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Channel: EMMILA GITANA
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RESONNANCES (4)

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Heureux temps que le présent perpétuel. L’enfance s’y enroule comme une roue pas encore formatée par la rigueur de la morale et du bien séant. L’heure ensemence l’heure du plus pur murmure des fleurs. Le pas incertain ouvre des voies inconnues, il pleut des premières fois à foison. La nouveauté subjugue l’espace, catapulte l’obscurité que l’on croit revers de la blancheur. Nous marchons si souvent les yeux fermés qu’il nous arrive de traverser le feu sans même le voir. Comme cette eau oubliée dans le fond d’un baquet vieilli, nous voyageons dans le voile de buée qui s’évapore. Des lueurs nomades accompagnent la beauté de la terre jusqu’aux sommeils profonds. Le jour se lève avec l’évidence d’un déferlement. Des cris, des appels, des rires et des sanglots claironnent déjà sur le pont entre la lune et le soleil.  

Pour aller à l’essentiel, j’ai longtemps cru qu’il fallait envisager l’existence avec amour. Que le cœur rassemblait à lui seul toute la panoplie de l’excellence à vivre. Mais, après maintes réflexions, j’en ai déduit que la joie était l’élément prioritaire et qu’il n’était pas concevable de supposer l’amour plus vaillant que le plaisir de vivre. Sans joie, l’amour ne peut pas exprimer sa pleine mesure. Puis, l’âge avançant, j’en conclus que l’élément fondateur n’était ni l’amour, ni la joie, mais la paix, le calme souverain à l’intérieur de soi. Que la sérénité plénière drainait toute notre personne vers l’accomplissement le plus exhaustif et le plus lumineux. Mais, là encore, mon esprit se fourvoyait dans des expectatives étriquées, dans un raisonnement manichéen propre àénoncer une solution pragmatique alors que l’existence est somme toute beaucoup plus aérienne. Aujourd’hui, je sais devoir ma compassion intime à l’ensemble de ces principes. Que l’un ne va pas sans l’autre, qu’il faut une singulière concordance du corps et de l’esprit pour ressentir l’extrême frisson de la chose vivante.  

O terre lumineuse entends-tu le bourdonnement de la ruche dans une cuillère de miel ? Sais-tu l’abondance de l’air dans la poudrée de clarté qui nous éclaire ? Des cris hachés parviennent à mes oreilles. Des hommes, femmes et enfants, tombent égorgés par les coups de burin assénés par la ravine humaine. La haine et le mépris font encore des ravages. J’ai toujours dans le fond de l’œil cet invisible hurlement, cette horde abattue par l’absurdité. Le bruit de ces gémissements anonymes m’oblige à conserver la tête froide et le cœur sur le bord du givre. Dans un silence mortel, dénué de tout fracas, pousse l’herbe sous la rosée matinale alors que l’ombre émaciée de la nuit fait encore des dégâts sur la blancheur balbutiante. Sommes-nous seulement des voyageurs dans la voix, des souffles sourds embués aux pieds d’un printemps sans bourgeons ? Dans l’espadrille des sons, le mot ne vient qu’après le sens. Des phrases incomplètes défilent en minces filets d’encre à l’intérieur de mes veines gonflées de larmes. Le chaos est bien réel.

J’apprends très lentement à vivre à ciel ouvert. Les jours survivent aux jours et le soleil joue à cache-cache avec la chair de mes désirs. En ce lieu azuré l’espace est voilé : nulle promesse, nulle assurance. Malgré le chemin accompli, le voyage porte les marques de la nacelle du temps plus que celles de son contenu. Dans la parole négligée, j’entends rugir au loin le peu d’éclair encore vivant. L’éclisse du silence ne va jamais aussi vite que le merveilleux. Heureux, celui qui peut voir au-delà de sa propre solitude. En moi, la clef des champs appelle un autre monde. 

 

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BRUNO ODILE

Sur http://brunoodile.canalblog.com/

 

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bruno

 


MARIA-DOLORES CANO

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Le monde le quitte, il s’accroche aux nuages, à la vie, à l’étoile. Il retient la lumière dans sa cage d’opale, le temps ne l’attend pas. Il se souvient le vent, ses cris dans les grands arbres, les fleurs sur le chemin au retour de l’école. La vie lui tient la main.

Dans ses yeux tout un monde, les astres en habits neufs, le sourire des enfants et ces perles de rêves qui égayent son cœur. Les oiseaux volent bas, ils embrassent les herbes et tissent leurs demeures. L’air est bleu, il écrit dans les cœurs des mots pleins de douceur.

La vie touche à sa fin, c’est un recommencement, une histoire à refaire, sans pierres sur le chemin. La nuit lui tend la main, les pleurs sont des cristaux tombés du ciel éteint. Ils disent le silence, toutes les peines du cœur, les eaux troubles qui engorgent le temps.

Dans sa main un pétale, une rose d’autrefois, une fuite du bonheur, un grand livre sans fin. Il lisse sa joue de ce parfum discret qui émane de sa main. Il donne son amour, il donne la main tendue, toutes les feuilles des arbres, leur douceur, leur parfum.

