My fingers can’t handle it anymore
As if a part of my soul was taken into its teeth, and it can’t bear the wounds it witnesses anymore
Children without parts
Without eyes
Without faces
Women and families covered by sheets full of soil from the home land, with more of her children’s blood
The smell of gunpowder and its abhorred black color hangs over those hungry, withered faces
The screams of children, the wailing of women, the oppression of men, the impotence of doctors, reached my dead scalpel, creating a spirit of the misery inside it, that it stopped working after what it witnessed, but those cries did not reach the hearts of the world to awake it

Today, all those who came to us are slim skinny bodies that haven’t tasted food for days. Buried with their children under the rubble of those barrels that do not distinguish between stones and human
Today from under the rubble of our homeland they brought to me a mother in her seventh month of pregnancy, with two of her children
If I told you that the misery of the world came together in the eyes of those children, I wouldn’t be describing enough
The first child without a right leg and has a broken arm. The other has lost his eye and shrapnel entered his chest, and the mother is struggling to survive. The shrapnel has broken all of her slim body sending to our hands to witness her last breath.
I see her struggling for survival, her eyes are fixed on her little ones being in that situation
The father left them, dead, a few months ago
They brought them to me in one cover, because we lost our Patient stretchers, we used them as beds, because beds are full
I beg you to imagine with me, just for a moment that scene and that torn, torn blanket that carried the four lives: the mother, her fetus and her two children.

A colleague whispered in my ear
Maybe we can save her baby
For the first time, I sat down thinking with my head down
“do we save him, or leave him happy with his mother without seeing the ugliness of this world,
Do I let him go with her
No.. no
My mission is to save him
I looked around
Her torn children
Her soul that’s leaving her body
The noise of planes and exploding barrels
Children’s crying that burns the heart
And my colleague whispering:
What are you waiting for
Come on

There’s a life we should get out
I looked at my scalpel and friend
To what life will you get him out?
The world of barrels, fire and disappointment?
The world of orphanhood, oppression and hunger?
Who will breastfeed him?
Who will change his pampers?
Who will rock him?
Who will hear his weeping?
Yes, he has a god that won’t give up on him, but I became unable, along with my scalpel, to even think
My colleague’s voice awoke me from my fantasies
“her heart stopped”
I’ll take him out now, with her dead
And for the first time in my life, I couldn’t do it, my scalpel stopped me. I put it on the table, and left in silence.
My colleague continued his work, his eyes full of tears, while looking at me in surprise
All that incident took only a few minutes, but it marked a years-long wound, a wound made of defeat and impotence. I didn’t imagine I’d read in the stories of Tatars’ massacres, inquisition stories, or even the pharaoh’s tales.

World, leaders and kings of the world:
Your silence over these massacres affecting hundreds of thousands of innocent civilians, who did nothing except being on a land called “Al Ghouta of Damascus” is a shame
I’m not going to ask you to save #Ghouta, but to save your humanity
Save your people
Your children
And be sure, this baby coming out of his martyr mother is your responsibility
Feed him
Keep him warm
Give him his right in living a decent life
Stop these sky monsters with the barrels of death
Come and join the children of Ghouta
Touch their faces, listen to their hungry stomach’s noises
Aren’t they humans?
Announce that you care about all humans, not only your blood like, this would save what’s left of god’s spirit in you

#SaveGhouta

LA TRAVERSÉE DES ILLUSIONS...Extrait

0
0

"Il était une source qui coulait de nuit. Beaucoup s'y abreuvèrent qui jamais ne la virent, mais entendirent son murmure. Peut-être que le murmure était en eux ; mais il était confirmé par la source.
Source libre, pas plus ici que là : l'heure vient, et elle est déjà venue, encore qu'elle suscitât en divers lieux des arbres et des prairies qui fleurissaient en toute saison. Beaucoup venaient, repartaient avec la mémoire de la source. Qui cessait de l'entendre n'était plus qu'une ombre parmi les vivants et n'existait que pour la retrouver. Nul n'avait l'idée de la représenter. Qui l'entendait donnait désir de l'entendre.
Vint le Promoteur qui s'était converti tard à la source et qui bâtit la ville. On peut dire cependant que la ville fut bâtie par la source. Ce n'était pas une ville comme les autres. C'était une ville pour les passants. Les passants ne repartaient pas avec la nostalgie, ayant découvert que la source était partout. La ville était petite, les prairies prospéraient aux entours, parce que les gardiens de la source ni ne se mariaient ni ne se livraient au commerce des choses pas plus qu'à celui des pensées. Ils parlaient peu. Toujours pour renvoyer les passants à eux-mêmes. La source habitait leur voix, leurs gestes, ils donnaient envie de s'abreuver, et rien d'autre.
Le temps vint que le Promoteur cessa de dormir. L'amour de la source le tint éveilléà cause du souci qu'il avait que tous puissent reconnaître et vénérer la source. Il constitua un conseil de tout, nomma des Sous-Promoteurs. La source fut signalée par un monument. Glorifiée, dirent les uns, séparée ou empêchée, dirent les autres. Des palais se bâtirent. Les prairies reculèrent. La ville devint nombreuse et prospère, remplie de vacarme. On n'entendit plus la source, à cause du vacarme et des voix qui disaient : la source, la source. Ceux qui prétendirent qu'elle avait cessé de couler et que les Promoteurs avaient canalisé l'eau polluée des fleuves furent appelés incroyants ou ennemis. On fortifia la ville." 

