LES MAINS D'UNE FEMME...
SOLAIRE...Extraits
Un jour je suis entrée dans la maison de ton nom, c’était l’exact de ce que j’attendais. J’y suis restée et plus jamais je n’ai eu froid et plus jamais je n’ai eu peur. Qu’on ne me parle pas de cage, il s’agit là de la plus haute, de la plus absolue des libertés.
...
Des traces de mots sur la neige de papier. Un chant d’alouette dans la gorge. Des miettes de paix sur le fracas des hommes. L’eau, le sel, le pain. Et même si le fer-blanc du jour fait muraille, même si la terre crevasse, même si les mains rident comme arbres d’hiver, nous sommes ceux qui ont marché pour ceux qui marcheront. Nous sommes le chemin qui porte. L’avant, l’après, pendant, autour, tout, rien, jamais, toujours. Irrationnels, réels, nous sommes le chaos, l’incertitude, et surtout l’immortel espoir. Enfants et frères du vivant toutes formes confondues, nous sommes l’appel et la présence. Et quand la houe du vivre laboure nos passages pour je ne sais quelle moisson, encore nous sommes le possible amour.
...
Terre de septembre, ma Mère, comme toi je suis des derniers fruits et des guerets sanguins. Comme toi, je protège la parole donnée et la graine à venir. Au soir de lune orange sur le portant de vignes, au portail de l’ultime saison, je sais les mots de feu et les pas qui inventent la route. Des sols charnus jusques aux cimes, j’accueille tes éléments, ta généreuse constance. Dans la coupe des mains, je bois à ton exactitude. Des crinières d’arbres aux persévérances d’herbes, je chevauche tes traces avec les plumes d’ange et les abeilles en miel. Je ne cèderai rien aux dormances d’hiver, je les traverserai, riche de tes promesses. Et c’est debout, en lumière montante, que je l’écris à l’encre rouge au mordant d’un ciel qui s’embrase : solaire, je suis légitime d’aimance.
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ILE ENIGER
Éditions Chemins de Plume
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Oeuvre Catherine Reineke-Manry
PAIX...
"Paix à celui qui hurle parce qu'il voit clair
Paix à nos esprits malades, à nos coeurs éclatés
Paix à nos membres fatigués, déchirés
Paix à nos générations dégénérées
Paix aux grandes confusions de la misère
Paix à celui qui cherche
En se frappant la tête contre des murs en béton
Paix au courroux de l'homme qui a faim
Paix à la haine, à la rage des opprimés
Paix à celui qui travaille de ses mains
Paix à cette nature
Qui nous a toujours donné le meilleur d'elle-même
Et dont chaque homme quel qu'il soit a besoin
Paix à nos ventres —
Grands réservoirs de poubelles académiques
Paix à vous mes amis, dont la tendresse m'est une nécessité
Paix et respect de la vie de chacun
Paix à la fascination du feu,
Paix au lever du jour à la tombée de la nuit
Paix à celui qui marche sur les routes
Jusqu'aux horizons sans fin
Paix au cheval de labour
Paix aux âmes mal-nées qui enfantent des cauchemars
Paix aux rivières, aux mers, aux océans
Qui accouchent de poissons luisants de gas-oil
Paix à toi ma mère,
Dont le sourire douloureux s'efface auprès de tes enfants
Paix enfin à celui qui n'est plus
Et qui toute sa vie a trimé attendant des jours meilleurs."
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CATHERINE RIBEIRO
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LETTRE D'ITALIE
Lettre d'Italie,
Il est 00h28 à Brescia.
« Je vous écris d’Italie, je vous écris donc depuis votre futur. Nous sommes maintenant là où vous serez dans quelques jours. Les courbes de l’épidémie nous montrent embrassés en une danse parallèle dans laquelle nous nous trouvons quelques pas devant vous sur la ligne du temps, tout comme Wuhan l’était par rapport à nous il y a quelques semaines. Nous voyons que vous vous comportez comme nous nous sommes comportés. Vous avez les mêmes discussions que celles que nous avions il y a encore peu de temps, entre ceux qui encore disent « toutes ces histoires pour ce qui est juste un peu plus qu’une grippe », et ceux qui ont déjà compris.
