Corps qui aimait la paix de l'autre corps
Peu visible à ces heures avant l'aube,
Mais plus que du visible, étant le souffle
infiniment régulier de l'esprit.
J'appelle esprit ce savoir qui s'éveille
Quand des lèvres s'unissent dans la paix
D'une main qui trouve une main dans la pénombre
Et on ne sait s'il fait encore nuit
Ou si c'est un ressac de proche rivage
Qui, s'accroissant, fait qu'ici ne soit plus
Que l'océan des lèvres confondues.
On dirait que la terre émeut sa chaîne,
Barque qui touche au flanc d'une autre barque,
Deux corps glissant dans le temps qui n'est plus.
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YVES BONNEFOY
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Oeuvre Auguste Rodin