¡ Oh, qué dolor el tener
versos en la lejanía
de la pasión, y el cerebro
todo manchado de tinta !
¡ Oh, qué dolor no tener
la fantástica camisa
del hombre feliz : la piel,
alfombra de sol, curtida !
(Alrededor de mis ojos
bandadas de letras giran.)
¡ Oh, qué dolor el dolor
antiguo de la poesía,
este dolor pegajoso
tan lejos del agua limpia !
¡ Oh dolor de lamentarse
por sorber la vena lírica !
¡ Oh dolor de fuente
ciega y molino sin harina !
¡ Oh, qué dolor no tener
dolor y pasar la vida
sobre la hierba incolora
de la vereda indecisa !
¡ Oh el más profundo dolor,
el dolor de la alegría,
reja que nos abre surcos
donde el llanto fructifica !
(Por un monte de papel
asoma la luna fría.)
¡ Oh dolor de la verdad !
¡ Oh dolor de la mentira !
.
Ô la douleur de sentir
Son poème à la distance
De la passion, son cerveau
Maculé de taches d'encre !
La douleur de n'avoir point
La fantastique chemise
De l'homme heureux : une peau
— Robe de soleil — brunie !
(Tout autour de mes regards
Un essaim de lettres tourne.)
Quelle douleur que la vieille
Douleur de la poésie,
Cette douleur insistante
Et si loin de l'eau limpide !
Douleur de se lamenter
Pour aspirer le lyrisme !
Douleur de fontaine aveugle
Et de moulin sans farine !
Douleur d'être sans douleur,
Tandis que s'en va la vie
Sur les herbes incolores
D'une venelle indécise !
La douleur la plus profonde
Est la douleur de la joie,
Soc qui ouvre les sillons
Où fructifient les larmes !
(Sur un sommet de papier
La froide lune se penche.)
Douleur de la vérité !
Hélas, douleur du mensonge !
.
FEDERICO GARCIA LORCA
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Oeuvre Edouard Vuillard