Ils ont tant de fois tenté
De broyer mon corps et d’effacer ma mémoire
En habits d’infamie, ployant sous l’anathème
Leurs mots lacéraient ma chair autant que leurs pierres
Je sais les deux
L’obscurité du temps n’y fera rien
Pas plus que leurs souillures
Une lumière d’un autre ordre
Brûle
Intacte dans ma chair peuplée de voix
J’ai trois mille ans
Mariée sans amant sur une faille d’encens
Je hurle la prophétie de dieux affolés
Les hommes m’exilent loin des vivants
Venant d’en bas les cris
Toujours les cris
J’ai deux mille ans
Épouse répudiée aux aubes de granit
Chênes entaillés des solstices
Je ne cueillerai plus vos beaux fruits mordorés
Le gui a éteint son or au seuil de la raison
J’ai deux mille ans ailleurs
Repentie à la chevelure parfumée
Ils me disent la putain de l’autre
Celle qui danse sur des paroles inouïes
Et baise ses mains sans entraves
Depuis mille ans figée dans leurs cathédrales
Vierge définitive ou catin repentie
Ils ont gelé mes courbes dans des plis de stuc
Ourlé ma bouche de marbre
GHYSLAINE LELOUP
Oeuvre Francesco Hayez