Il s’accroche aux étoiles, à l’eau du ciel, aux bêtes sur la toile, aux oiseaux du rivage. La mer est là, il entend son chant, ses claques sur le sable. Son cœur cogne, sa poitrine éclate et lacère la plage. De grandes baves d’écume mugissent et se déchirent.

La nuit avance, sa joue est sèche, ridée, sa robe dépouillée. Il vient de ces nuits solitaires, incertaines et sauvages. Il est seul sans amour, sans haine. Il est seul dans le temps. Le vent le porte loin pardessus les chemins, les haies et les clôtures. Son cœur est en voyage.

Dans la vase tout se perd, il entre en espérance. Il appelle le ciel, les aurores et la gloire, les chemins à venir. Il se pose et respire, il s’ouvre au monde nouveau, à l’infinie douceur, au refrain des enfants. Il écrit dans son cœur pour une germination.

Il déroule le temps, ruban d’or et safran, une graine pour la terre. Il nait.

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MARIA-DOLORES CANO

http://reveusedemots.blogspot.fr

 

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cyril blanchard 2

 Photographie Cyril Blanchard

http://cyrilblanchard.com/

 

JE VEUX

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Je veux vous dire un pays de mots

 Ou la nuit enfante la lumière, 

La mélancolie engendre L'ivresse 

et le silence est un langage…

 

Je veux vous offrir un espace

Dans mon paysage intérieur

Que ma poésie soit une

Maison commune

 

Je veux un verbe solidaire

Même traversant la page en solitaire

Je veux être écho de mes frères

 

Je veux écrire

Dans la solitude

Une poésie

Pour la multitude

 

Je veux du sang, de la chair

Des larmes, des rires 

Je veux la vie qui s'écrit 

Entre le désir et l'angoisse, 

La jouissance et la révolte

 

Je veux une poésie

Comme une fenêtre

Non comme un miroir

Et si mon reflet s'y trouve

Le voir dans vos yeux

 

Je veux allier 

A la brume du mystère

La clarté d'une évidence

Toucher le lecteur 

Au coeur

 

Je veux des mots libres 

Ne pas les mettre en cage

Garder une poésie sauvage

 

Je veux le grand jeu

Je veux jouer avec le feu

Etre flamme

C'est là toute mon âme

 

Je veux des mots 

Comme des étincelles.

Pour allumer des incendies

Je veux le flamboiement, 

L'incandescence

 

Je veux de ce chaos

Créer une harmonie

 

Je veux la poésie

Comme unique utopie

 

Je veux que résonne comme un adagio

La musique des mots

 

Je veux vous dire la poésie

Elle est tout ce qui chante en moi !

 

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FRANCIS PANIGADA

 

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FRANCIS

PROVISOIRE LA VIE

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Provisoire la vie
éclats du manque

tu me demandes
comment elle va
elle va son chemin
vers ce qui sépare

les enfants courent après leur vie
cercles indépendants de toi
ils se rejoignent parfois

tu caresses le chat douceur
tu sarcles bines arraches
tu t’en prends à l’angélique
elle infiltre ses racines
ramifications tenaces
là où tu attends des fleurs

tu marches heureuse
tu cueilles au hasard des talus
les menus bonheurs du jour
nombrils-de-Vénus
fragiles narcisses
premières violettes

tu veilles sur les morts
fleurs d’asphodèles
leurs doigts serrés sur le printemps
il ne demande qu’àéclore

tu leur parles de ton vivant d’ici
des vivants et des morts
sur la même terre

tu bûcheronnes parmi les feuilles
odeurs sauvages
les sangliers traversent
la mère et ses petits t’attendrissent
tu faisais de même jadis
jadis est loin
loin derrière toi
une vie autre s’efface
est-ce encore la tienne
rumeur sourde de la mémoire

tu attends
lenteur des jours
les rires des enfants
petites filles sautillantes
elles pépient sous la treille
tu gambades avec elles
tant que persiste un peu de jeunesse
— tu es vieille mammona
tu vas bientôt mourir —
peut-être pas encore
je reste encore un peu
je veille sur l’ancêtre
tu sais la très vieille maman qui doucement s’en va

elle s’éloigne vers le cercle
vers l’autre côté de l’horizon.

 

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ANGELE PAOLI

 

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PAUL MADELINE2

Oeuvre Paul Madeline

TOTEMS D'AILLEURS...Extraits

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...

 

Caillante d’espoir

Et piètre devenir

En souffrance

Qu'est-ce qu'une vie

Sinon gagner du temps

Comme on souffle sur ses doigts

Pour les garder du froid

Quérir un peu de chaleur

Pour se préserver du pire

Et poursuivre vaille que vaille

L'ineffable combat

 

.....

