Ecoute c'est l'oiseau le plus lointain du monde qui chante
Je n'ai jamais vu la haine de deux peupliers.
Je n'ai jamais vu un saule vendre son ombre à la terre.
Et gratuitement l'orme offre sa branche aux corbeaux;
Partout où frémit une feuille, s'épanouit aussi le bourgeon de l'ardeur
L'ivresse d'un pavot m'a baptisé déjà dans le vertige du devenir
Ιl ne nous appartient pas de percer le mystère de la rose.
Nous ne pouvons à la rigueur
Que nous baigner dans la magie de la fleur.
Dresser notre tente par-delà le savoir.
Ou tremper notre main dans le sortilège d'une feuille.
Et nous mettre ensuite à la table du banquet.
Et à l'aube, quand se lève le soleil, renaître à nouveau,
Donnant libre cours à nos exaltations.
Arrosons de fraîcheur la perception de l'espace,
De la couleur, de son et des fenêtres.
Et laissons filtrer le ciel entre les deux syllabes de l'Être.
Vidons et remplissons nos poumons du souffle de l'éternité.
Allégeons le dos frêle des hirondelles du fardeau du savoir.
Enlevons leur nom aux nuages,
Aux platanes, aux moustiques, à l'été.
Et empruntant les traces humides de la pluie,
Gravissons les hauteurs de l'amour.
Et ouvrons la porte à l'homme, à la lumière, à la plante, à l'insecte.
Et peut-être devons-nous poursuivre
L'appel de la Vérité
Entre l'immémoriale vision du lotus
Et l'actualité de notre siècle.
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SOHRÂB SEPEHRI
traduit du persan
par Daryush Shayegan
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