D’ici, depuis votre futur, nous savons par exemple que lorsqu’ils vous diront de rester confinés chez vous, d’aucuns citeront Foucault, puis Hobbes. Mais très tôt vous aurez bien autre chose à faire. Avant tout, vous mangerez. Et pas seulement parce que cuisiner est l’une des rares choses que vous pourrez faire. Sur les réseaux sociaux, naîtront des groupes qui feront des propositions sur la manière dont on peut passer le temps utilement et de façon instructive ; vous vous inscrirez à tous, et, après quelques jours, vous n’en pourrez plus. Vous sortirez de vos étagères La Peste de Camus, mais découvrirez que vous n’avez pas vraiment envie de le lire.
Vous mangerez de nouveau.
Vous dormirez mal.
Vous vous interrogerez sur le futur de la démocratie.
Vous aurez une vie sociale irrésistible, entre apéritifs sur des tchats, rendez-vous groupés sur Zoom, dîners sur Skype.
Vous manqueront comme jamais vos enfants adultes, et vous recevrez comme un coup de poing dans l’estomac la pensée que, pour la première fois depuis qu’ils ont quitté la maison, vous n’avez aucune idée de quand vous les reverrez.
De vieux différends, de vieilles antipathies vous apparaîtront sans importance. Vous téléphonerez pour savoir comment ils vont à des gens que vous aviez juré de ne plus revoir.
Beaucoup de femmes seront frappées dans leur maison.
Vous vous demanderez comment ça se passe pour ceux qui ne peuvent pas rester à la maison, parce qu’ils n’en ont pas, de maison.
Vous vous sentirez vulnérables quand vous sortirez faire des courses dans des rues vides, surtout si vous êtes une femme. Vous vous demanderez si c’est comme ça que s’effondrent les sociétés, si vraiment ça se passe aussi vite, vous vous interdirez d’avoir de telles pensées.
Vous rentrerez chez vous, et vous mangerez. Vous prendrez du poids.
Vous chercherez sur Internet des vidéos de fitness.
Vous rirez, vous rirez beaucoup. Il en sortira un humour noir, sarcastique, à se pendre.
Même ceux qui prennent toujours tout au sérieux auront pleine conscience de l’absurdité de la vie.
Vous donnerez rendez-vous dans les queues organisées hors des magasins, pour rencontrer en personne les amis - mais à distance de sécurité.
Tout ce dont vous n’avez pas besoin vous apparaîtra clairement.
Vous sera révélée avec une évidence absolue la vraie nature des êtres humains qui sont autour de vous : vous aurez autant de confirmations que de surprises.
De grands intellectuels qui jusqu’à hier avaient pontifié sur tout n’auront plus de mots et disparaîtront des médias, certains se réfugieront dans quelques abstractions intelligentes, mais auxquelles fera défaut le moindre souffle d’empathie, si bien que vous arrêterez de les écouter. Des personnes que vous aviez sous-estimées se révéleront au contraire pragmatiques, rassurantes, solides, généreuses, clairvoyantes.
Ceux qui invitent à considérer tout cela comme une occasion de renaissance planétaire vous aideront àélargir la perspective, mais vous embêteront terriblement, aussi : la planète respire à cause de la diminution des émissions de CO2, mais vous, à la fin du mois, comment vous allez payer vos factures de gaz et d’électricité ? Vous ne comprendrez pas si assister à la naissance du monde de demain est une chose grandiose, ou misérable.
Vous ferez de la musique aux balcons. Lorsque vous avez vu les vidéos où nous chantions de l’opéra, vous avez pensé« ah ! les Italiens », mais nous, nous savons que vous aussi vous chanterez la Marseillaise. Et quand vous aussi des fenêtres lancerez à plein tube I Will Survive, nous, nous vous regarderons en acquiesçant, comme depuis Wuhan, où ils chantaient sur les balcons en février, ils nous ont regardés.
Beaucoup s’endormiront en pensant que la première chose qu’ils feront dès qu’ils sortiront, sera de divorcer. Plein d’enfants seront conçus.
Vos enfants suivront les cours en ligne, seront insupportables, vous donneront de la joie. Les aînés vous désobéiront, comme des adolescents ; vous devrez vous disputer pour éviter qu’ils n’aillent dehors, attrapent le virus et meurent. Vous essaierez de ne pas penser à ceux qui, dans les hôpitaux, meurent dans la solitude. Vous aurez envie de lancer des pétales de rose au personnel médical.
On vous dira à quel point la société est unie dans un effort commun, et que vous êtes tous sur le même bateau. Ce sera vrai. Cette expérience changera à jamais votre perception d’individus. L’appartenance de classe fera quand même une très grande différence. Etre enfermé dans une maison avec terrasse et jardin ou dans un immeuble populaire surpeuplé : non, ce n’est pas la même chose. Et ce ne sera pas la même que de pouvoir travailler à la maison ou voir son travail se perdre. Ce bateau sur lequel vous serez ensemble pour vaincre l’épidémie ne semblera guère être la même chose pour tous, parce que ça ne l’est pas et ne l’a jamais été.
