Et la mort qui avance
A petits cris plaintifs,
Dansant sa drôle de danse
Sur mon centre émotif
Qui grimpe dans le lit,
Soulève les couvertures ;
Mon amour aboli,
Pourquoi tout est si dur ?
Au bout de quelques mois
(Ou de quelques semaines)
Tu t’es lassée de moi,
Toi que j’avais fait reine.
Je connaissais le risque,
En mortel éprouvé ;
Le soleil, comme un disque,
Luit sur ma vie crevée.
Il n’y a pas d’amour
(Pas vraiment, pas assez)
Nous vivons sans secours,
Nous mourons délaissés.
L’appel à la pitié
Résonne dans le vide
Nos corps sont estropiés,
Mais nos chairs sont avides.
Disparues les promesses
D’un corps adolescent,
Nous entrons en vieillesse
Où rien ne nous attend
Que la mémoire vaine
De nos jours disparus,
Un soubresaut de haine
Et le désespoir nu.
Ma vie, ma vie, ma très ancienne,
Mon premier vœu mal refermé
Mon premier amour infirmé
Il a fallu que tu reviennes.
Il a fallu que je connaisse
Ce que la vie a de meilleur,
Quand deux corps jouent de leur bonheur
Et sans fin s’unissent et renaissent.
Entré en dépendance entière
Je sais le tremblement de l’être
L’hésitation à disparaître
Le soleil qui frappe en lisière
Et l’amour, où tout est facile,
Où tout est donné dans l’instant.
Il existe, au milieu du temps,
La possibilité d’une île.
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MICHEL HOUELLEBECQ
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Photographie Thomas Goujon