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Channel: EMMILA GITANA
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JOURNAL D'UN POETE...Extrait

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...

 

Bêtes, venez à moi ! venez bêtes farouches

épancher toute haine dans la coupe de mes mains !

Il est grand temps que la lune là-haut

cesse enfin de laper les nuages.

 

Sœurs chiennes, frères chiens,

traqué comme vous parmi les hommes

qu’ai-je à faire de caravelles haridelles

ou des voilures de corbeaux.

 

Si la faim suintant de murs en ruine

vient à s’agripper à ma chevelure,

je mangerai la moitié de ma jambe

et vous offrirai l’autre en pâture.

 

Je n’irai nulle part avec les gens,

mieux vaut crever ensemble, avec vous

que de ma terre aimée ramasser une pierre

pour la lancer sur mon fou de prochain.

 

 

.

 

 

SERGUEÏ ESSENINE

Traduction Christiane Pighetti

 

 

.

 

 

Rebecca Campbell2

Oeuvre Rebecca Campbell


STEFANO VILARDO...Extrait

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Le vent tisse les chants des grillons

et porte le bruit du ressac.
L'air déjà plus tendre
brille dans les zones d'ombre

au jeu alterné des lucioles
la mémoire harcèle et se dilate
dans le lacis profond du souvenir.

.

 

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STEFANO VILARDO

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christian arjonilla2

Oeuvre Christian Arjonilla

 

VAHE GODEL...Extrait

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Nul ne perçoit l'appel du nomade perdu
sans viatique en un désert sans bornes
hors cet oiseau sans nom dont la couleur est celle
du vent – seul lui répondent sans cesse de partout
de nulle part ces invisibles oiseaux
dont le chant n'est autre que celui de l'espace
aiguisé par le vent

.

 

VAHE GODEL

 

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Henrik Simonsen's2

Oeuvre Henrik Simonsen's

 

LE PETIT PRE...Extrait

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Tout est consenti
Je m'abandonne à l'oubli
Au silence à la nudité minérale du chant
Forêts et champs
Rivière laissez-moi passer...
Je cherche la beauté
Vêtue de nuit
Qui vous a renversés
D'un cri.


...


Tu ne connais pas
La douceur de ton nom
Tu ne sais pas comme il est bon
De le dire d'en bas
Quand on se tient
Dans l'ombre de ton cœur
Quand on n'a rien
Que son âme en pleurs

 

...



Il suffirait d'un papillon
Pour que la prairie se mette à voler
Que l'oiseau moribond
Cueille son cœur étoile
Quand le trèfle sent bon
Comme un framboisier
Pourquoi dirait-on
Que l'oiseau s'est trompé
De saison


...

 

Ils se cachent, dit-on, pour mourir.
Moi je dis
Qu'aucun oiseau jamais ne meurt
Mais que très haut, parmi l'écume
Et les tourbillons d'astres, leurs chants
De planète en planète bondissent
Vers leur source.

 

.

 

ANNE PERRIER

 

.

 

