Tu dis souvent, « Je donnerais volontiers, mais seulement à qui le mérite. »
Les arbres de ton verger ne parlent pas ainsi, ni les troupeaux de ton pâturage.
Ils donnent pour pouvoir vivre : car ne pas donner, c’est périr.
Qui mérite de recevoir ses jours et ses nuits sûrement mérite tout ce qui viendrait de toi.
Et qui a mérité de boire à l’océan de la vie mérite de voir sa coupe remplie par ton petit ruisseau.
Et quel désert serait plus grand que celui qui se trouve en le courage et la confiance, non – la charité, de recevoir ?
Et qui es-tu pour que les êtres humains dussent déchirer leur sein et dévoiler leur fierté, pour voir leur fortune à nu et leur fierté sans les atours de la pudeur ?
Vérifie d’abord que toi-même tu mérites mérites de donner, et d’être un instrument du don.
Car en vérité c’est la vie qui donne à la vie – alors que toi, qui prétend être ce qui donne, n’est rien de plus qu’un témoin.
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KHALIL GIBRAN