Tu t'attendais à quoi
En revenant sur les pierrailles
Avec les quelques gouttes d'eau
Que ces racines à sec
Qui n'avaient offert ni feuilles ni fleurs ni fruits
Quand tu courbais l'échine
Pour les nourrir du lait opulent de tes seins
Avaient vidées à ta gorge
Ces racines hermétiques luisaient à fleur de terre
Comme des serpents d'or
Comme les flammes d'or
Ondulant de désir dans l'âtre noir
Sinueuses couleuvres
Aux promesses enchanteresses
J'ai encore dans l'oreille grisée
Ta voix grave et suave
Disait la jeune fille dont tu gardais l'image
Assise
Légèrement entrebâillée
A quoi t'attendais-tu, me dis-je
Revenant sur les lieux du crime
Là où déjà
Pas une
Pas deux
Mais d'innombrables fois
Le loup t'avait tuée
La conscience tranquille
Avant de charger ton ventre de pierres
Seule, tu as percé ta peau avec l'aiguille
Afin de te recoudre et marcher
Parce que la route est belle
Et mène aux printemps
Espérais-tu que le fauve possédait
Sous sa peau féroce
Le beau jardin secret
Dont il ne cessait te te promettre les roses ?
Tu t'attendais à quoi
Laissant aller ta main dans sa paume
Vide
Laissant danser tes pas
Un bout de chemin
C'était léger
Et presque bien
Lorsqu'il t'a vu sourire
De ta candeur d'avant
Il a montré ses dents
Les crocs par lesquels il avait arraché
Tes doigts
Ton bras
Les veines qui conduisaient au coeur
Qui couraient aux pensées
Or, roses, violettes, soucis ou pensées
Ne t'avait-il pas prévenue
Que jamais il ne se pencherait
Au-dessus de tes fleurs
Pour les respirer
Ignorais-tu vraiment que cet animal
Perdu d'impudeur
Avait tété enfant
Des mamelles de sang
Dont il n'avait pas oublié la saveur ?
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ANNA MARIA CARULINA CELLI
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Oeuvre Françoise de Felice