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alors on s'enfonce, on traverse
des étendues où le seul futur est le cœur qui bat
comme cet appel auquel on voudrait répondre
et c'est pourquoi on avance, même si à chaque pas
rien ne bouge que le corps obstiné qui poursuit
l'ombre qu'il n'a pas, on aimerait pouvoir
s'arrêter, regarder simplement l'aube qui vient,
poser la main sur la pierre froide et saluer
la lumière, dire les premiers mots, écouter
le crissement du sable, le bruissement de l'eau,
la rumeur des choses qui commencent mais le jour
est déjà le soir, on n'a rien pu saisir, on reste
vacant à regarder ses mains dans l'éclat des lampes
ou sur la vitre l'attente du visage noir,
on se perd, on se retrouve, il y a des silences
remplis de voix, des matins tombés comme des soirs,
plus on avance et moins on sait, on cherche demain
entre des mots qui disent hier, ce qu'on a gagné
on l'a perdu, comparéà ce qu'on a été
on n'est rien, disait-il, mais un rien qui insiste,
on guette entre les signes du corps l'imperceptible
grignotement tandis que sur la fenêtre brille
une sorte de splendeur, on voudrait y entrer,
être le courant et à la fois se voir couler,
on cherche, les choses semblent n'avoir pas bougé
mais quand on veut les prendre, les toucher, simplement,
c'est comme si elles reculaient, s'effaçaient
ne laissant sur les doigts qu'un peu de poussière à peine,
quelque chose qui peut-être ressemble à l'oubli,
alors c'est dans cet oubli qu'on s'avance,
au moment où on croit ne plus rien tenir, c'est là,
un éblouissement minuscule, on est perdu...
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JACQUES ANCET
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