À un certain moment, vous vous rendrez compte que c’est vraiment dur.
Vous aurez peur. Vous en parlerez à ceux qui vous sont chers, ou alors vous garderez l’angoisse en vous, afin qu’ils ne la portent pas. Vous mangerez de nouveau.
Voilà ce que nous vous disons d’Italie sur votre futur. Mais c’est une prophétie de petit, de très petit cabotage : quelques jours à peine. Si nous tournons le regard vers le futur lointain, celui qui vous est inconnu et nous est inconnu, alors nous ne pouvons vous dire qu’une seule chose : lorsque tout sera fini, le monde ne sera plus ce qu’il était. »
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FRANCESCA MELANDRI
écrivaine
(traduit de l’italien par Robert Maggiori)
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LETTRE OUVERTE A EMMANUEL MACRON
Annie Ernaux est écrivain. Elle vit à Cergy, en région parisienne. Son oeuvre oscille entre l'autobiographie et la sociologie, l'intime et le collectif. Dans cette lettre adressée à Emmanuel Macron, elle interroge la rhétorique martiale du Président.
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Monsieur Le Président
« Je vous fais une lettre/ Que vous lirez peut-être/ Si vous avez le temps ». À vous qui êtes féru de littérature, cette entrée en matière évoque sans doute quelque chose. C’est le début de la chanson de Boris Vian Le déserteur, écrite en 1954, entre la guerre d’Indochine et celle d’Algérie. Aujourd’hui, quoique vous le proclamiez, nous ne sommes pas en guerre, l’ennemi ici n’est pas humain, pas notre semblable, il n’a ni pensée ni volonté de nuire, ignore les frontières et les différences sociales, se reproduit à l’aveugle en sautant d’un individu à un autre. Les armes, puisque vous tenez à ce lexique guerrier, ce sont les lits d’hôpital, les respirateurs, les masques et les tests, c’est le nombre de médecins, de scientifiques, de soignants. Or, depuis que vous dirigez la France, vous êtes resté sourd aux cris d’alarme du monde de la santé et ce qu’on pouvait lire sur la banderole d’une manif en novembre dernier -L’état compte ses sous, on comptera les morts - résonne tragiquement aujourd’hui. Mais vous avez préféréécouter ceux qui prônent le désengagement de l’Etat, préconisant l’optimisation des ressources, la régulation des flux, tout ce jargon technocratique dépourvu de chair qui noie le poisson de la réalité. Mais regardez, ce sont les services publics qui, en ce moment, assurent majoritairement le fonctionnement du pays : les hôpitaux, l’Education nationale et ses milliers de professeurs, d’instituteurs si mal payés, EDF, la Poste, le métro et la SNCF. Et ceux dont, naguère, vous avez dit qu’ils n’étaient rien, sont maintenant tout, eux qui continuent de vider les poubelles, de taper les produits aux caisses, de livrer des pizzas, de garantir cette vie aussi indispensable que l’intellectuelle, la vie matérielle.
Choix étrange que le mot « résilience », signifiant reconstruction après un traumatisme. Nous n’en sommes pas là. Prenez garde, Monsieur le Président, aux effets de ce temps de confinement, de bouleversement du cours des choses. C’est un temps propice aux remises en cause. Un temps pour désirer un nouveau monde. Pas le vôtre ! Pas celui où les décideurs et financiers reprennent déjà sans pudeur l’antienne du « travailler plus », jusqu’à 60 heures par semaine. Nous sommes nombreux à ne plus vouloir d’un monde dont l’épidémie révèle les inégalités criantes, nombreux à vouloir au contraire un monde où les besoins essentiels, se nourrir sainement, se soigner, se loger, s’éduquer, se cultiver, soient garantis à tous, un monde dont les solidarités actuelles montrent, justement, la possibilité. Sachez, Monsieur le Président, que nous ne laisserons plus nous voler notre vie, nous n’avons qu’elle, et « rien ne vaut la vie » - chanson, encore, d’Alain Souchon. Ni bâillonner durablement nos libertés démocratiques, aujourd’hui restreintes, liberté qui permet à ma lettre – contrairement à celle de Boris Vian, interdite de radio – d’être lue ce matin sur les ondes d’une radio nationale.
