Le poète Ashraf Fayad (néà Gaza en 1980) a été condamnéà mort par décapitation, le 17 novembre 2015, pour apostasie (renoncement à la religion), au motif que ses poèmes contenaient des idées blasphématoires. Il s’agit, après cent cinquante exécutions en 2015, d’un nouvel acte d’obscurantisme et de barbarie d’une monarchie absolue de droit divin, dont la France est l’un des principaux four-nisseurs d’armes.
D’origine palestinienne, Ashraf Fayad a représenté l’Arabie Saoudite à la Biennale de Venise en 2013, année où il fut arrêté une première fois pour blasphème. Relâché, il est à nouveau arrêté en janvier 2014.Un homme l’a dénoncé pour l’avoir entendu, dans un caféd’Abha (sud-ouest de l’Arabie Saoudite), tenir des propos contre Dieu.Lors du procès, un religieux accuse Ashraf Fayad de promouvoir l’athéisme dans ses poèmes. Un livre de Fayad est versé au dossier. Le poète doit s’excuser sous la menace et est condamnéà quatre ans de prison et huit cents coups de fouet.
Un rebondissement des plus sordides intervient le mardi 17 novembre : un autre tribunal arguant que « le repentir, c’est pour Dieu », revient sur la première sentence et condamne à mort Ashraf Fayad. Le poète a jusqu’au 17 décembre 2015 pour faire appel. Privé de son passeport, il n’a pu recourir à un avocat pour assurer sa défense. Dans le journal britannique The Guardian, Ashraf Fayad a pu déclarer : « Ils m’accusent d’athéisme et de répandre des idées destructrices dans la société. Dans ma poésie, je me contente de parler de moi en tant que réfugié palestinien, et de problèmes culturels et philosophiques. Mais les extrémistes religieux y voient des idées destructrices contre Dieu. »
Mais, mardi 2 février, après son appel, un nouveau verdict est tombé : sa peine a été commuée en huit ans de prison et 800 coups de fouet. L’avocat d’Ashraf Fayad, Me Abdel Rahman-Al-Lahim, a déclaré suite à cette décision de la cour que son client ferait de nouveau appel et n’abandonnerait pas son combat pour la liberté.
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On dit que tu as bon espoir
de réussir à voler
et de défier le trône
D’abroger les ablutions de la nuée
d’enfreindre les lois de la Création
et ce que Dieu a ordonné
aux autres oiseaux d’accomplir
Dieu sur son trône
Il assure leur subsistance
à toutes les créatures à plumes
qui s’en vont rassasiées
alors que tu dois te lever tôt
le ventre creux
pour aller ramasser les immondices
dont les gens se sont débarrassés
et pour te parfumer
avec l’émanation des charognes
étalées à perte de vue
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ASHRAF FAYAD
(Poème traduit de l’arabe (Palestine), par Abdellatif Laâbi.
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Le remède
Tu démentiras toutes les informations
les revues de presse
les analyses des spécialistes
en dernier cri de la mode
Tu n’abuseras pas du sommeil
et du téléphone portable
Tu t’exerceras un peu
à la mort
Tu te débarrasseras de toutes les photos
que tu as gardées de ton enfance
de ton adolescence, de ta pauvreté
de ton ex-aimée
des contes de ta grand-mère
et de tes virées nocturnes
pour t’attaquer
à certaines prétendues vertus
Tu utiliseras de l’eau chaude pour ta douche
et te laveras les pieds
chaque fois que tu ôteras tes chaussettes
Tu feras tiennes les expériences
de ceux qui viendront après toi
Tu écriras ton nom à l’envers sur le miroir
Tu mangeras avec la main droite
et laisseras le reste
à ceux qui méritent plus que toi
ta bouchée trempée dans
le pétrole
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ASHRAF FAYAD
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Oeuvre Ashraf Fayad " autoportrait "