 

 

.

 

 

JEAN SULIVAN

 

 

.

 

larrieu

Oeuvre Jean-François Larrieu

ACCOINTANCES

0
0


La poussière des bombes m’étouffe, m’écrit une amie ce matin,

et j’ai envie de lui répondre la poussière des bombes

et celles sur ces langues sèches qui ne bougent plus,

dans nos bouches brûlées de trop d’images,

de trop de chiffres monstrueux derrière lesquels on ajoute

Enfants Tués

Enfants Cassés

Humains Écrasés,

la poussière de Paris, de Londres, de Berlin, de New York,

je vous épargnerai Beijing où la poussière est noire,

Moscou où elle est rouge de sang frais qui coule,

la poussière qui est devenue notre lot,

poussière d’idées, toutes petites pensées,

les idées noires les idées brunes,

et La peur, devenue le quotidien, celle de la poussière des bombes,

la poussière des écrits,

et les Visqueux derrière leurs écrans qui guettent,

si tu penses bien, si tu penses mal,

et pour eux le mal et le bien se sont banalisés,

objets de très grande con-sommation,

Vous êtes sommés de penser comme On veut, sinon… Gare devant,

ça menace, ça fonce, ça déchire, à mort celle-ci, aux chiens celui-là,

et tu finis tremblant dans ton fauteuil

tu dis Je ne m’occupe pas de politique je laisse cela aux gens qui savent,

je ne chanterai plus si vous le demandez,

même Alléluia,

vous y verriez une allusion, h’marr,

et Ceux qui savent te disent qu’Hannah Arendt fut une chanteuse des années 40,

dont on ne parle plus aujourd’hui car très datée,

elle voyait le mal banalisé partout,

alors que le bien est désormais norme labellisée,

nobélisée, entérinée, enterrée sous les fatras de ces discours imperturbables

des cravates et costumes bon genre, dépoussiérés, et que le mal c’est les autres,

Car les bombes ne tombent jamais sur ces gens-là, non,

dieu qu’ils fréquentent étroitement y veille,

ainsi que leurs porte-cotons, la langue prête,

puisque rien n’est trop doux pour les Rois, qui vont à leurs affaires de Rois

et aperçoivent, par éclairs, comment nous puons,

comment nous crevons,

comment nous sommes trop laids pour qu’ils nous regardent,

ayez pitié de leurs yeux, pauvres, disparaissez !

Pendant ce temps le bien et le bon ne se banalisent pas,

ils deviennent idiots et ridicules : voyez donc ces bisounours attardés,

la lippe mouillée de bonne volonté, et vous parlant d’amour,

pauvre con, tu n’as qu’à travailler pour te payer le costard,

et te payer la pute qui va avec, t’en auras de l’amour quoi,

2.000 neuros la nuit, bagatelles,

ici il y a des gens qui sont, et d’autres qui ne sont rien.

La poussière des bombes ne m’étouffe pas.

Pas encore.

J’ai encore l’œil clair,

me demandant qui les a vendues, les bombes, à celui qui les lance.

Qui prépare ses usines préfabriquées à installer dès que l’on aura balayé les cadavres,

qui se frotte les mains du futur Marché aux Voleurs,

qui, des réponses dans la foule ? … Non ? …

La poussière des bombes, moi, je la sniffe,

et je me torche le nez avec l’avant bras, avançant dans les ruines,

une grenade dégoupillée dans la main, une belle grenade aux grains rouges serrés,

une grenade à la con je ne sais pas me servir des vraies,

mais Si l’on vous dit que le bien n’existe plus,

répondez qu’il se cache, et que comme l’amour il attend son heure,

l’heure du ménage à faire pour enlever les poussières,

l’heure des braves et l’heure des jugements,

et que l’heure s’approche


Résolue.

 

 

.

 

 

ALEXO XENIDIS

 

 

.

 

tammam azzam

Oeuvre Tammam Azzam , artiste syrien

HALLELUJAH PAR GIOVANNI SOLLIMA

RENAUD GARCIA FONS

FLORA AURIMA DEVATINE

0
0

 Nous gardons et emporterons dans nos bagages quelque essence qui est :

Sur nos chemins de partage,
L’apport par chacun de son brin de conscience,
De réflexion, d’humanité,
Pour commencer à dire ensemble,
Avec nos mots, nos sonorités, nos musiques intérieures,

La chose à transmettre,
L’esprit de juste mémoire :

Tailler, ajouter, renouer, rénover,
Aplanir, étendre et retresser la natte humaine. 

 

 

.