bernard liegeois

Photographie Bernard Liégeois

LA VOIE NOMADE

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O rompre les amarres

Partir partir

Je ne suis pas de ceux qui restent

La maison le jardin tant aimés

Ne sont jamais derrière mais devant

Dans la splendide brume

Inconnue

Est-ce la terre qui s'éloigne Ou l'horizon qui se rapproche

On ne saurait jamais dans ces grandes distances

Tenir la mesure

De ce qu'on perd ou ce qu'on gagne

Pour aller jusqu'au bout du temps

Quelles chaussures quelles sandales d'air

Non rien

O tendre jour qu'un mince fil d'été

Autour de la cheville

Mais le cercle d'argent

Au poignet l'enfant d'arc-en-ciel

Me conduit au désert

Une femme nomade y a gravé

Toutes ces traces d'oiseaux blessés

Et les suivant peu à peu s'est perdue

Dans les sables

Le prochain puits

Me rendra-t-il en tremblant mon visage

Immortel

Ou seulement l'appel sauvage

Et fou qui plonge dans sa nuit

Comme un glaive

Si je m'égare

O que ce soit à l'heure de midi

Et au milieu d'étincelantes

Dunes leurs dômes de cannelle

Et leur fuite dorée

De gazelles

Endormez-vous mes terres

Mes atlantides endormez-vous

Je garde en moi l'appel

Ebloui des rivières

J'emporte la flûte

Ardente de tous les chants

Je sais que la nuit sera longue

Et que le froid me brûlera

Les yeux que le scorpion me guette

En silence et que des chiens avides

Gardent la porte du jour

Peut-être qu'à la fin du jour

Se lèvera d'entre les harpes

La brise du désert

Plus ineffable que le rossignol

Et que seul peut entendre

Le cœur intemporel

Si le temps me touche

Si la mort m'arrête

Alors que ce soit

D'un doigt éblouissant

Ce n'est pas l'ombre que je cherche

Ni l'humble signe

De la halte sous les palmiers

Tranquilles ni l'eau ni l'ange

Gardien d'oasis

Je cherche le chemin qui dure

Toujours toujours toujours

Et pour guider la marche

Une cage une tombe

D'oiseaux désenchantés

Leur voix mise à prix

Dans la forêt en cendres s'est tue

O compagnons d'errance

Et de ciel

L'âme bleuie de froid

Quelle surprise pour la mort

Qui l'ouvrira

D'y trouver la fraîcheur sucrée

De la figue mûre

Si je pouvais glisser mon ombre

Dans la lumière immobile

Et passer en des mots

Qui ne soient plus qu'allégement

Et envol d'amandiers

O rendez-moi la fougue et l'espace et l'audace

Et la royale autorité

Du danseur de corde

Aurai-je cette fois aurai-je à délaisser

La mer la grande maternelle

Mer et ses bras d'ardoise

Tant d'adieux tant d'adieux

O messagers

Entre vos ailes

A mon poignet trois pierres

Chaque matin se baignent dans le ciel

Trois pierres de lune et le ciel est pris

Pour la prière

Et pour la rêverie

Si les ombres sur le chemin

Si les tristesses n'étaient rien

Que mirages mirages sur le sel

De nos larmes

Ce n'est pas

Au moment de mourir tous les cris

Déchirants de la terre que j'emporterai

Toutes les larmes non

Mais ce rire d'enfant comme un chevreuil

Qui traverse la foudre

Le bleu des lointains me transperce

Et tout le bleu du vent

Et jusqu'à l'âme

Le bleu cavalier de la mort

Je m'arrête parfois sous un mot

Précaire abri à ma voix qui tremble

Et qui lutte contre le sable

Mais où est ma demeure

O villages de vent

Ainsi de mot en mot je passe

A l'éternel silence

Oh je l'entends

Mais quel ange me le dérobe

Ce dernier chant de flûte

Au bord de l'ineffable

A la fin de la traversée

M'attend la souveraine saison

Sous ma tête

Le sable chaud du long sommeil

Une pelisse d'étoiles

Sur mon ombre humaine

Plus avant plus avant

Vers les terres extrêmes

Où il n'y a ni routes ni refuges

Rien que les plis laissés par le dernier repos

Du vent

Me fascinent

Les routes nulles du désert

Et la longue patience des chameaux

Ce là-bas

Ce chant cette aube

Cet envol de ramiers

Cet horizon comme un jardin

Qui repose dans la lumière

Et les aromates

 