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ANNIE ERNAUX
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THE GARDENER...Extrait
Un poème de Tagore pour les coeurs troublés
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Paix ! mon cœur, laisse le temps des adieux être doux.
Qu’il ne soit pas mort, mais accomplissement.
Que l’amour se transmue en souvenir et la douleur en chants.
Que le vol de l’oiseau par le ciel s’achève en le repli des ailes au-dessus du nid.
Que l’ultime caresse de ta main soit délicate comme la fleur de la nuit.
Reste tranquille, Ô ma Belle Fin, quelques instants, dis tes derniers mots en silence.
Devant toi je m’incline et j’élève ma lampe pour illuminer ton chemin
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RABINDRANATH TAGORE
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ANNA MARIA CARULINA CELLI...Extrait
Le pain est posé sur la table
La croûte, blonde dune
Emaillée d'une fleur de sable
Près de la coupe de lait
Miel blanc et mie de lune
Loin, là-haut les oiseaux fleurissent l'océan
De leur plain-chant
Je mords l'hostie, en les suivant des yeux
Pleine de leurs vives ailes dans le ciel bleu
En une lente bouchée
Je laisse en moi couler d'une plume blessée
La blancheur du lait
Avec une goutte d'encre
Combien le poids d'une perle
Pèse sur les paupières
Je penche et sans toucher terre
Tombe de sommeil, la tête en l'air
Des miettes de soleil
Sur la nappe froissée
Tracent un chemin doré
Une volée de moineaux
S'abat sur le frêle sentier
Bientôt il ne reste plus rien
Qu'une impalpable pliure de désir
Tachée d'éclairs de saphir
Qu'en ma vague somnolence
Je cueille dans un cocon à papillons
Pièces essaimées de mes métamorphoses
Entre eux je lie les follets feux
Les pétales de roses
Puis je les lis
Comme lettres perdues de mots oubliés
Je les cache sous les lignes d'un cahier d'écolier
Et quand je me réveille
Demeurent en mes pensées
Les couleurs de poèmes muets
Prières écrites sur des rouleaux sacrés
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ANNA MARIA CARULINA CELLI
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CLAUDE ROY....Extrait
Les racines du vent se glissent dans un cœur se nourrissent d'un sang encore embué de nuit et ramènent au jour ombragé de douleur un enfant ébloui
Soleil dans ses yeux purs jette ton sable d'or et tes pigeons de neige au front du bel enfant éclabousse de feu le trébuchant essor de l'ange adolescent
Le soleil et le vent ont des philtres trompeurs pour écarter de nous les menaces du temps
La mer chante à ses pieds quand Narcisse se meurt et plonge à contre-temps
La mer chante à ses pieds et tresse son écume sa broderie jaunie de sable et de limon comme au ciel du sommeil une étoile s'allume lorsque nous nous aimons
Écartez-vous marins des rivages menteurs où chante la sirène aux flancs de goémons
La plage et ses détours le sable et sa torpeur sont pièges du démon
Ainsi que le soleil ou sa flamme caresse et blesse ou bien guérit le nageur incertain ainsi de notre mort qui ralentit ou presse le pas de nos destins
Il ne faut pas tromper les cavaliers du sort et leurs chevaux légers comme l'écume au vent
Ne passez pas le temps à mentir à la mort c'est un jeu décevant
Ne passez pas vos jours à vous passer de vie
Ne passez pas l'amour à vous passer de temps
Ne passez pas le temps à attendre la nuit ni les neiges d'antan
Car votre mort en vous se moque de vos pièges et se glisse au serré du plus tendre baiser remonte à la surface et plus vive que liège plus souple que l'osier
s'empare de ce cœur qui se croyait léger l'alourdit le surprend le presse et le défait et fait de ce vivant de vivre soulagé un mort très stupéfait.
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CLAUDE ROY
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MYRIAM OH...Extrait
On a cru au printemps, et puis la neige nous a surpris
On a cru que jamais nous ne serions privés
de ces choix ordinaires :
de rester ou de partir, de s'en laver les mains ou de les tendre,
de se fuir ou bien de se sauter dans les bras
On a cru que le changement qu'on réclamait,
ce serait une affaire de choix et puis c'est lui qui nous a surpris
Alors pour garder un semblant de libre arbitre
nous renforçons les barreaux de notre prison
junkies en manque d'une liberté préfabriquée
Dehors la température a chuté
Dedans on lorgne sur le thermomètre fiévreusement
On a cru aux saisons,
On a cru qu'on avait le temps,
et puis notre condition de petits passants nous a pris en grippe
Est-ce qu'il faut que les choses désertent leur place
pour que nous nous apercevions que nous ne sommes pas à la nôtre?