 

FLORA AURIMA DEVATINE

 

.

 

 

 

Giuseppe Sticchi2,

 

Oeuvre Giuseppe Sticchi

 

 

 

AU VENT DE LA PIROGUIERE...Extrait

0
0

Où est-il le chemin 

Que chacun de nous suit ?

Il me faut y passer

Y pousser ma pirogue.



D’autres avant toi

En effet sont passés

Mais la mer

Derrière eux

A effacé leurs traces.



Je n’ai plus de repères

Je n’ai plus les Anciens

Pour me guider en mer.



Je n’ai plus qu’à passer

Qu’à pousser ma pirogue

En faisant mon chemin.
.
.
.
.
FLORA AURIMA DEVATINE
.
.
.
.
.

John Webber Raiatea

Oeuvre John Webber, Raiatea 1787

BRUNO ODILE...Extrait

0
0

A mon tour, si je savais pleinement déverrouiller mes lèvres, il me faudrait plonger plus loin que mes cris condamnés à l’exil. Peut-être, arriverais-je ainsi à ciseler tous les sourires anciens qui remontent comme des rots chargés de rouille fiévreuse. Je sais à présent qu’il n’y a pas d’heure et qu’il n’est pas de temps exact pour que les mains déliées ne se replient sur la poitrine du jour. Chaque mot se recroqueville sur les commissures desséchées de l’espoir. Il n’existe pas de temps pour mourir ivre de nostalgie, il n’y a que le murmure strident de l’absence plié sur le coin de mes yeux.

Souvent, j’ai convoité des haltes douces, des alcôves de répit, des parenthèses renfermant et protégeant la quiétude fragile. J’ai battu le vent pour qu’il grimpe plus haut. J’ai disputé l’éclaircie aux sombres marasmes des angoisses. Aux pentes abruptes des falaises, l’adieu est devenu ce caillou qui roule dans la poussière blanche. Certains soirs de pleine lune, je le vois glisser comme une lueur aveuglante dévale le ciel à grande vitesse. Une boule de blanc traverse l’horizon puis elle sombre dans le tournis des siphons de l’univers qui avalent tout l’océan de ma tendresse d’une seule goulée.

Une présence demeure dans le vide concret. Le temps pioche une erse dans ses stocks, puis s’abat comme un profond coup de hache à double tranchant. Nous sommes à la limite. D’un côté, l’effondrement des heures, et de l’autre l’espace rétréci de soi. Nous sommes dans la parenthèse, dans l’oubli façonné par la raison sectionnant la frontière. Le temps est cette valse fugace, ce tango aux pas légers fourmillant d’ombres musicales. Les heures sont des méningites, des atrophies ostentatoires où flambent nos mouvements. Partout, dans la respiration du monde, j’entends parler des voix. La tienne parmi la meute. La tienne écartée de la foule, plantée dans le noir comme une lanterne douce.

Où que tu sois, je sais que tu te souviens de moi. Parce qu’au fond du silence brille le langage des ondes persistantes et le souffle de l’humanité. Perdurant dans la chute, un jour, l’absence s’érodera. Elle deviendra l’empreinte du cœur dans la saillie exaltée du vide. Un matin curieux du printemps, on se lèvera ensemble comme une mort se réveille des ténèbres. Alors, on embrassera les premiers rayons du soleil coiffant les branches de pins où nous sommes restés suspendus. On soulèvera les draps, on avalera un café, et l’on repartira dans la tiédeur de la nuit avec une sirène sur l’épaule. Quelque part, l’absence aura musclé la respiration du vide et nos souffles connaîtront le partage avec l’infini. A présent, ils dévissent l’air qui a déjà servi.

 

 

.

 

 

BRUNO ODILE

Tous droits réservés ©

http://brunoodile.canalblog.com/

 

.

 

Katya Gridneva6

Oeuvre Katya Grydneva 

BONJOUR VIEILLESSE

0
0

J'aurais pu dire:

Vieillir, c'est désolant, c'est insupportable,
C'est douloureux, c'est horrible,
C'est déprimant, c'est mortel.
Mais j'ai préféré«chiant»
Parce que c'est un adjectif vigoureux
Qui ne fait pas triste.
Vieillir, c'est chiant parce qu'on ne sait pas quand ça a commencé et l'on sait encore moins quand ça finira.

Non, ce n'est pas vrai qu'on vieillit dès notre naissance.
On a été longtemps si frais, si jeune, si appétissant.
On était bien dans sa peau.

On se sentait conquérant. Invulnérable.
La vie devant soi. Même à cinquante ans, c'était encore très bien….Même à soixante.

Si, si, je vous assure, j'étais encore plein de muscles, de projets, de désirs, de flamme.
Je le suis toujours, mais voilà, entre-temps j'ai vu le regard des jeunes…..
Des hommes et des femmes dans la force de l'âge qui ne me considéraient plus comme un des leurs, même apparenté, même à la marge.

J'ai lu dans leurs yeux qu'ils n'auraient plus jamais d'indulgence à mon égard.
Qu'ils seraient polis, déférents, louangeurs, mais impitoyables.