J'ai retrouvé par hasard

Sous les feuilles ma petite flûte d'enfant

Et je sais que tout près d'ici

Je vais revoir la place d'herbe humide

D'où s'envolait sans fin

Le héron cendré

Toi

O si peu de bois tendre

Qu'un souffle trop ardent

Te briserait entre mes doigts

J'essaie encore

De ma bouche engourdie

Ce mince chant où venaient se poser

Jadis les paons de jour

Si nous devons tomber

Que ce soit d'une même chute

Etincelants

Et brefs comme l'oiseau

L'arbre

La foudre

Pour tout bagage

Pour tout péage

Cet air de flûte qui chancelle d'un silence

A l'Autre

La solitude

Cette broussaille désolée

Du cœur

D'où monte à la fin du jour

Une salve de colibris

En vain chercherons-nous sur le rivage

Une demeure

Nous ne sommes que de passage

Et glissons sur un fleuve à la gorge ouverte

Entre les astres

Que faire

Contre le vent qui nous glace

Qui livre aux gouffres de la nuit

Et à jamais les douces cendres

Du dernier phénix

Le poète chassé du monde

Pour ses yeux trop bleus

Pour ses chevaux d'ivoire

Qui arpentent le crépuscule

Pour son orgue de barbarie

Encastré dans la mort

Les oiseaux qui ceignent mon front

Noirs enchanteurs

Au tombeau de la poésie

O faites

Que le feu de la mort les change

En étincelles

Le silence ô je l'appelle

Tout ce vacarme de mouettes

Dans nos murs et pour quelle

Conquête

Cependant qu'au-delà des mers

Sans bruit

Un giroflier mûr

Embaume l'île entière

Ce chant trop lourd

Je laisse à la nuit son poids d'ombre

Et le reste

Je le donne à l'espace

Qui le donne à l'oiseau qui le donne

A l'ange éblouissant

Pendant que je dormais

La lumière est entrée dans mon cœur

Comme une fine aiguille de feu

Qui sans relâche me consume et me déchire

Mais d'une façon telle

Que l'arracher serait rendre le cœur

A sa nécropole

Nous avions cru chanter

Sur la plus haute branche

Et nous n'étions qu'à peine

Au-dessus des grenouilles

Ce jour d'avril

Parce que ma force s'est perdue

Et que mes pas s'embourbent

Je salue chaque brin d'herbe

D'un regard qui tremble

Réduite à rien

A pousser devant moi le frileux troupeau

Des paroles brebis de laine

Et de vent

Le temps que tombe un citron mûr

Sur la paume du jour

Mes yeux retrouvent la fraîcheur

De l'enfance

La foule ici comme l'orage

Eclate sur ma tête

Oh je m'éloigne

Avec les chèvres millénaires

Je disparais je monte

Entre les roches parfumées

Jusqu'à la citadelle

Blanche des paradisiers

Plus le temps se fait sombre

Et la route aride

Plus je remplis

Mon fichu d'étoiles

C'est peut-être le sort des vieilles terres

De voir leurs sources peu à peu tarir

Ou encore celui du vieux poète

Lentement dépouillé de ces larmes

Qui en tombant essuyaient la poussière

De ses sandales

Levée avant les heures

Je jette au vent ces mots

Poignée de graines dédiées

Au monde ailé du jour

Si je devais m'arrêter

Mycènes c'est ici

Sur tes flancs ravagés par l'Histoire

Que je déposerais mon errance

Ma flûte tendre

Et sa rumeur d'oiseaux blessés

Ne me retenez pas si

Au détour du chemin

Tout à coup

Emportée vers les sources du jour

J'escalade le chant du merle

La seule tristesse

C'est de savoir que les jours s'ouvriront

Comme des lys au fond du temps

Que l'amour dans le cœur de l'homme

Continuera de déployer

Ses roseraies

Que la beauté comme naguère

Embaumera les pas du voyageur

Et que sous tant de fleurs

J'aurai les yeux remplis de terre

 

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ANNE PERRIER

 

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edgar degas2

Oeuvre Edgar Degas

COEUR A COEUR...Extrait

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Ces riens toujours à l’orée de nos cœurs

pour que grandisse en nous

un ciel nécessaire

à notre vie profonde

 

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BERNARD PERROY

 

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coeur

LA PIERRE ETERNELLE DES RUINES / LA PIEDRA ETERNA DE LAS RUINAS

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Retourner sur mes pas
Aimer sous les frondaisons vert d’eau
Sentir la douce brise de la forêt
les feuilles qui se frôlent 
odeur de boue fraîche
de jeune plante
de mousse ancienne
l’arôme des iris qui pendent 
des grands gaïacs
la broussaille qui enterre
les trésors des mayas
le vent qui garde
la mémoire d’autres années
qui semblent revenir du passé
tandis que le fleuve descend
posément
comme l’image du Dieu maya
sur la pierre éternelle des ruines.

 

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MARISA TREJO SIRVENT

Poésie du Chiapas

https://www.terreaciel.net/Huit-poetes-du-Chiapas-par-Nicole-Laurent-Catrice#.WsDzGy5ubIU

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Volver sobre mis pasos
Amar bajo la fronda verde agua
Sentir la brisa suave de la selva
Las hojas que se rozan
Olor a barro fresco
A planta joven
A musgo antiguo
El aroma de lirios que cuelgan
De grandes guayacanes
La maleza que entierra
Tesoros de los mayas
El viento que guarda
La memoria de otros años
Que parece que vuelven del pasado
Mientras el río desciende
Pausadamente
Como la imagen del Dios maya
sobre la piedra eterna de las ruinas.