Est-ce qu'il faut que notre vie soit mise en jeu pour reprendre la partie?
Il est tombé des flocons jusqu'en bas de la France
il est tombé des droits il est tombé des hommes il est tombé des mots
qu'on ne pense pas
mais que l'on dit quand le monde se dérobe sous nos pieds
et qu'on s'agrippe à ce qui nous maintient debout, même si
c'est n'importe quoi
On a cru à la raison,
On a cru qu'on était la loi,
et puis la nature a repris ses droits
Il est tombé des flocons jusqu'au fond de notre poitrine
il est tombé des certitudes il est tombé des ponts sur les lieux communs
évidemment nous ne crèverons pas
de faim ou d'ennui
d'un printemps en retard ou de nos caprices de stars
mais sans les ronflements de la terre
ou la chaleur d'un autre cœur qui bat
On ne sait pas
On a cru aux premières fois, et puis le quotidien nous a surpris
alors on l'a pris pour acquis et il nous a laissés
sur le carreau
Et cette guerre qui ne nous occupe pas à essayer de survivre
mais qui nous ramène à nous-mêmes
On a cru qu'on y échapperait comme des cons
On a cru au printemps,
Mais après nous être fait des boutons
nous fleurirons.
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MYRIAM OH
CHLOROQUINE, APPEL DE MEDECINS - PETITION...
ESPERANCE
Un jour la beauté reviendra
Sur ses pas
Les étoiles tourneront sur leur gond
Pour faire chanter les nuits
Et le soleil fêtera sa prière unique
Un jour
Un jour
Les miracles renaîtront
Nous les cueillerons
A pleines mains
Comme le plus beau cadeau
De la vie
Ils auront tes yeux que courtise l’espérance
Ils seront l’écho de ta voix
Ils nous liront tous les poèmes
Qui dorment sur tes paupières
Et sur tes lèvres
Ce sera un réveil
Une révélation
Une bénédiction
Et nous irons tous les deux
Caresser les rivières
Faire de chaque pierre
Une pépite du temps
Un jour
Un jour
Bercé par la mer
Nous enfilerons
L’aiguille neuve du beau temps
Les volcans ruisselleront d’amour
Et le matin s’habillera de papillons
Comme autant de jardins suspendus à nos rêves
Un jour
Un jour
Le monde recommencera
A la lumière de tes seins
Et ce sera pour nous tous
L’heure inespérée des renaissances
L’heure du beau baptême des astres
L’heure des arcs-en-ciel
Et des retrouvailles humaines
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ERNEST PEPIN
Faugas
Le Vendredi 3 Avril 2020
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Photographie Véronica Azaryan
POESIES...Extrait
« De moi je ne sais rien d’autre
que ce que le vent murmure
le soir quand tout se tait
ce que les nuages
me disent
en sillonnant le ciel
A TE...
À TOI qui meurs en EHPAD .!!!. Seule..Seul.
À TOI, à qui, "ILS" ont volé le dernier pan de vie.
Vargogna à elli...les rapaces.
Les chiens.! .(Fisichella et Lily excusez moi, vous les valez cent fois).
Toi ma sœur..Toi mon frère.. Toi son Père.. Toi sa Mère..Toi sa Grand Mère..Toi son Grand Père.. Toi mon cousin, ma cousine, Toi mon voisin, ma voisine..Toi mon inconnu..
Toi ma si belle et si tendre inconnue ...je VOUS aime.
-Je vous aime VOUS si belles et si beaux aux cheveux blancs si blancs.
-Je vous aime VOUS , qui pour certains encore, pour certaines aussi, avez connu la GUERRE, la VRAIE GUERRE, le fascisme..le nazisme.. la délation.. la clandestinité.. le rationnement et les PETITES CROIX, BLANCHES comme celle d'Antoine.
Ti ricordi ?.
-Je vous aime VOUS !
- Je vous aime VOUS qui avez tant travaillé, œuvré, labouré et semé et monté tant de murs..
- Je vous aime VOUS qui avez tant milité, lutté..refusé..acquis et bien souvent gagné et souvent et plus que parfois dans le sang et les coups de gourdins.
- Je vous aime VOUS qui avez tant œuvré..transmis et fait germé..pour nous donner du GRAIN.
- Je vous aime VOUS, les Républicains, les Républicaines, poing levé chantant la liberté.