 

Sourdement sous la vague

et l’écho diluvien

comme la peur ancestrale

le naufrage d’un monde

qui nous glaviote sur la toile

quelques ris dans le cœur

sous les grains la tourmente

le dépit de gerber

au gré des entourloupes

à la cape au bord du vide

que l’accalmie revienne

 

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ALAIN JEGOU

 

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antoine josse2,

Oeuvre Antoine Josse

LOS PAJAROS PERDIDOS / LES OISEAUX PERDUS

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Amo los pájaros perdidos
que vuelven desde el más alla,
a confundirse con un cielo
que nunca más podre recuperar.

Vuelven de nuevo los recuerdos,
las horas jóvenes que di
y desde el mar llega un fantasma
hecho de cosas que amé y perdí.

Todo fue un sueño, un sueño que perdimos,
como perdimos los pájaros y el mar,
un sueño breve y antiguo como el tiempo
que los espejos no pueden reflejar.
Después busqué perderte en tantas otras
y aquella otra y todas eras vos;
por fin logré reconocer cuando un adiós es un adiós,
la soledad me devoró y fuimos dos.

Vuelven los pájaros nocturnos
que vuelan ciegos sobre el mar,
la noche entera es un espejo
que me devuelve tu soledad.

Soy sólo un pájaro perdido
que vuelve desde el más allá
a confundirse con un cielo
que nunca más podré recuperar

 

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J'aime les oiseaux perdus
qui reviennent de l’au-delà
pour se fondre dans un ciel
que plus jamais je ne retrouverai .

Les souvenirs sont à nouveau là ,
les heures de ma jeunesse envolée,
et depuis la mer vient le fantôme
de tout ce que j'aimais et que j'ai perdu .

Ce fut un rêve, un rêve que nous perdîmes
tout comme nous avons perdu les oiseaux et la mer ,
un rêve bref et aussi ancien que le temps ,
que les miroirs ne peuvent refléter .

Ensuite j'ai cherchéà t'oublier en tant d'autres
et cette autre, et toutes, étaient toi ;
j'ai fini par comprendre quand un adieu est un adieu ,
la solitude me consumait et nous étions deux .

Les oiseaux de nuit reviennent,
ils reviennent ,aveugles, sur la mer
la nuit entière est un miroir
qui me renvoie ta solitude .

Je ne suis plus qu'un oiseau perdu
qui revient de l'au-delà
pour se fondre dans un ciel
que plus jamais je ne retrouverai .

 

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 MARIO TREJO

Poète argentin (1926 - 2012 )

 

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PREFACE DE LA POSTERITE DU SOLEIL

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Pourquoi ce chemin plutôt que cet autre ?
Où mène-t-il pour me solliciter si fort ?
Quels arbres et quels amis sont vivants derrière l’horizon de ces pierres, dans le lointain miracle de la chaleur ?

Nous sommes venus jusqu’ici car là où nous étions ce n’était plus possible.
On nous tourmentait et on allait nous asservir.
Le monde, de nos jours, est hostile aux Transparents.
Une fois de plus, il a fallu partir …
Et ce chemin, qui ressemblait à un long squelette, nous a conduit à un pays qui n’avait que son souffle pour escalader l’avenir.
Comment montrer, sans les trahir, les choses simples dessinées entre le crépuscule et le ciel ?
Par la vertu de la vie obstinée, dans la boucle du Temps artiste,
entre la mort et la beauté.

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RENE CHAR

 

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RENE2

 

 

 

CECILE ODARTCHENKO

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Femmes jamais lasses
    mais éméchées
    de tant de mèches tressées
    de destins croisés
    de pailles mâchées et remâchées
    de lin roui et reroui dans les fouilles de vos mémoires
    dépositaires des fuseaux
    de navettes pour passer entre les trames
    ou naves à rames ou à voiles
    pour passer de vie à trépas
    rames et ramettes de papier
    oublies des oiseleurs
    ouï-dires des jardins publics
    où errent des fantômes de dames pipi
    de vieilles chaisières
    de reines de France
    de marchands de ballons au bout des fils de coton
    et fils sublimes de soies chinoises pour de jeunes gangsters masqués de bleu
    ou fils d’industrieuses araignées pendues aux branches d’un cerisier japonais
    capteur de perles
    à Central Park,
    tissez la patience aux branches nues du marronnier
    tissez le retour des hirondelles
    sur les fils conducteurs des secrets
    et de l’électricité
    tissez la joie pure de solitude
    avec les herbes givrées des tapisseries argentées
    tissez la dentelle avec les doigts
    sur un coussin, sur vos genoux
    ou tissez les arabesques du plaisir
    à la chandelle
    au bout d’un sein
    entre les cuisses de l’aimé
    tissez sans jamais renoncer à l’ouvrage
    dans l’alcôve, de nuit,
    au petit jour
    à la table d’écriture
    l’alène fichée dans le chignon
    le peigne précieux en écaille sous la mantille
    le regard cerné de khôl à l’abri d’un éventail
    au seuil de la ville derrière le moucharabieh
    ou devant le rideau de perles de bois
    sur le trottoir
    tissez sans perdre haleine
    et sans trous trous
    filez, filez toujours
    et filez doux
    par amour.

