Ne plus rien dire, ne plus souffler, ne plus être. Évidé.
Des mots traînent dans la pendule
Des joies cristallisées se souviennent d’elles-mêmes
L’ardeur rompue, les giclées de sève molle durcies soudainement
L’hiver a repris dans ses mailles gelées
La lumière d’Août prisonnière de la glace
Le teint halé, la peau à demi poêlée d’urgences chaudes
Faire corps sans murmure et sans frisson
Faire corps d’artichaut à la mauvaise saison
Doux Août fané sous la plume de la dernière hirondelle
Ni fer, ni potager, l’ire insolente des jours mauvais
L’embrun sous la nappe allégée des pourparlers
Des avaloirs où s’enfouissent les dernières feuilles
N’avoir rien. A donner, à faire, à dire
Quelques limailles d’espoir autour du cou
Comme un cache-nez de neige et d’illusions
Fer rouge de la vanitéà surprendre l’écho dans l’onde
Pourlécher l’extrémité des ongles du vide
La carence insupportable des marches fictives
Derrière les ombres dématérialisées du désir mort-né
L’Art en jachère, suspendu aux lèvres des criées dévitalisées
Ni savoir, ni supposer. L’heure blanche maudite parmi toutes les autres
L’heure des grèves scélérates qui se soulèvent par vagues
Sur les trottoirs dispersés de la bonne foi en espadrilles
Né sur le doute, né sur l’ardoise martelée de promesses
Né avec l’aube, avec le déni des courses pleurant la foudre
Sur la terre comme au ciel, le parjure inclus dans le cycle
Dans le tourbillon replié sur lui-même
La flamme sur le visage, le brouillon sur la langue
Recopié sans cesse l’algorithme déphasé de la respiration
Ma mère, ma racine, ma gentiane aux sucres pacifiques
La peine d’être aux bouts des doigts, à l’extrémité du ventre
Et puis, moi, rien, l’envie pressante de l’effondrement
Une plage lointaine au bord de la ravine, du dégueuloir de sens
L’ablution fatale d’une joie endormie
Au fond de la seringue du sommeil
Les rêves en éclats sur l’étal de l’absurde
L’air dans la peau et le sang brouillé
Le regard en éventail, la contemplation à la place de l’acte
Je me vomis à jeun sur le théâtre nu des bouquets de violettes
Narcisse grimpantes, la pente des raisons oculaires
Aveuglées par la buée d’une étoile qui saigne
Une mort ratée s’annonce dès la naissance
Bref destin encerclé d’avenir en pâture
La nuit pleure à chaque aube
Le rétrécissement des coulées de miel
L’étroitesse du cri primal, animal fondu dans la genèse
L’extrême difficultéà s’extraire des relents de l’abîme
Tout ici pour nous perdre, nous démolir et mourir
La gaîté, petite fleur aux yeux plissés
S’est glissée derrière la porte des disettes iconoclastes
Une giclée de lait sur la tranche de pain grillé
Les sourires au tamis des mers de stalagmites
Les bourgeons de la révolte dans un coin du cœur
Le corps pendouillant scarifié par la nuit des temps
L’heure voisine de la pelle qui creuse
Et l’esprit à quatre pattes sur la branche que l’on scie
Mémoire décollée du cerveau
J’avancerai distordu sous la pression des jougs
Le thème inabordé parce qu’inabordable
L’envolée plus chère que le calcul probant
Des matières que l’esprit accepte
J’avancerai et tout s’en ira.
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BRUNO ODILE
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Oeuvre Samantha Keely Smith