-Je vous aime VOUS les laïques..les laïcs, tant semeurs d'alphabet et de plumes et de rêves et de.."point à la ligne"...trois carreaux en retrait.
-Je vous aime VOUS les Bâtisseurs, les Bâtisseuses, vous qui avez tant bâti jusqu'à des Cathédrales..et de fours et de toits et des sentiers tordus.
- Je vous aime VOUS ..les Résistants..les Résistantes qui résistez encore avec vos mains tendues, avec vos yeux brillants de liberté rêvée.
- Je vous aime VOUS fils ou fille des femmes et des hommes de l'ombre à la mémoire immense et au chant d'espérance.
- Je vous aime VOUS ceux et celles de ...l'Argentella, montagne en mer, aux grottes si profondes où ILS voulaient leurs bombes façonner.
- Je vous aime VOUS jeunesse d'ALERIA..au drapeau blanc levé pour déjouer leur piège.
- Je vous aime VOUS sauveurs de littoral, de langue et de culture tout en polyphonies.
- Je vous aime VOUS pourfendeurs d'injustice et de cachots miteux.
- Je vous aime VOUS Pastori valeureux à la musette pleine, de rimes et d'acquifraghji, de soleil et de faim..et de fromages frais et de figues et de noix.
- Je vous aime VOUS "femmes au foyer" dit-on, laborieuses et souriantes autant, autant que vos lessives blanches.
- Je vous aime VOUS TOUTES..
- Je vous aime VOUS TOUS qui dans cet endroit choisi pensiez, en paix, venir vous reposer et chanter inseme pour ce dernier.moment.
Mais...ce doux temps est brisé.
Le virus est venu..et par leur incurie, il vous a submergés..es.
Comment cela se peut, qu'AUJOURD'HUI..., VOUS, moules de notre chair que vos mots ont sculptée , vous partiez en silence. Jetés..es.?.
Vous partez oubliés..es... en un silence immense comme un tonnerre d'été.
Comment cela se peut ?.
Face à cette infamie, voici que lève et monte et gronde une grande colère, forte, immense et juste et terrible et saine car....
"ILS" vous ont humiliés..es..bafoués..es. rejetés..es.. par soif de profits et de cupidité.
OUI.. Eux...les nantis, les menteurs, les déserteurs fiscaux, les casseurs de tant d'Acquis, de vos Acquis Sociaux si douloureusement ACQUIS, tout en Service Publics aux senteurs du MAQUIS..
Ce maquis où certains d'« ENTREVOUS »sur des feuilles de fougère, l' avenir prometteur ont écrit POUR NOUS et c'était votre orgueil. Vous n'en aviez pas d'autres.
TOUS ces voyous donc, ces voleurs d'ISF, cupides, au cœur en coffre fort fermé, verrouillé, caché. exilé tout en catimini....
OUI...TOUS ces voyous..aujourd'hui, VOUS jettent dans l'oubli, et, VOUS laissent .SEULS et SEULES, loin des vôtres, en souffrance, sans la chaleur des mots pour aider à partir et VOUS accompagner dans un souffle encore tiède qui aide à s'en aller et à sècher les larmes.
Vargogna à elli ..!!!..
Vous nous quittez, vous partez, le silence vous suit en convoi funéraire.
Les cloches sont muettes.
Vargogna à elli.!.
Allez en paix NOS BRAVES et Sachez qu'avec d'AUTRES, ceux d'ici, ceux d'ailleurs, au nom de tous ces "VOUS" , nous vous le promettons, nous parlerons de VOUS et ... sur tous VOS cercueils ruisselants de sueur et de tendre beauté et de larmes, sur tous VOS Cimetières.. nous, OUI... nous faisons serment de DEMANDER des COMPTES ... et, pour sauver leurs ors, nous leur crions bien fort, de fuir vers VARENNES car, pour demander des comptes ils doivent se douter que nous savons COMPTER.
Les bûchettes sont à nous, nous les avons coupées, dans du bois de rosier, au pied du Tableau Noir.
ANDATE o care,
ANDATE o Cari,
ANDATE Fieri è Fiere à suminà ALTRÒ !!!
"ILS" vous ont laissés..es..mourir... Oui, presque ASSASSINÉS..ES.
NOI...Demain ..nous veillerons à bien garnir vos tombes, non pas de chrysanthèmes, non, mais, de CURCONI bien chauds et savoureux autant.
L'heure "des comptes à rendre" est gravée sur vos pierres....
tombales. È Teghje.