 

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    CECILE ODARTCHENKO

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russellflint-groupo2,

Oeuvre William Russell Flint

 

 

 

 

 


DANS LA NUIT SURVIVANTE

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J'apprends très lentement à vivre à ciel ouvert

j'enterre la face humaine sous des gangrènes d'or

et j'ai abandonné des tessons de soleil

dans la chair oubliée des hommes inutiles

 

dans la nuit survivante les hommes sont contagieux

il y a des fusils plus lourds que les épaules

j'ai vu tomber la neige grise des phalènes

et le corps maternel excisé sous les arbres

 

mais quand l'écorce enfin aura pitié de l'arbre

quand les oiseaux aveugles chanteront malgré tout

les vagues arriveront jusqu'aux maisons ardentes

 

alors nous irons seuls dans nos vêtements de pierre

nues sous leur peau les femmes allumeront l'aurore

et j'irai parmi vous comme un  crime qui revient

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TRISTAN CABRAL

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pierre2

 

 

 

PABLO NERUDA

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Lumière fut le feu, pain la rancœur lunaire,
le jasmin redoubla son secret étoilé,
par les douces mains pures de l'amour terrible
ce fut paix pour mes yeux et soleil pour mes sens.

Oh mon amour, comment, soudain, des déchirures
as-tu fait la maison de douce fermeté,
Tu vainquis la malice des ongles et la jalousie
et aujourd’hui face au monde nous sommes qu’une seule vie.

Ce fut, c'est, ce sera ainsi jusqu'au moment,
sauvage et doux amour, Mathilde bien aimée,
où le temps marquera du jour la fleur finale.

Sans toi, sans moi, sans lumière nous ne serons déjà plus;
alors bien au-delà de la terre et de l'ombre
la splendeur de notre amour brillera restera vif.

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PABLO NERUDA

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ismail shammout2

Oeuvre Ismail Shammout

 

AU DERNIER SOIR SUR CETTE TERRE...Extrait

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"Nos noms sont des arbres modelés dans la parole du dieu et oiseaux qui planent plus haut que les fusils. Ne coupez pas les arbres du nom, vous qui venez guerre de la mer. Et ne lancez pas vos chevaux flammes sur les plaines. Vous avez votre dieu, et nous, le nôtre. Vos croyances, et nous, les nôtres. N’ensevelissez pas Dieu dans des livres qui vous ont fait promesse d’une terre qui recouvre la nôtre. Ne faîtes pas de Lui un huissier à la porte du roi. Prenez les roses de nos rêves pour voir ce que nous voyons de joie ! Et sommeillez au-dessus de l’ombre de nos saules, pour vous envoler mouettes et mouettes, ainsi que s’élancèrent nos pères bienveillants avant de revenir paix et paix. Il vous manquera, ô Blancs, le souvenir de l’adieu à la Méditerranée et vous manquera la solitude de l’éternité dans une forêt qui ne débouche point sur un abîme, et la sagesse des brisures. Et il vous manque une défaite dans les guerres. Et un rocher récalcitrant au déferlement du fleuve du temps véloce. Et il vous manquera une heure pour une quelconque contemplation, pour que grandisse en vous un ciel nécessaire à la tourbe, une heure pour hésiter devant deux chemins. Euripide un jour vous manquera, et les poèmes de Canaan et des Babyloniens, et les chansons de Salomon à Shulamit. Et vous manquera le lys sauvage pour la nostalgie, et vous manquera, ô Blancs, un souvenir qui apprivoise les chevaux de la démence et un cœur qui racle les rochers afin qu’ils taillent dans l’appel des violons. Et il vous manque et manque l’hésitation des armes. Et s’il faut nous tuer, ne tuez point les êtres qui avec nous d’amitié se lièrent et ne tuez pas notre passé. Et il vous manquera une trêve avec nos fantômes dans les nuits stériles, un soleil moins enflammé, une lune moins pleine, pour que le crime apparaisse moins fêté sur vos écrans. Alors prenez tout votre temps pour la mise à mort de Dieu."

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MAHMOUD DARWICH

 

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Oeuvre Philippe Charpentier

NOUS SOMMES LA PREUVE VIVANTE D'UN CAUCHEMAR CONVERTI EN LUMIERE

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Mesdames, Messieurs,

 

Il est des mots que l’histoire a blessés et dont le sang ne coagule jamais.

Des mots de plaie vive qui suinte d’amertume et que ravive la conscience du toujours et du jamais.

Des mots d’eau salée qui ont pousséà l’ombre de l’arbre du non-retour. Des mots sombres comme les cales des bateaux négriers.

Des mots couleur de peau, au plus noir du désastre, quand s’effondrent les dieux et que la langue déparle.

Des mots qui sont des cris que dévorent les îles et des chants resurgis au blues des plantations.

Des mots qui hèlent des mémoires enchaînées, déchaînées comme des meutes humaines sans jarret pour courir et qui pourtant traversent l’immense tragédie du survivre.

Parmi ces mots où s’abaisse l’humain, il en est un qu’il convient de retenir comme une « blessure sacrée ». C’est le mot « esclavage ».