Sans m'en rendre compte, j'étais entré dans l'apartheid de l'âge.

Le plus terrible est venu des dédicaces des écrivains, surtout des débutants.
"Avec respect", "En hommage respectueux", "Avec mes sentiments très respectueux".

Les salauds! Ils croyaient probablement me faire plaisir en décapuchonnant leur stylo plein de respect? Les cons!

Et du « cher Monsieur Pivot » long et solennel comme une citation à l'ordre des Arts et Lettres qui vous fiche dix ans de plus !

Un jour, dans le métro, c'était la première fois, une jeune fille s'est levée pour me donner sa place…..
J'ai failli la gifler. Puis la priant de se rassoir, je lui ai demandé si je faisais vraiment vieux, si je lui étais apparu fatigué. !!!... ?

-- "Non, non, pas du tout, a-t-elle répondu, embarrassée. J'ai pensé que".
-- Moi aussitôt : «Vous pensiez que?
-- "Je pensais, je ne sais pas, je ne sais plus, que ça vous ferait plaisir de vous asseoir".
- "Parce que j'ai les cheveux blancs"?
- "Non, c'est pas ça, je vous ai vu debout et comme vous êtes plus âgé que moi, çàété un réflexe, je me suis levée".
-- "Je parais beaucoup…beaucoup plus âgé que vous"?
-"Non, oui, enfin un peu, mais ce n'est pas une question d'âge".
-- "Une question de quoi, alors?"
- "Je ne sais pas, une question de politesse, enfin je crois".»
J'ai arrêté de la taquiner, je l'ai remerciée de son geste généreux et l'ai accompagnée à la station où elle descendait pour lui offrir un verre.

Lutter contre le vieillissement c'est, dans la mesure du possible, ne renoncer à rien.
Ni au travail, ni aux voyages, ni aux spectacles, ni aux livres, ni à la gourmandise, ni à l'amour, ni au rêve.
Rêver, c'est se souvenir tant qu'à faire, des heures exquises.
C'est penser aux jolis rendez-vous qui nous attendent.
C'est laisser son esprit vagabonder entre le désir et l'utopie.

La musique est un puissant excitant du rêve. La musique est une drogue douce.
J'aimerais mourir, rêveur, dans un fauteuil en écoutant soit l'adagio du Concerto no 23 en la majeur de Mozart,
soit, du même, l'andante de son Concerto no 21 en ut majeur,
musiques au bout desquelles se révèleront à mes yeux pas même étonnés les paysages sublimes de l'au-delà.
Mais Mozart et moi ne sommes pas pressés.
Nous allons prendre notre temps.
Avec l'âge le temps passe, soit trop vite, soit trop lentement.
Nous ignorons à combien se monte encore notre capital. En années? En mois? En jours?
Non, il ne faut pas considérer le temps qui nous reste comme un capital.
Mais comme un usufruit dont, tant que nous en sommes capables, il faut jouir sans modération.
Après nous, le déluge?....Non, Mozart.

Voilà, ceci est bien écrit, mais cela est le lot de tous, nous vieillissons !...
Bien ou mal, mais le poids des ans donne de son joug au quotidien

 

.

 

BERNARD PIVOT

 

.

 

tomasa martin2

Oeuvre Tomasa Martin

NOUS AVONS PERDU NOTRE ACCASTILLAGE D'HUMANITÉ

0
0


Nous avons perdu notre accastillage
d’humanité
notre âme cassée en morceaux
par nos propres poings
nous n’avons plus de mains tendues
vers les populations civiles 
ciblées par des barils de clous
par des déversements de chlore

nous les abandonnons

Syriens vos enfants dans des couveuses
n’ont pas le temps de commencer à vivre
que déjà la mort guerrière les décime
impossible de sortir de l’hôpital
visé par des bombes incendiaires
et les médecins à l’humanité sans frontières
gisent sur le sol avec leurs bistouris leurs forceps
leurs peu d’outils de travail à la main

pourtant ces hôpitaux
font office d’arches de Noé
supposées ne pas prendre l’eau
alors que le déluge guerrier a lieu

il n’existe plus pour vous
d’endroit neutre 
où de la nourriture des médicaments
vous seraient distribués
il n’existe autour de vous
que des déserts dénués d’humanité

piégés par des moussons de bombes
destructrices
enflammés par des torrents de feu
jusqu’à votre âme que l’on veut brûler
même les caves montant d’étage
se trouvent au grand jour
vous exposant tels des rats
aux pièges tendus 
par le machiavélique Bachar al-Assad

j’ai entendu ce médecin 
dans la Ghouta orientale assiégée
un ami et confrère à qui je parlais 
à l’autre bout du fil 
tout à coup l’explosion furieuse des bombes
et la conversation passée subitement
de vie à trépas

j’ai perdu le fil 
la gorge nouée 
le vide et un silence assourdissant
soumis au gaz sarin de l’inhumanité
je me suis effondrée

rebelles au régime de Damas
soutenus par l'Occident
considérés comme terroristes
par le tyran 
et le camp de Palestiniens
pris en étau
et les Kurdes visés 
par le pays voisin
la trêve aura-t-elle lieu
les rachitiques seront-ils nourris
la paix un jour sera-t-elle 
l’unique pays 
l’éternité sur cette terre

 

.