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GHJISEPPU MAESTRACCI
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MARCEL MOREAU...Extraits
Lorsque conditionnés à ne plus se poser de questions sur l'être, ils finissent par ne plus s'en poser que sur l'avoir. Quelque chose en eux de vital, d'essentiel, d'incommensurable, s'est prématurément clos, ferméà l'aventure, est tombé en déshérence. L'homme alors, si ingambe soit-il, porte en lui son poids de mort, jusque dans son espérance de survie. On dirait un atlante soutenant sa propre charge de divorces d'avec lui-même, d'intégrité perdue, de névrose annoncée. Mais c'est trop pour cette charge-là, et il n'a même plus la violence de la jeter bas, avec l'entablement, avec la société.
...
On sauve les apparences, alors que s'acharner à les perdre serait une tâche d'une envergure tellement plus propice à la restauration de notre image fracassée.
...
MARCEL MOREAU
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Marcel Moreau
TECTONIQUE DE LA FEMME...Extrait
Tu me caches quelque chose…
Quelque chose de bien plus bas que la terre, une entrée dans tes
pieds, une autre dans ta gorge.
Tes pieds, ta gorge s’ouvrent, mais jamais par ces entrées qui
mènent au flamenco…
Quand bien même te couperais les pieds, te trancherais la gorge,
ne trouverais ce chemin que ton dieu seul connaît…
Tu me caches quelque chose…
Quelque chose de bien plus bas que la mer…
J’y enfonce mes genoux, mon poitrail et ma tête à la suite et
tu m’as bâillonné pour que je ne crie pas…
je voudrais te rejoindre quand tu danses tes eaux à m’en pourrir
l’éponge. Mais jamais ne verrai ce fond d’où tu me vois t’aimer
d’amour encloaqué…
Tu me caches quelque chose…
Quelque chose de bien plus bas que le ciel…
N’ai plus rien à te dire…Ton amant est le Vent, que veux-tu que
je fasse ?
D’une brise il remonte ta robe, d’une rafale il l’ôte, il t’emporte
en son souffle vers son bordel abstrait, où l’on change de désir
comme on change de jouir et où les noces sont courtes, le temps
qu’elles t’écartèlent.
Tu me caches quelque chose…
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MARCEL MOREAU
Editions Cadex, 2006
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Oeuvre Isabelle Jacq Gamboena
https://www.artabus.com/french/isabellejacq/
NOUS, AMANTS AU BONHEUR NE CROYANT ....MARCEL MOREAU...HOMMAGE
Cette nuit là, j'ai gardé les yeux grand ouverts. Pour laisser passer la mort se retirant en moi. en un sens inverse pour laisser entrer la vie, ne venant que de toi. La mort me quittant, ta vie m'envahissant se sont sans doute croisées, dans mes yeux grand ouverts. Se sont-elles parlé? si oui. Comment savoir ce qu'elles se sont dit? Le pire serait que que la mort ait dit à ma vie " je reviendrai ". Mais le pire du pire serait que ta vie ait dit à ma mort " je repartirai ". Car alors, vraiment, je n'aurais plus qu'a m'en aller tout de suite, de ne pouvoir retarder ce retour, n'ayant pu m’empêcher ce départ, le mieux serait que la mort t'ai dit " je lui reviendrai quand tu sera partie ", mais le mieux du mieux serait que la vie que tu as fait entrée en moi ne réponde rien, en la croisant, a la mort que tu en fait sortir, comme si le bonheur l'avait rendu sourde ou muette,ou les deux.
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MARCEL MOREAU
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Marcel Moreau
TERRE...
HOSANNA IN EXCELSIS - JACQUES CULIOLI
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Pà issi cori chi sunniavanu
Di pace è sponde calme
Cù le so speranze appese
A isse tozze assuliate,
Pà issi venti chi scatinavanu
E mente di l’umani
Di lé so idee armate
Par un’antru lindumani
Senti cum’eo pregu, cum’eo pregu.
Hosanna, in excelsis
Oghje un’anima hà u fretu
Vedi un’anima hà u fretu
Pà isse vite accugliate
A e porte di u supranu
E Ie so quattru staghjoni
Di ricordi a e nostre labbre
Pà e stonde di a storia
Chi scrivianu isse mane
E tanti suspiri offerti
A lu sognu chi s’alluntana
Vedi ind’ù ni so li nostri tempi,
Duri so li nostri tempi
Hosanna, in excelsis
In unitate
Spiritus sanctis
Senti cum’eo pregu
Cum’eo pregu…
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BRUNO SUSINI
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JOURNEE INTERNATIONALE DU PEUPLE GITAN
On dit qu'à une époque, lorsque la terre était encore mariée avec le ciel, les Roms étaient des oiseaux. Ils volaient entre la terre et le ciel et rien ne pouvait les arrêter. Ils trouvaient dans le ciel et sur la terre leur nourriture et ne manquaient de rien. Ils vivaient libres et heureux.