Parmi les esclavages qui furent l’ombre de l’Histoire, l’un nous somme d’exister car il nous fut baptême. Je veux parler de l’esclavage des noirs. Esclavage inédit où se forgea le masque d’une altérité radicale commuée en essence par un monde occidental et chrétien avide de légitimer et d’exonérer sa propre histoire. Hegel parle volontiers des ruses de la raison qu’il me soit permis d’ajouter la déraison des ruses.

Esclavage massif au cours duquel furent inventées les Amériques en capitale de la douleur des peuples déportés, en cathédrale baroque du souffrir des peuples exterminés, en banque du sang brûlé aux arbres du lynchage. Un sang couleur de sucre et de coton, d’épices et de produits « exotiques ». Toujours l’exotisme fut l’impensé de l’occident devant la raideur de sa flèche et la froidure de sa technicité. La brèche ouverte par où passe la chosification esthétique de l’autre.

Esclavage où toute la sauvagerie fut convoquée pour déshabiter l’humain au nom du seul profit et du rêve fou de créer un nouveau monde. Esclavage ! Le mot se suffit à lui-même et pourtant il fut notre berceau. Notre seul berceau ! Si la traite symbolise une coupure ancestrale, l’Habitation, elle, négocie une soudure avec cette indomptable énergie qu’on appelle la vie.

Vint le temps des raccommodages sans autre aiguille que la foi dans cette part d’humanité qu’il fallait préserver malgré tous les malgré. Vint le temps des bricolages avec des présences disparues et muettes, des surgissements obscurs et des clignotements de densités nouvelles. Vint le temps des syncrétismes, des emmêlements, des poétiques forcées, des langages du divers, de ce tremblement d’une conscience qui cherche dans les décombres les matériaux d’une reconstruction de soi. Il suffit de regarder du côté du vaudou, de la santeria, du candomblé, du quimbois, des contes créoles, de la cuisine créole, des danses de mayolè, de la capoïera, du gwoka, et l’on voit l’énoncé d’une anthropologie de la déconstruction-reconstruction.

L’imaginaire des peuples ne dort jamais !

Nous sommes la preuve vivante d’un cauchemar converti en lumière avec les éclats multiples d’un inventer toujours recommencé.

C’est dans la nuit des plantations – alors même que les esprits d’avant, humiliés par l’arrogance du fouet, souillés par « l’omni-niant crachat », rejetés par d’autres baptêmes – qu’est née notre parole intime, protectrice, revendicatrice, réhabilitatrice pour dire au monde l’imaginaire des damnés de la terre et la postulation d’une fraternitéà visage d’homme.

En langue créole, parlant d’un être méchant, on dit : sé figi a moun i ni ! Autrement dit, il a l’apparence d’un être humain mais il n’est pas un être humain !

J’aime cette parole venue de nos aïeux. Elle signifie que l’humanité n’est pas dans l’apparence mais dans une posture qu’aucun miroir ne saurait restituer. L’humanité est peut-être ce qui ne se voit pas mais ce au nom de quoi nous agissons. Autant dire que l’humanité réside essentiellement dans une éthique, une esthétique…

L’erreur de l’occident fut de se vouloir l’unique miroir, l’unique forme, l’unique modélisation de l’humain et de cultiver au nom de cet imperium l’exclusion comme seule mode de relation à l’autre. On ne confisque pas l’humanité ! Elle revient toujours sur les lieux du crime pour tenter de conjurer la racine du Mal.

Lorsqu’on privilégie l’idéologie (toujours leurrante) en lieu et place de la philosophie, la barbarie sort de son trou et dévore victimes et bourreaux. Il est vrai que l’occident a tenté de vaincre ses démons (nombre de textes célèbres, d’actions importantes en témoignent) mais le combat sera toujours perdu d’avance tant que ne sera pas instauré un autre imaginaire que celui de la domination.

Et c’est cela un des aspects du crime, d’avoir orchestré un imaginaire de la domination, de la discrimination et du racisme au point qu’il semble naturel et normal à un grand nombre de traiter l’homme noir en espèce inférieure. La race comme représentation de soi et de l’autre demeure cette prison que seule peut briser une psychanalyse collective. Des siècles durant, le sang fut dispersé.

Des siècles durant, des territoires furent pillés.

Des siècles durant, des cultures furent bafouées, folklorisées, anéanties. Des siècles durant, des femmes et des hommes furent dépouillés de leurs droits les plus élémentaires.

L’occident a tiré profit de ces siècles-là intellectuellement, matériellement, culturellement, politiquement, socialement, financièrement. Le moindre clochard de l’Europe colonisatrice est, sans le savoir, un bénéficiaire de ces siècles. Je ne dis pas un coupable mais un bénéficiaire.

La vérité c’est que l’esclavage des noirs loin d’être un à côté de l’histoire de l’Europe, une dérive honteuse, un accident, est constitutive de l’Europe et de ses avancées. Ce qui amène à penser que les noirs mis en esclavage sont également les bâtisseurs de l’Europe.

A côté, l’Afrique marginalisée, piétinée, exploitée, s’enlise dans les bas-fonds de la mondialisation.