 

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maya2

 

 

 

LA GRÂCE DES ÂNES

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 J’ai bien connu, en Sardaigne, ces adorables animaux. Ils ont le poil long comme les chèvres. Ils vivent en liberté dans la campagne, reviennent d’eux-mêmes à la maison comme les chiens. Les yeux bons, les lèvres rêveuses, ils restent immobiles des heures entières, distraits, paresseux, je ne sais. Il me semblait qu’ils fussent les créatures les plus vieilles de la terre, et que dans leur lenteur, leur indolence, sur leur croupe si pitoyable, pesât une grande fatigue de vivre. Ce vers de Saint-John Perse : l’éternité qui baille sur le sable , je l’avais arrangéà ma façon.

 

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LEONARDO SINISGALLI

traductio de l’italien  Jean-Yves Masson

 

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muscade2

 


HENRI GOUGAUD...Extrait

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Car il n’est pas besoin de longtemps fréquenter la mémoire des sens pour trouver à l’étroit sur cette ligne, notre histoire, tracée entre deux gouffres. Que notre vie soit beaucoup plus vaste, plus belle, plus riche que ce bric-à-brac d'événements accumulés entre la naissance et la mort n’est pas seulement un pressentiment de conteur libertaire, c’est une vérité d’expérience. Je suis, nous sommes infiniment plus foisonnants que ne saurait le dire la plus minutieuse des biographies. Nous sommes plus vivants que nous ne saurions nous-mêmes le dire. En vérité, dans cette dimension du temps que perçoit notre intelligence sensitive, nous ne rencontrons pas notre histoire, cette succession de faits et gestes voués, de toute façon à l’oubli. Il n’y a là de place que pour le jeu de la vie.

 

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HENRI GOUGAUD

 

 

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CHRISTINE FERRE2

Oeuvre Christine Ferré

MALI SADIO - TOUMANI DIABATE/MANGALA CAMARA

MARC EEMANS...Extrait

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“Il importe avant tout de dépasser l’homme, de l’élever à l’état de mystère. N’est-il d’ailleurs pas au plus profond de lui-même ce mystère sacré d’où peuvent à chaque instant, dès qu’il les appelle, surgir les dieux?

 

Pour se dépasser, il suffit à l’homme de savoir écouter les voix intérieures qui l’habitent et d’intérioriser le choeur sans cesse mouvant des voix du monde qui viennent à leur rencontre. Toutes choses se répondent, se font signe, et du fond des âges elles s’avancent sous la diaprure immuable des mythes: mythes des origines et mythes des infinies métamorphoses de l’Etre et de son néant, de sa déréliction, de sa terreur congénitale, mais aussi de ses cruautés, de ses joies, de ses pouvoirs et de toutes les ferveurs d’un monde en gésine de magie.”
.

 

 

MARC EEMANS

 

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Oeuvre ?

LA MER N'EST JAMAIS SI LOIN

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La ronce liane a noué les pas 
de ta subsistance 
Elle te fait chuter dans les rudesses
d'un profond maquis
et de l'abandon
pour quelques misérables deniers 

Il en est ainsi
parce que tu m'as suivi
entravé
depuis si longtemps     déjà 
Loin de durer       tu endures 
le calvaire des réclusions mutiques    

Mais lève les yeux        regarde
depuis le lit reposé des cyclamen
et la cime des arbres
qui t'accueillent 
il est     plus que jamais 
d'autres fenêtres de ciels animées 
où s'invite la conférence annuelle des oiseaux
une  île bouquetière
le chant des ruisseaux

La brise de jour entonne la valse 
des vagues lointaines
Une tiédeur tropicale
a réveillé ma souvenance
Que ne suis-je pas encore là-bas
dérivant    délirant 
entre les billes de bois
et la complainte des piroguiers


Va et ne pleure plus 
Demain sera aux songes vrais 
aux charmilles de nos vingt printemps
le temps d'un baiser volé 
à la liberté
à l'instant précieux de notre vie

 

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CRISTIAN GEORGES CAMPAGNAC

 

 

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maquis2,

 

 

JEAN LAVOUE...Extrait

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Le livre que j’ouvre à présent 
Est celui de l’arbre et du vent,
Des saisons et du ciel infini,
Des moissons du silence
Dont toutes mes racines ont soif.