 


© Marie Cholette – Québec –

Le 25 février 2018.

Tous droits réservés.

 

.

 

 

YASIN AKGUL

 

Photographie Yasin Akgul

LETTRE A LA GHOUTA

0
0

Il y a eu une révolution en Syrie, c’est cette évidence que toute la géopolitique de comptoir, que tout l’immonde conspirationnisme de clavier, dénient depuis maintenant des années. Cette lâcheté de bistrot qui se répand sans mal du sommet de l’État jusqu’au coeur d’une certaine extrême gauche, elle ne sera pas oubliée pas plus que la dignité des habitants de la Ghouta insurgée

 

.

 

Chère Ghouta,

 

 

C’est le cœur empli de honte que je t’écris. La honte de faire partie de deux communautés qui, lâches ou aveugles, t’ont abandonnée.

Pour commencer, je fais partie de ce pays qu’on nomme France ; ce pays qui se veut celui des droits de l’Homme et de la fraternité ; ce pays qui a une histoire commune avec le tien et dont tu as su te libérer par la force. Un pays qui te connaît donc bien. Pourtant, en 2008, ce pays a invité Bachar, ton tyran, à son défilé du 14 juillet. Ce Bachar qui, un an plus tard, armait ses aéroports d’armes chimiques en prévision de ton probable soulèvement. La France est aussi un pays de traditions. La preuve, elle hébergeait déjà - et héberge toujours - l’oncle criminel contre l’Humanité, Rifaat al-Assad, boucher de la prison de Palmyre et auteur du massacre de Hama. Tu t’en souviens, ce massacre a eu lieu en 1982. Quatre ans plus tard, le président français lui délivrait la Légion d’Honneur pour « service rendu à la nation ».

Ce pays qui est mien, j’ai pourtant espéré qu’il t’aiderait, quand tu t’es soulevée. Parce que désormais, nous ne pouvions plus faire semblant de ne pas connaître le vrai visage de Bachar el-Assad. Toi qui t’es soulevée, chère Ghouta, pour ta liberté, pour ta dignité, désormais debout, après 40 années à genoux devant les Assad, tu as été maltraitée, torturée, battue, gazée, bombardée, violée et écorchée par le régime. Malgré tout, tu tenais bon et tu restais debout. Le goût de la liberté dans la bouche, tu ne pouvais désormais plus plier le genou devant le tyran. Car on ne revient pas de ces choses-là. Et pour toi, c’était désormais la liberté ou la mort. Et comme nous étions fiers ! Ghouta libre, Ghouta digne, Ghouta debout ! Et nous nous avons vécu avec toi l’espoir de te voir enfin débarrassée du boucher de Damas et de ses shabihas. Tu n’avais besoin de personne pour te refonder et pour faire reculer la barbarie. Mais le régime a frappé fort, et quand le nuage de gaz sarin s’est abattu sur toi à l’été 2013, nous avons pleuré avec toi. Ces images de toi, de tes enfants qui agonisaient, convulsaient, suffoquaient, nous arrachaient cœur et larmes. Notre colère était sans limite et Bachar venait de franchir la ligne rouge. Alors tu as attendu. Après avoir compté tes 1300 morts, tu t’es réfugiée dans des bâtiments et tu as attendu que nous arrivions. Nous, qui avions promis que nous interviendrions si Bachar allait trop loin. « Les Français vont arriver ! », croyais-tu. Tu as attendu. Encore et encore. Et nous ne sommes jamais venus. Nous avons espéré pouvoir te tendre la main et venir te tirer des griffes du bourreau mais nous ne l’avons pas fait. Et nous nous sommes haïs pour cela. Nous avons haï aussi tous ceux qui avaient rendu possible cette trahison. Nos gorges serrées n’arrivaient pas à accepter que nous t’abandonnions à ton sort. La boule au ventre et la rage au corps, tu t’es relevée et tu as continué les combats et à t’organiser pour vivre malgré l’état de siège permanent. De notre côté, nous avons continuéà te défendre, ici, chez nous.

