Le temps n’existe pas, n’existe plus. Il est une matière souple et non déterminée. L’heure humaine exauce l’espace dans lequel chacun se compte par le contenu de son énergie. Une multiplication de l’infini s’ouvre au bout de nos langues et se referme sous nos pas.
Ainsi, nous habitons, tour à tour, les hautes et lointaines étoiles où le cœur va, en une fraction de secondes, de la lune jusqu’à la lumière intersidérale. Et l’on passe son temps à essayer de réconcilier l’angélique regard de l’enfant à celui du vieillard aguerri de mille et une turpitudes.
Le vent se lève et sur la corde à linge des serviettes et des gants se balancent allégrement aux rythmes de ses vagues. Dans un recoin abrité où viennent s’asseoir quelques rayons de soleil, un rouge-gorge picore quelques friandises dans une touffe d’herbes. Tout semble plus ou moins paisible alors que le bulletin météo prévoit une pluie abondante pour l’après-midi. Comme Ulysse attaché au mât du navire, je préserve mon esprit de la tentation de croire que la journée va se dérouler telle qu’elle est annoncée. Ne serait-il pas fou de résorber la sensation immédiate en accordant plus d’importance à une prévision ? Instants de bonheur, je ne vous lâche pas, je suis tout entier à vos côtés.
Tout ce qui nous arrache au bonheur que nous voudrions définitif nous saisit d’effroi. Cependant, je sais que celui qui a connu le bonheur une seule fois dans son existence est prédestinéà le rencontrer de nouveau. Parce que le bonheur est immuable, il va et il vient au gré des événements que nous traversons sans jamais disparaître pour toujours.
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BRUNO ODILE
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