Si je marche en claudiquant 
Sans me hâter vers la ligne des grèves
Ce n’est pas pour comprendre
Mais pour laisser aller : 
Creuser mon ignorance
Ne m’est plus nécessaire.

Portées par l’aile de l’instant 
Des pages détachées volent dans ma mémoire ;
Je me fie à leur errance.
Aucun traité ne me donnera plus le goût
De ces paraboles incendiées.

Des visages me traversent,
Ceux des amis ayant franchi la ligne
Et dont je suis à jamais marqué du signe :
Ensemble, nous avons proféré un pacte,
Nous promettant un sillage de feu dans la nuit
Dès que l’un de nous gagnerait le port.

Notre besace est vide, dépossédée d’étoiles,
Passants pourtant d’une race éphémère,
Parente de l’obscur et des constellations.
Rien ne nous est plus joyeux
Que cette part en nous,
Nocturne et sans pourquoi,
Que le temps n’atteint pas.

Ô brasier des déserts
Qui nous fut une source,
Un vide ardent pour nous défaire,
Nous avons oublié le nom que tu cachas
Mais non pas le Souffle
Où l’âme fut éprise.

Et c’est pourquoi nous avançons sans voir,
Nous laissant découvrir à tâtons, 
Sans redouter la main
Qui, avec une infinie patience,
Disperse silencieusement nos jours.

 

 

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JEAN LAVOUE

3 avril 2018

www.enfancedesarbres.com

 

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Agron Vpapajani Bejte2

Oeuvre Agron Vpapajani Bejte

L'AMER NOUS GUIDE...

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Je suis né d’une erreur du vent et de la mer

 c’est pourquoi j’ai vécu au rythme des marées
 entre les hommes et dieu je n’ai pas pu choisir
 poisson-lune égaré sur un trottoir vitreux
 je n’ai fait que passer sans pouvoir respirer

un enfant replié s’est pris dans ma mémoire

 qui m’empêche d’atteindre au pays d’où je viens
 quand trouverai-je enfin de quoi crever mes yeux
 sur le plancher glissant d’une barque fantôme

si je viens à mourir qu’on me jette à la mer

 dans l’aube bleue des sables je trouverai ma route
 j’arriverai enfin à cette grande fête
 où mon corps fait surface à l’intérieur du sel

 

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TRISTAN CABRAL

 

 

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cris2

 

NICOLE BARRIERE...Extrait

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il y a les mots

les ombres des mots
les lumières
les lueurs des mots
les cris
les chuchotements
les mots tendrement ouverts
les mots envolés des lèvres
comme des ailes pliées
comme des fenêtres ouvertes
comme des rivières où naissent les âmes
les mots tombent comme des fruits mûrs
comme des feuilles
comme l’herbe rouge et bleue
plus tard
quand les feuilles noircissent
la peau des rêves
le soir descend des étoiles
une autre langue parle
les mots du chemin et de la forêt
dans toutes les langues
marchent sur l’invisible
c’est ta main dans la mienne pleine de paroles
de terres nouvelles d’eaux souterraines
et la terre te fait signe depuis la lune
fragment de ciel
et d’invisible
le poème absolu
s’ouvre du désir premier des lèvres
trouée de rêve où seules chantent les mains.

 

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NICOLE BARRIERE

 

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nic

 

 

 

 

 


MARC BARON...Extrait

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Quand nous allons plus haut que nous

Vers tout le silence qui tremble

Le jour a le poids d'une image

Nous vivons loin des nids

L'espoir est notre seul envol

 

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MARC BARON

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claire basler2

 Oeuvre Claire Basler

 

 

CHANT IV...Extrait

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Notre cœur sera bientôt notre bouche,
la voix sera vue, touchée et respirée ;

la pluie, uniquement ce que tu chantes.

Vers ta voix émigreront les hirondelles,
vers ta voix se tourneront les héliotropes.
Clair de ta voix sera l’espace,
profond de ta voix l’abîme.

Aujourd’hui c’est la vendange de l’air.