Mais le camp politique auquel j’appartiens n’a pas su être à la hauteur. Ce camp qui défend des valeurs d’égalité, de liberté des peuples, d’auto-détermination, de démocratie, ce camp-là n’a pas su voir en toi l’incarnation de toutes les idées qu’il défendait. Lui qui ne te connaît pas, ne voit que les drapeaux, les symboles et les mots. Il ne comprend pas que ton lexique n’est pas le nôtre, mais que ton cœur et tes idées nous sont communs. Que toi, tu es éprise de liberté et que tout ce que tu veux, c’est pouvoir vivre dans la dignité. Cette gauche qui ne te connaît pas a pris peur et t’a tourné le dos. Elle t’a comparéà ceux que tu as combattu et expulsé : les membres de l’État islamique. Elle t’a bafouée, ignorée et salie. Quand ta sœur Alep est tombée, une certaine gauche a même ironisé sur son sort. Pourtant, cette tartuffe amoureuse d’elle-même, que lui faut-il de plus ? Elle qui a constamment la révolution à la bouche, une révolution populaire autogérée était là, bien réelle, sous ses yeux, chez toi, mais quel a été ton tort si ce n’est d’ignorer son champ lexical ? Et pourtant, quoi de plus libertaire que tes comités locaux, que tes tansiqiyya al-malhalliyya, que l’autogestion de toutes tes infrastructures, que tes civils qui s’organisent face à la pénurie, que tes associations de femmes pour la gestion des orphelins, que tes écoles enfin libres d’écrire leurs propres programmes, que tes liwa et tes katiba qui dégagent Al-Nusra et Daech à coups de pieds au cul de tes villages et de tes villes ? Mais non. Cette gauche-là, se cache derrière l’anti-impérialisme et la Realpolitik. Son anti-atlantisme primaire et bas du front, cet anti-impérialisme des idiots utiles ou conscients du complice Poutine, n’est que la marque d’un campisme stupide et gras, lui faisant oublier qu’un peuple qui se soulève contre son tyran ne connaît d’autre camp que celui de la dignité et se moque bien des petites tambouilles des puissants. La Realpolitik de cette gauche et de son ennemie de droite n’est qu’un mauvais alibi pour le crime qu’elle a commis non seulement de t’abandonner à ton sort, mais de faire preuve d’une hideuse complaisance avec les alliés de ton bourreau. Comment peut-il ne pas lui être insoutenable de laisser ta révolution s’éteindre dans ces conditions atroces quand, dans le même temps, elle nous fait l’éloge d’un parti que tu connais, issu de la tradition stalinienne et qui en a conservé tous les réflexes ? Et pendant que cette gauche vocifère contre toi, toi qui a pourtant accompli ce dont elle a toujours rêvé, notre président joue avec des crayons de couleur qu’il a voléà Obama. Il s’amuse à tracer des lignes imaginaires de toutes les couleurs et à faire de grandes déclarations absurdes et sans aucun sens. Il trace des lignes rouges de ton sang qui coule chaque jour mais dont il se moque tant que cela reste du fait des balles, des barils, de la torture et de la faim. Le gaz, si chère Ghouta... Il attend le gaz ! Mais comme tu dois rire de cette fausse promesse, toi qui a attendu en vain quand le sarin a dévasté tes villages, suffoqué tes enfants ! Quand tu as pleuré Zamalka et ses habitants...Mais ce Macron, lui, la grenouille « intraitable » cherchant à se faire aussi grosse que le bœuf, ne défend pas l’internationalisme, la révolution populaire et l’autogestion. À bien y réfléchir, il ne te ment qu’à moitié. Mais j’espère que la postérité condamnera durement la médiocrité d’une certaine gauche française et européenne qui me fait terriblement honte, tant elle ment aux autres et à elle même.

Alors que tu agonises sous les bombes, nous nous apprêtons à fêter les 7 ans de ta révolution. Il y a 7 ans, seuls quelques fous sortaient manifester en silence, des bougies à la main, sur une place damascène en soutien aux printemps arabes. 7 ans plus tard, ta Syrie est dévastée. Et bientôt, viendra le mois de mars. Nous fêterons les 7 ans de la torture des enfants de Deraa et des premières fosses communes de la révolution. Enfin Assad, lui, les fêtera. Sur sa montagne de cadavres. 500 000 morts. Absurde. Vous vous êtes levés contre la tyrannie pour la liberté et la dignité, devenant un exemple pour le monde entier. Seulement, le monde n’a pas étéà la hauteur de cet exemple.

