Au pays des mots les jardiniers plantent des arbres
Et cueillent aux branches les lettres pour créer des livres
Ce sont les fruits des mots qui nourrissent les hommes
Tandis que certains cultivent au gré des saisons le bois
Comme on sème au jardin les graines des nouveaux arbres
Le bûcheron des mots s'enfonce dans les forêts sombres
Du haut pays à la recherche des mélèzes des sapins et des hêtres
Dont les branches caressent en douceur les nuages d'argent
Ils bruissent et tremblent et pleurent de toutes leurs feuilles
La scie crisse meurtrissant de blessures l'écorce du tronc
Pour que le poète puisse en recueillir la résine du sens
Dans la chevelure des arbres s'élève un concert d'oiseaux
Sous les coups de sa hache les accrus des troncs s'envolent
Les elfes et les fées en sucent la sève au milieu des renards
Leurs graines de poésie se propagent comme pollen au vent
Et se déposent en bourgeons dans la mousse des coeurs
J'en garde quelques graines comme une poignée d'étoiles
Pour la femme que j'aime et quelques amis de plain-chant
Elles font de notre table un banquet de fête où l'on entonne
A chaude voix que la poésie vous garde le coeur vivant.
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JACQUES VIALLEBESSET
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