A côté, Haïti sombre dans le chaos.

A côté les afro-américains sont traités en citoyens de seconde zone. Katrina est éloquent à ce sujet.

Autrement dit, les effets sont visibles, actifs, malfaisants et ce dans tous les domaines du réel.

C’est ce que doivent comprendre ceux qui, au nom du passé, ne se veulent pas comptables du présent et de l’avenir. « Le crayon du Bon Dieu n’a pas de gomme » affirme la sagesse populaire haïtienne mais s’il est un crayon qui n’a pas de gomme c’est celui des peuples humiliés. Je ne parle pas du crayon de la vengeance. Je parle de celui du traumatisme.

Je parle d’une organisation post-coloniale qui fait qu’un enfant noir des USA a plus de chance qu’un autre de finir en prison, qu’un enfant noir de l’Afrique a plus de chance qu’un autre d’attraper le sida, qu’un enfant noir d’Haïti a plus de chance qu’un autre de mourir de faim, qu’un enfant noir des banlieues a plus de chance qu’un autre de sombrer dans la délinquance. En l’occurrence la chance est une malchance ! Une malédiction raciale, sociale, économique et même politique hypothèque dès le départ son devenir.

C’est dans ce contexte là que se pose la question de la réparation de l’esclavage des noirs. Un contexte d’inégalité existentielle. Analyses, Enjeux, Controverses avez-vous prévu. Cela signifie que le terme de « réparation » ne va pas de soi et qu’il requiert toute notre vigilance.

« On ne répare pas l’irréparable » s’est écrié Aimé Césaire. Encore une fois il a raison. On peut néanmoins penser qu’il est possible de réparer le réparable, de corriger les effets négatifs, de lever les hypothèques, de lester le monde d’un plus d’égalité.

Dès lors, une seule question s’impose : comment réparer ? Il ne s’agit pas d’une dette à rembourser. Il s’agit d’une nouvelle morale à inventer. Je le répète en combattant tous les effets dans les champs de l’éthique, de l’historique, du politique et de l’économique.

Je pense en particulier à des lieux de mémoire à restaurer, àédifier. Je pense à la recherche et à l’enseignement.

Je pense à une politique de restructuration de l’Afrique.

Je pense à l’effacement de la dette.

Je pense à des mesures d’accompagnement.

Tout cela en vue de partager la mémoire et de créer un espace de lucidité et de générosité politique au service de tous les hommes. Le monde porte sur ses épaules non pas seulement ce crime contre l’humanité mais encore de nombreux crimes irréparés. Il me semble nécessaire au lieu d’accepter la concurrence des victimes, la hiérarchisation des crimes d’envisager, au contraire, la solidarité.

La solidarité vraie.

La solidarité active et ingénieuse.

La solidarité pan-humaine.

Nous pourrons reprendre en chœur la célèbre phrase de Martin Luther King : « I have a dream » ! One day, un dia, un jour, on jou ! Nous serons peut-être tous lavés parce que responsable d’un autre avenir. Nous habiterons une insomnie d’étoiles marronnes, une voyance fraternelle. Nous effeuillerons le mot «égalité» dans la prière des arbres de la raison et nous ferons du monde une forêt bleue où les mémoires pourront enfin reposer en paix.

La plus belle des réparations ? La réhumanisation tout simplement !

 

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ERNEST PEPIN

 

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Oeuvre Nadia Wicker

 

BURT NORTON I , QUATRE QUATUORS, LA TERRE VAINE ET AUTRES POEMES...Extrait

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Le temps présent et le temps passé
sont tous deux présents peut-être dans le temps futur
et le temps futur contenu dans le temps passé.
Si tout temps est éternellement présent
tout temps est irrémissible.
Ce qui aurait pu être est une abstraction
qui ne demeure un perpétuel possible
que dans un monde de spéculation.
Ce qui aurait pu être et ce qui a été
tendent vers une seule fin, qui est toujours présente.
Des pas résonnent en écho dans la mémoire
le long du corridor que nous n’avons pas pris
vers la porte que nous n’avons jamais ouverte
sur le jardin de roses. Mes paroles font écho
ainsi, dans votre esprit.
Mais à quelle fin
troublent-elles la poussière d’une coupe de roses,
qu’en sais-je ?
D’autres échos habitent le jardin.
Les suivrons-nous ?
Vite, dit l’oiseau, vite, trouve-les, trouve-les
au détour de l’allée. Par le premier portail,
dans notre premier monde, allons-nous suivre
le leurre de la grive ? Dans notre premier monde,
ils étaient là, dignes et invisibles,
se mouvant sans peser parmi les feuilles mortes,
dans la chaleur d’automne, à travers l’air vibrant,
et l’oiseau d’appeler, en réponse
à la musique inentendue dissimulée dans le bosquet,
et le regard inaperçu franchit l’espace, car les roses
avaient l’air de fleurs regardées.
Ils étaient là : nos hôtes acceptés, acceptants.
Et nous procédâmes avec eux en cérémonieuse ordonnance,
le long de l’allée vide et dans le rond du buis,
pour plonger nos regards dans le bassin tari.
Sec le bassin, de ciment sec, au rebord brun,
et le bassin fut rempli d’eau par la lumière du soleil,
et les lotus montèrent doucement, doucement,
la surface scintilla au cœur de la lumière,
et ils étaient derrière nous, se reflétant dans le bassin.
Puis un nuage passa et le bassin fut vide.
Va, dit l’oiseau — les feuilles étaient pleines d’enfants
excités, réprimant leurs rires dans leurs cachettes.
Va, va, va, dit l’oiseau : le genre humain
ne peut pas supporter trop de réalité.
Le temps passé, le temps futur,
ce qui aurait pu être et ce qui a été
tendent vers une seule fin, qui est toujours présente.