 

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AUGUSTO LUNEL

 

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heliotropium

ESQUISSE D'UNE PHENOMOLOGIE DE LA SOLITUDE...Extrait

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Comment ne pas sentir (...) que cette intimité qui me protège et me définit est un obstacle définitif à toute communication ? Tout à l'heure, perdu au milieu des autres, j'existais à peine. J'ai maintenant découvert la joie de me sentir vivre, mais je suis seul à la goûter. Mon âme est bien à moi, mais j'y suis enfermé (...) Les autres ne peuvent violer ma conscience, mais je ne puis leur en ouvrir l'accès, même lorsque je le souhaite le plus vivement. Mes gestes et mes paroles sont des signes sans contrepartie. Ils peuvent seulement faire allusion à une expérience que j'éprouve mais que ceux à qui je m'adresse ne pourrons jamais avoir.
Mon succès apparent cachait ainsi une défaite totale. Seule la subjectivité est une existence véritable, mais elle est, par essence, incommunicable. Je suis tout seul et comme muré en moi-même – moins solitaire qu'isolé. Mon jardin secret est une prison.
Je découvre en même temps que l'univers des autres m'est aussi exactement interdit que le mien leur est fermé. Plus encore que ma souffrance propre, c'est la souffrance d'autrui qui me révèle douloureusement notre irréductible séparation. Quand mon ami souffre, je puis sans doute l'aider par des gestes efficaces, je peux le réconforter par mes paroles, essayer de compenser par la douceur de ma tendresse la douleur qui le déchire. Celle-ci pourtant me demeure toujours extérieure. Son épreuve lui reste strictement personnelle. Je souffre autant que lui, plus peut être, mais toujours autrement que lui; je ne suis jamais tout à fait « avec » lui.
L'expérience de la mort de l'autre est encore plus bouleversante. A cet événement exceptionnel qui anéantit celui que j'aime ou qui le transporte peut-être dans quelque autre monde où je n'ai point accès, j'assiste en étranger. Le déchirement qu'opère en moi la pensée d'une fin que je vois approcher n'est que ma tristesse. L'angoisse que j'éprouve pour la destinée de mon ami reste mon angoisse. Que je m'applique à rendre sa mort plus douce ou plus résignée ne supprime pas le fait que l'épreuve m'en demeure interdite. On meurt comme on est né, tout seul, les autres n'y peuvent rien. Enfermé dans la souffrance, isolé dans le plaisir, solitaire dans la mort, réduit à chercher des indices ou des correspondances dont l'exactitude n'est jamais vérifiable, l'homme est condamné, par sa condition même, à ne jamais satisfaire un désir de communication auquel il ne saurait renoncer.

 

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GASTON BERGER

Du prochain au semblable 
 

 

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Jiwoon Pak2

Oeuvre Jiwoon Pak

UN SANGLOT NOMMÉ GAZA

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Il arrive un moment où vient la sensation que l’on se répète encore et encore, pour rien, pour pas grand-chose de concret, pour aucun changement. En somme, une oppression, un à-quoi bon, contre lesquels il est dur de lutter. Cela vaut pour nombre de sujets d’actualité. La situation politique et économique en Algérie, la tragédie syrienne ou le drame profond des Palestiniens. Ce qui vient de se passer à la « frontière » de Gaza, cette tuerie qui n’est rien d’autre que l’affirmation d’un pouvoir total de vie et de mort sur une population sans défense, fait réapparaître ce sentiment qui mêle colère, indignation, amertume et sanglots.

Tuerie gratuite, délibérée, et qui, sur le plan international, a de fortes chances de rester impunie. Nous le savons tous. Dans la hiérarchie mondiale, l’Etat israélien occupe une place à part. Comme l’OAS jadis, il frappe où il veut et quand il le veut, sûr de son bon droit et du soutien indéfectible des Etats-Unis, première puissance planétaire. Il arrive parfois que Washington manifeste quelques irritations et laisse passer des résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU sans opposer son véto. La dernière fois, c’était en décembre 2016 à propos de la condamnation de la colonisation (laquelle ne s’arrête jamais). Le cadeau d’adieu de Barack Obama à son « ami » Benyamin Netanyahou… Mais avec Trump, retour à la case du « feu vert permanent ».