Un jour, alors qu'ils volaient au-dessus de la terre, ils virent un magnifique palais qui brillait au soleil. Alors ils descendirent le voir. Ce palais était habité par de gros oiseaux : des poules, des dindes, des oies et des canards. Ces gros oiseaux, éblouis par la beauté des Roms-oiseaux leur offrirent toutes sortes de bijoux précieux et les plus délicieuses des friandises, et ils les invitèrent à rester avec eux. Les Roms-oiseaux s'installèrent dans le palais et bientôt devinrent tous gras et couverts de chaînes en or, de la tête aux pieds.
Un seul oiseau n'avait pas touché aux friandises, ni voulut se couvrir d'or. C'était l'oiseau rouge "e tchirikli loli". Pendant longtemps il essaya de convaincre ses frères que toutes ces richesses n'étaient pas bonnes pour eux et qu'ils feraient mieux de sortir de ce château dans lequel ils s'étaient eux-mêmes enfermés, mais hélas, aucun ne voulut l'écouter.
Alors, "e tchirikli loli" s'éleva dans les airs, monta très haut, très haut, et se jeta du haut des cieux sur les pierres. C'est seulement à cet instant que les Roms-oiseaux se réveillèrent. Ils commencèrent à battre des ailes pour s'envoler dans les airs. Mais tout l'or qu'ils portaient les tirait vers le bas et ils ne pouvaient plus quitter le sol.
Soudain, une petite plume rouge, portée par le vent, fit son entrée au palais et se posa aux pieds des Roms-oiseaux. Alors, tout l'or tomba de leurs corps, mais les ailes n'obéissaient plus. Ils étaient devenus trop gras et trop lourds, et ils n'arrivaient plus à s'envoler. La petite plume rouge, emmenée par le vent, quitta le palais et s'en alla errer sur les routes de la terre.
Les Roms-oiseaux la suivirent comme ils le purent et, ne pouvant plus voler, ils perdirent peu à peu leurs plumes. C'est ainsi que, petit à petit, ils se transformèrent en humains. Hommes de corps, oiseaux dans l'âme, ayant désappris à voler à jamais.
On dit aussi que parfois, les Roms, dans leurs rêves, voient un bel oiseau rouge traverser le ciel. Alors ils s'envolent à leur tour pour suivre "e loli tchirikli"à travers le ciel. Mais ça… c'est dans leurs rêves
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CONTE ANONYME
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Photographie de Roger Schall (1904-1995).
Paris, musée Carnavalet.
LE DEVOILEMENT ...Extrait
Et ainsi nous allons, chacun de nous,
Séparés, méconnaissant ce poids
De lumière, notre seule charge.
Notre unique force.
Et quand elle nous inonde, brusquement,
Renvoyée par qui devient miroir, à son insu,
Nous ne sommes plus que des oiseaux de nuit,
Nous n'avons plus que le cri déchiré
De l'effraie qui s'arrache au rocher,
Nous n'entendons plus que le raclement de terreur
De nos corps embourbés.
Nous ne supportons pas la lumière,
Nous ne supportons pas l'écho
Qui nous révèle notre propre clarté.
Nous ne nous trompons pas, nous la connaissons bien,
Avec tous ses visages, même les plus furtifs.
Nous l'entendons brûler
Dans quelques mots d'une voix qui se met à trembler,
Dans le métal qu'une main percute
Et qui résonne soudain
Près du chiffre sacré.
Là où il n'y a plus ni corps ni esprit
Mais seulement la vie,
L'éternité souriante.
Et si nous ne faisons pas semblant d'être sourds,
Si nous ne faisons pas semblant d'être aveugles,
La grêle de plomb et de noirceur,
L'obscurité et la souillure
S'abattent sur la lumière.
Il nous faut la quitter sans un mot,
Nous en détourner pour qu'elle ne se brise pas.
L'oiseau de feu ne se laisse pas saisir.
Et nous qui avons déjà traversé la mort,
Nous qui savons que la lumière est simple,
Qu'elle est de cette terre,
Dans la pâleur des cendres
Nous l'attendons encore.
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HELENE PERAS