 

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THOMAS STEARN ELIOT


Traduction Pierre Leyris

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EDWARD MUNCH2

Oeuvre Edward Munch

 

MAHMUT LE RÊVEUR....Extrait

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....

Tel est exactement mon boulot,
Chaque matin je peins le ciel,
Pendant que tous vous dormez.
Au réveil, vous le trouvez bleu.
Parfois la mer se déchire,
Vous ignorez qui la recoud ;
C’est moi.

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ORHAN VELI

 

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NUES 2,

PALESTINIEN, JE SUIS PALESTINIEN


L'INHABITABLE

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L'inhabitable : la mer dépotoir, les côté hérissées de fil de fer barbelé, la terre pelée, la terre charnier, les monceaux de carcasses, les fleuves bourbiers, les villes nauséabondes

L'inhabitable : l'architecture du mépris et de la frime, la gloriole médiocre des tours et des buildings, les milliers de cagibis entassés les uns au-dessus des autres, l'esbroufe chiche des sièges sociaux

L'inhabitable : l'étriqué, l'irrespirable, le petit, le mesquin, le rétréci, le calculé au plus juste

L'inhabitable : le parqué, l'interdit, l'encagé, le verrouillé, les murs hérissés de tessons e bouteilles, les judas, les blindages

L'inhabitable : les bidonvilles, les villes bidon

L'hostile, le gris, l'anonyme, le laid, les couloirs du métro, les bains-douches, les hangars, les parkings, les centres de tri, les guichets, les chambres d'hôtel

Les fabriques, les casernes, les prisons, les asiles, les hospices, les lycées, les cours d'assise, les cours d'école

L'espace parcimonieux de la propriété privée, les greniers aménagés, les superbes garçonnières, les coquets studios dans leur nid de verdure, les élégants pied-à-terre, les triples réceptions, les vastes séjours en plein ciel, vue imprenable, double exposition, arbres, poutres, caractère, luxueusement aménagé par le décorateur, balcon, téléphone, soleil, dégagements, vraie cheminée, loggia, évier à deux bacs (inox), calme, jardinet privatif, affaire exceptionnelle ...



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GEORGES PEREC


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VILLE POURRIE,

 

 

L'AMOUR MÊME...Extrait

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Nous aurons partagé
La mémoire et l'espoir,
La lumière des mots,
Le temps visible et ses viviers
De voix, de lampes, d'épis noirs,
Nous aurons parcouru
D'immobiles saisons, creusé
Sans relâche la même route
Vers le même secret perdu,
Et nous n'aurons d'autre recours
Que de croire encore à la vie,
Pas après pas, jour après jour,
A la vie qui brûle sans flamme
Mais se survit vaille que vaille
Pour attiser dans notre nuit
La braise d'un miracle.


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PIERRE GABRIEL

 

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TREILLE5

SALAMMBÔ...Extrait

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 "C’était à Mégara
faubourg de Carthage
dans les jardins d’Hamilcar" *

et Tanit sous la lune
voguait dans ses voiles

j’ai oublié de quoi était fait le jour
mais Tanit était là

elle dansait pieds nus
au rythme des cymbales

je me souviens
des vastes étendues
blêmes sous un ciel de craie
à perte d’horizon

Matmata
d’Ibn Khaldoun
chantait à mon oreille

je me souviens

des chambres troglodytes
de la blancheur vibrante des murs
des tapis colorés
des ksars de Tataouine
des greniers de pisé

le ksar Ouled Soultane
chantait à mon oreille
volutes du désert

et demain qu’en sera-t-il ?

qu’en sera-t-il demain
des rires colorés
au cœur de l’oasis
du chant du paysan
trottinant sur son âne
des enfants enjoués
livrés aux terrains vagues

demain ?
défunt le sourire des femmes !

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GUSTAVE FLAUBERT

 

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salammbô auguste rodin,

Salammbô d'Auguste Rodin

 

 

 

 

 

 

FRANKETIENNE...Extrait

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Île femme immodifiable
en son corps absolu
à volupté fluviale
au seuil de l’embouchure.
L’incendie des eaux bleues
sous la décharge des vagues
en vanité d’écumes
dans un moulin de sable
et de sel vaporeux.
Combien facile s’en va la vie
hors de nos mains fragiles.