Israël peut aussi compter sur la lâcheté de l’Union européenne (UE) et de ses membres. Oh, bien sûr, certains d’entre eux ont fait état de leur « préoccupation ». D’autres, comme la France, ont même fait preuve de courage intrépide en demandant à Tel Aviv d’agir avec une « plus grande retenue ». Mais point de sanctions. Pas même l’esquisse d’une réflexion en ce sens. Suspendre l’accord d’association ? Impensable. Mettre le frein sur certains accords de coopération technique et scientifique ? Inenvisageable. Car, après tout, qu’est-ce que la vie d’un Palestinien ?

C’est le fond du problème. Pour les chancelleries européennes, les Palestiniens sont des morts en sursis. C’est leur état naturel. Ils seraient ainsi destinés à subir ce qu’ils subissent. Une gamine de dix-sept ans emprisonnées, sexuellement harcelée par son interrogateur, cela ne déclenche guère de protestations. La « communauté internationale » fait avec… Des jeunes que l’on arrête et que l’on détient sans raison, au nom d’une disposition qui remonte au protectorat britannique ? Que voulez-vous, mon bon monsieur, nous n’y pouvons pas grand-chose… Et puis, vous savez, le poids du passé… Imaginons un seul instant quelles auraient été les réactions des Européens (ne parlons même pas des Etats-Unis) si les morts avaient été Israéliens…

En France, dans la hiérarchie de l’information, la tuerie de Gaza est passée loin derrière la grève des cheminots, la météo incertaine, la finale de la coupe de la ligue et la chasse aux œufs de Pâques. Rien d’inhabituel. Nombre de mes confrères ont relevé les « perles » de cette couverture faussement objective, où le bourreau est toujours présenté de manière positive tandis que même la supériorité morale de la victime est niée. « La manifestation a fait seize morts » expliquait une radio d’information en continu. Règle de base respectée : ne jamais, mais jamais, désigner Israël comme coupable de quoi que ce soit. L’Etat hébreu se défend, réplique, riposte, anticipe mais la faute est ailleurs. Le coupable, c’est la victime. Elle a forcément tort. Elle a mal voté, elle est extrémiste, elle ne respecte pas sa propre vie – ou celle de ses enfants. Mais quelle idée était la sienne de manifester sur son propre sol (du moins, supposé tel) ? Et c’est ainsi qu’est distillé le message implicite : les Palestiniens, contrairement à ce que prétend leur Poète, n’aiment guère la vie. Pire, ils sont les responsables de leurs (mauvais) sort. Autre moyen d’instiller le poison. Evoquer le rôle du Hamas (pour faire couleur locale, c’est-à-dire israélienne, prononcer Khamas…). Laisser entendre qu’il aurait sa part de responsabilité, qu’il aurait envoyé des terroristes (bien appuyer sur les « r », là aussi, pour faire couleur locale) à la « frontière » ou qu’il aurait délibérément sacrifié la vie de jeunes gens manipulables à souhait.

Mais revenons à ce terme de frontière. Quel beau moyen de masquer la réalité. Ce qui sépare l’Etat d’Israël, membre des Nations Unies, et l’enclave de Gaza, prison à ciel ouvert, sans souveraineté aucune, ni sur son sol, ni sur les airs ni sur la mer, ce sont des murs, des clôtures, des grillages, des fossés. Gaza n’est pas un Etat. La Cisjordanie n’est pas un Etat. Il n’y a pas d’Etat palestinien. Il n’y a pas de face-à-face entre deux pays, ayant chacun leur souveraineté, leur armée. Il y a un dominant et un dominé. Un colonisateur et un colonisé, un Etat et des proto-bantoustans.

Soutien indéfectible des Etats-Unis, lâcheté des Européens, Israël peut aussi compter sur la pusillanimité des pays arabes. « Notre malheur, c’est aussi le monde arabe » me dit un jour un ami palestinien de Bethléem. Rien de plus vrai surtout quand on pense à cette brute saoudienne qui, en ce moment, secoue ses bourrelets et exhibe ses pétrodollars pour convaincre Israël de faire (à sa place) la guerre à l’Iran. Et voilà ce principicule et futur roitelet qui nous rappelle à une vérité contemporaine : pour lui et pour l’engeance à laquelle il appartient, les Palestiniens ne comptent pas.

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AKRAM BELKAÏD 
"La chronique du blédard" 
Le Quotidien d’Oran, 5 avril 2018

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tammam azzam

Oeuvre Tammam Azzam

TI NE VAI- ERIC MATTEI - NOËLLE CORDIER

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