Et aujourd’hui vous êtes seuls sous les bombes. Mais pas tout à fait. Nous sommes là. Nous, les quelques-uns qui continuent à espérer votre victoire. Nous sommes dispersés, mais nous sommes bien là. Nous suivons de près votre quotidien. Nous vous écoutons, vous regardons. Sur tes vidéos, chère Ghouta, nous voyons tes femmes, tes hommes, tes enfants, qui émergent des décombres après un bombardement. Les ruines, le cri des mères, les larmes des enfants, l’empressement des sauveteurs qui les ramènent vers un hôpital bientôt à son tour bombardé. Nous avons peur avec vous, nous pleurons avec vous, nous hurlons de rage avec vous. Nous ne détournons pas les yeux. Nous n’avons plus que cela ; nous n’avons guère que cela. Nous resterons debout et droit avec vous. Jusqu’au bout, où que vous alliez. Nous poursuivrons Bachar jusqu’à la mort pour qu’un jour ou l’autre il paie ce qu’il vous a fait à toi, à Khan Cheikhoun, Alep, Daraya, Homs, Deraa, Idleb, Zabadani, Raqqa et toutes les autres. Nous collectons depuis 2011 les preuves de sa barbarie pour qu’un jour il puisse être condamné. Nous écrivons des livres pour que votre combat survive aux bombes et aux gaz et que les Syriens puissent continuer àêtre fiers de ce que vous avez fait et pour que personne ne puisse oublier. Ghouta meurtrie, Ghouta gazée, Ghouta bombardée, Ghouta endeuillée. Mais Ghouta rebelle, digne, libre et debout ! Toi, Ghouta, qui ne ploie pas et qui sait que tu n’as de toute façon aucune chance de survivre à une reddition. Car le « Régime » ne pardonne pas. Il torture puis exécute, massacre. Peut-être vas-tu disparaître. Ces gens, ces visages sur ces vidéos, bientôt, ne seront peut-être plus. Bombardés, gazés ou égorgés, après tout, quelle différence ? Heureux sont les morts car ils ne souffrent plus. Et si cela advient, nous devrons vivre avec tout ça. Ainsi que tous ces spectateurs silencieux qui se rassurent avec leurs « c’est compliqué » et leurs « nous n’y pouvons rien » mais qui bientôt diront entre le fromage et le dessert comme tout ceci était épouvantable et Bachar un être odieux. Nous verrons Assad vivre, lui. Se pavaner, jubiler, Poutine à son bras, Khamenei dans l’ombre, le Hezbollah comme garde du corps. Est-il possible de détourner le regard de toi sans se haïr ? Pourquoi se préserver des images que tu nous envoies si nous ne valons pas mieux que des lignes de couleurs qui se déplacent aux gré des vents ?

Chers Syriens, chers habitants de la Ghouta, d’Idleb et d’Afrin, nous vous regardons vous battre et mourir mais nous ne détournerons pas les yeux. Nous vous rendrons hommage jusqu’au bout et célébrerons votre courage et votre dignité. Nous n’oublierons pas et nous ne pardonnerons pas. Cela ne vous apportera ni réconfort ni survie. Mais cela nous évitera de nous haïr et de partager l’indifférence des cyniques et des salauds. Vous êtes la fierté des hommes et des femmes qui se battent pour la liberté et la dignité. Vous êtes nos consciences meurtries mais une chose est sûre : nous ne voulons d’avenir qu’ensemble ; qu’avec vous.

Houria Ghouta. Houria Souria.

 

.

 

 

SARAH KILANI

le 21 février 2018

 

 

.

 

civils-marchent-rue-ruine-ville

Syrie...

LUIS CERNUDA

0
0

...

Je rencontrai cette forme devant la mienne

À l'heure du crépuscule,

Quand les disparitions

Confondent pour les yeux les couleurs,

Quand le dernier amour

Cherche l'ultime corps.

Une angoisse sans fond hurlait entre les pierres ;


En route vers l'air, des hommes sourds,

Tête oubliée,

Passaient au loin, libres ou morts ;

Honteux cortège de fantômes

Et leurs chaînes brisées qui pendaient à leurs mains.


Alors la vie posa une lampe

Sur des murs sanglants ;

Le jour déjà fatigué séchait tristement

Les futures aurores, rapiécées

Comme loques de roi.


La lampe c'était toi,

Mes lèvres, mon sourire,

Forme que trouvent mes mains dans tout ce qu'elles

touchent.


Si mes yeux se ferment c'est pour te trouver en rêve,

Derrière la tête,

Derrière le monde asservi,

Dans ce pays perdu

Que sans le savoir nous avons quitté un jour.

 

 

.

 

 

LUIS CERNUDA

 

 

.

 

Bahram Dabiri

Oeuvre Braham Dabiri

JEAN SULIVAN...Extrait

0
0

Que vous manque-t-il, vous qui avez tout ? Hommes, femmes, enfants, chiens, voiliers sur la mer, un cheval pour galoper dans les forêts, le samedi, parce que, disiez-vous, « rien n'est plus orgastique que le cheval ». Qu'est-ce que ce léger malaise qui vous suit partout ? L'absence dans le bonheur et la tendresse même. Les arbres ou l'herbe des champs vous parlent-ils, leur parlez-vous, quand vous êtes seuls ? Êtes-vous jamais seuls ?
Un pas est fait quand un homme a compris qu'il est la résultante de pressions sociales, familiales, idéologiques et religieuses. Non qu'il soit conduit à s'évader pour aller ailleurs, mais dans la découverte d'un écart il peut percevoir une nouvelle alliance et se sentir plus proche des mille riens des jours. Une aile qui passe, la respiration des pins, un pêcheur qui longe la mer depuis les siècles des siècles, l'ouvrier du petit matin qui siffle sur son vélo sans tenir le guidon. Ces instants de communion où tu perds ton identité et tu la trouves dans cette perte même. Capable de solitude, n'ayant plus besoin de voir du nouveau, proche d'un enfant, d'une bête, en prise directe sur ce qui est, sans désir de savoir ni de posséder. Avec une densité de présence. Capable de prière.