 

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FRANKETIENNE

 

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ECUME---1994-Gerald-B,,

Oeuvre Gerald Bloncourt

http://bloncourtblog.net/2014/06/digigraphies-galerie-1.html

 

SCHIZOTONIQUE

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" En créant dans mon coeur les images du rêve, 

 je m'exerce sagement à l'état de mort et de dieu, 

 où les parfums subsistent, à peine reconnaissables. "

 

Louis CATTIAUX  - Poèmes - 

M.C.O.R   _ La Table d'Emeraude

 

 J'eus un frère, magnifique, dont le regard vert résonnait de voix et de visions ! A l'âge de 20 ans, il sombrait, si près des rives de mon enfance, dans une terrible maladie : La Schizophrénie. Elle le tint et le tiendra quarante deux années durant, sans répit. Vers lui, ce texte, en passant, en chemin qui me mène, me précipitant et courant sur les brisées de l'angoisse !

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Schizo _ Tonique
La transe__locution
La Trans__location
Agréent au vent
A l'extrême et à l'absolu d'un sombre  pathos
Seyant à l'air d'un temps
Honni__ Soit à contre-courant du flot
Qui mal y pense
Confinant à la désespérance

Elle te va comme un gant
Mon vieux et te colle
A la peau
D'une gestuelle hybride 
Marin __ Toi
Le dos argenté
Qui t'abreuve d'éther
Et de l'absinthe
Intarissable des vagues
Communes et juste très acides

Sans fumée ni blanche
Tu t'enivres d'embruns
Te commuant en
Écrivailleur   pas très original    Poètereau
Presque maudit
Dont on ne lâcherait
Aucun mot d'amitié
Sur un espace virtuel
Tu __  Répercutant alors
Un mutisme assourdissant

Le livre demeure  résolument caché
Un fatras peut-être ex  __centrique
Perclus de folies
Au plus dense du délire
Épistolaire
Témoin vertigineux 
d'un esprit tombé
En déshérence
Sanitaire avérée

Ainsi
Mentalement et lourdement affecté
Par les aléas
D'une traverseé en eau trouble
Noyé au coeur du devoir
Une eau fétide
Hélas vint à bout
Du rebelle que tu fus 

Mais qu'importe
Le vocable insane
L'association numineuse
Et claire à la fois
Que je nous destine
Sans ambage vaut bien le détour
Tonique et Schizo
Schizotonique
Frère __ Comme toi
Mon aîné disparu
Qui passa   qui erra
Quarante deux
Longues années
Dont les plus belles
Dans les geôles
De cette terrible maladie
Que l'on dit mentale
Tellement blessante

Et je vais
Courant les bordées
De la solitude
De l'absence silencieuse
Où le cri seul vainc l'écho abyssal
De l'amer  et de la panique

A l'appel des centres
Concentrationnaires
J'arpente ce que longuement
Tu gravis
Jour après jour        

Chaque nuit
Schizo-Frère-de-Sang
Dont je panse l'aurorale  douleur
Aux tréfonds de la Chimio
Pharmacologie _ Frère
Aux vertus hallucinatoires
Très légales et cadrées 

Mais sais-tu _ Compagnon
D'aventure    Mon ami
__  Mon frère
Combien ta vision des choses
Et le sable pulvéral
Sur lequel tu te mouvais en chemin
Engendrait de vérités
Liait de mains franches
Aux racines du Ciel  
Quand tu souriais au monde
Je veux dire
Ces mondes qui t'eurent jeté
Comme un paria _ un SDF
Au seuil de l'hiver
Sur le pavé de l'angoisse
Ainsi que tant d'autres
Depuis Artaud 
Sur son navire pirate
Solennellement mystique

Âmes irrémédiablement perdues
En transit__ Transies
Le temps d'une sordide
Et létale escale
Je pense à Nous
Mon Frère__mes frères
Lorsque cette schizotonie
Qui me frappe aujourd'hui
Reflète comme un maléfice __ autant de psychés
Les désordres et les forfaits
De l'obscur mené des appareils cyniques


Une nature immature
Par trop humaine
Et systé__matique
Guide dans l'ombre
Encore et toujours
Le mythe de la caverne
Cavernes où la Vérité
Se décline et se conjugue
Par clans  et  cloaques
Tuant la fidélité
A l'aune de l'éphémère
Depuis le crépuscule des soupirails
Sans aube  Des néons
Et des strapontins pour jalons
Des tours aux généreuses vitrines
Des corridors où se croisent
Et s'ignorent les robots
Des voitures et des plans
Ostensiblement tonitruants 

Océan-Mer
Que serais-je sans l'immensité 
Qui étouffe  qui apaise
Le mal au Monde
Des Enfants
Au coeur des vagues phoniques
__ Schizo-frène-étique
Comme Toi __Je creuse l'abîme
Sans fond de la nuit obscure
Et te rejoins
Mon Frère
Humblement __sans détour
Pour n'avoir jamais su
Ici bas Arriver

 

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CRISTIAN-GEORGES CAMPAGNAC

 

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artaud2

Antonin Artaud

 

 

 

 

 

 

 

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