A peine le murmure, l’ombre ancienne des mots
l’année d’avant où tu disais qu’il te faudrait deux vies
la vie d’avant d’une fois aveugle ?
la foi aveugle, mienne de mon pays perdu
de la rive exilée
éparpillée dans la tourmente de vivre.
et je chantais les mots d’un autre temps
des haies pleines d’oiseaux
que le printemps obsède
printemps, temps de passage
endeuillé par l’hiver qu’enchante le soleil.
alors vint d’une fable la trace ancienne et animale
le passage du doute où nous vivions de l’ignorance
où nous vivions au milieu de rêves
et de rituels sans mythes
nous n’étions de nulle part
nos cœurs cachés et étrangers,
tombés dans la plaine sans herbe
de hautes ombres nous hantaient
et hurlaient la disparition, le pays perdu
dans les remous du temps.
nous étions debout sur la grande spirale d’une route blanche
nous étions pâles et noyés de ténèbres
A peine le murmure l’ombre ancienne des plis
un salut à l’hiver, à la rosée des mots
déjà les ombres séparaient les vies
déjà les rêves affleuraient jusqu’à la mémoire des eaux
déjà s’effritaient les certitudes dans l’air sec
déjà plongeaient les regrets usés dans le crépuscule
le soleil, le bon air, l’eau pure
tout se raréfiait dans ces jours mortels
tu maintenais en vie l’amour
et sans abandonner nous rions de la grâce d’aimer encore
dans l’oisiveté des heures perdues, nous inventons notre été
nos aspirons au paradis des retrouvailles
nous croyons au temps qui épargne l’amour
nous sommes amants et aimés de cette vérité,
et la liberté rajeunit nos étreintes
nous appelons l’éternité de l’enfance
accrochés aux mémoires anciennes
nous tenons sous le vent, sous la pluie , sous le soleil
la rumeur houleuse des caresses
la sérénité exacerbée des passions
nous refusons la menace des séparations
nous arrimons au soleil la colline et les arbres
les sources et les nuages,
nous retenons le temps contre l’épaisseur des lointains
nous voyons dans chaque ligne, chaque nuance de l’espoir
nous roulons dans la brume des draps
nos caresses amassées et nous celons d’invisibles détroits
de désirs insensés
nous accostons à tant de berges nouvelles
nous découvrons la tendre lumière du soir
l’eau claire des sources profondes et des plaisirs joyeux
nous traversons le gué des silences et des absences, les solitudes
nous confirmons avec délice l’ombre de nos peurs
avec le visage intact de l’amour.
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NICOLE BARRIERE
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