«Écoutons les bruits du monde à la fenêtre. Le bruit de l’or, le bruit de l’épée, le bruit des prières. Ceux qui comptent leurs sous derrière un rideau lourd. Ceux qui cuvent leur vin au fond de leur château. Ceux qui marmonnent sous la dentelle des anges. Le marchand, le guerrier et le prêtre. Ces trois-là se partagent le treizième siècle. Et puis il y a une autre classe. Elle est dans l’ombre, trop retirée en elle-même pour qu’aucune lumière puisse jamais l’y chercher. Elle est comme la matière première des trois autres. Les marchands y puisent la main d’œuvre dont ils ont besoin. Les guerriers y trouvent de quoi renouveler leurs armées. Les prêtres y flairent les âmes dont ils ont goût. Ces trois-là espèrent quelque chose en récompense de leur travail : la fortune, la gloire ou le salut. Cette classe n’espère rien, pas même le passage du temps, l’endormissement de la douleur. Cette classe est celle des pauvres. Elle est du treizième siècle et elle est du vingtième, elle est de tous les siècles. »
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CHRISTIAN BOBIN
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