 

.

 

JEAN SULIVAN

 

.

 

JEAN SULIVAN

 

 

 

 

 

FLAMENCO FUSION


IDIOTS SUR LE SABLE...Extrait

0
0

Nous finirons idiots sur le sable
Avec nos poèmes complètement idiots.
Le gardien du Musée dira
Qu’il est l’heure de la fermer
Et nous émettrons des réserves.
Alors on nous supprimera
Le papier et les timbres
Nos stylos japonais
Comme des sabres.
Nous garderons les mots en mémoire
Nos mots idiots
Nos mots d’amour jusqu’au bout de la nuit.

Nous finirons idiots sur le sable
Avec Emilie, Valentine et Sophiane
Des petites frangines de quatre, cinq ou six ans
Avec Mélodie et Julie –
L’histoire de la vache qui pleurait
Avec des poussières de lune de 69
Et Louis Armstrong qui joue de la trompette

Nous finirons la nuit sous les étoiles du monde
Avec des poèmes kabyles ou tchèques
Pygmées ou aztèques
Des épopées d’amour
Les chants de Pretoria
Rilke Rainer Maria Nelson Mandela
Et le silence
Le silence des étoiles du monde
Et des langages du monde

Nous finirons idiots sur le sable
Avec nos poèmes complètement idiots.
Le gardien du Musée dira
Qu’il est l’heure de la fermer
Et nous émettrons des réserves.
Alors on nous supprimera
Le papier et les timbres
Nos stylos japonais
Comme des sabres.
Nous garderons les mots en mémoire
Nos mots idiots
Nos mots d’amour jusqu’au bout de la nuit.

 

.

.

 

© Patrick Chemin

1986

.

 

.

 

 

 

love-écrit

 

 

 

 

 

 

CADEAUX

0
0

Je donne
Des soleils couchants ivres de cuivre blond
Leurs fanfares rouges la passementerie des nuages
Les prairies où bleuit l’ombre de tes paupières
Et cette terre fine d’où jaillirent tes mains
La peur ancrée des nuits aux bastingages du navire
La faiblesse jaune du fanal qui tremble
Et les cordages qui soutiennent ta gorge
Pour qu’elle s’ouvre au vent comme une voile rassurée
La vie qui bat dans le poignet des pierres
Frissonnante et le souffle qui court sous ta peau
La grâce descendue sur la fleur penchée 
Sa tête qui s’incline et remercie de fleurir
Je donne
Tout
Ce que je ne possède pas
Mais
Que je sens exister

 

.

 

ALEXO XENIDIS

 

.

 

Katya Grydneva 2,

 

Oeuvre Katya Grydneva

 

 

 

EPITOLA POSTHUMUS...Extrait

0
0


Tu subtilises le cœur

de ce tyran amoureux

Voilà pourquoi sa passion

reste prodigue de tant d'égards

dans ses cruelles manipulations

Voilà pourquoi elle n'ose pas

te mutiler ni te déchiqueter

t'écrabouiller ni te pulvériser

préférant pour toi une douce mort

une sorte d'insensible euthanasie

 

Une stupeur à l'instant qui

te ravit à l'air

Une brume d'éther

qui efface le monde

Un étouffement progressif

Un dernier sursaut d'ailes

 

D'une chirurgie d'amateur

tu sortiras

épinglé sur le blanc

Tu seras conservé

jalousement

pour un regard

qui te dévorera

en d'exclusives parenthèses

d'admiration

 

Mais toi

vif esprit du jardin

tu te seras depuis longtemps

envolé loin de la relique

sèche & crispée

abandonnée

à une adoration perverse

 

.

 

 

RAYMOND FARINA

Editions Rougerie

 

.

 

Tejo Verstappen

Oeuvre Tejo Verstappen

 

 

ASPHODELE...Extrait

0
0

Il est difficile
de se tenir au courant par les poèmes
pourtant des hommes meurent misérablement chaque jour
par manque
de ce qu’on y trouve.

 

.

 

WILLIAM CARLOS WILLIAMS

1883-1963 

 

.

 

 

paglia orba janvier2018,

Paglia Orba, Corse

 

 

 

CHRISTIAN ARJONILLA...Extraits

0
0

Dans la caresse de l'ombre et de la lumière
au secret
le cœur retrouve la mémoire
autre
rythme
le rythme
autre mémoire
Ce fantôme parle aux maisons
aux paysages du hasard
le désastre lui répond

...

Perdre pieds
répondre au vide
confondre le cadavre exposé sur nos épaules
retrouver l'apesanteur
où se dévisagent des mots qui nous ressemblent

...

Toujours l'entremonde happe et envahit
Il y a longtemps que je n'ai plus de nom
pas d'unité de lieu ni de temps
Le trouble ne saurait me troubler
la fascination me fasciner
Je parle à l'invisible

 

.

 

 

CHRISTIAN ARJONILLA

 

 

.

 

 

CH

 

 

 

Viewing all 4542 articles
Browse latest View live




Latest Images