Où attend celle qui t’a mis au monde,
Comment sourit celle qui t’a bercée,
Qui a enroulé flottante une feuille
Autour de ton bourgeon,
Qui t’a jeté dans la douleur et la terre
Hors de replis de son sein,
Qui a eu le droit de te boire avec ses lèvres
Et de tenir avec ses yeux ?
Pour toi le jardin, des fruits le plus chéri, est suspendu
Aux arbres de son matin.
Ô suavité ! Ô jalousie !
Ôécume des ruisseaux blonds
Autour du vallon herbeux et du foyer radiculaire
Vers la lointaine fosse ténébreuse !
Ô filet à billes et dada
Dans un habitacle de cloches !
Comment veux-tu t’appeler : rien dans le tout
Et humain de la meute humaine,
Un sautillement pour ta balle en caoutchouc,
Une plaisanterie pour ton Dieu ?
Qu’es-tu ? Faisan doré.
Qu’es-tu ? Guêpe de fleurs.
Qu’es-tu ? Soleil pissenlit.
Qu’es-tu ? Un jeune tremble.
Ta vie est une toupie,
Elle a des bords rouges et verts,
Tu la frappes avec ton fouet
A travers cent pays riches
Jusqu’à notre rue, vieille bougonne ;
Avec des fenêtres qui s’aveuglent ;
Alors elle bondit dans la fente entre les pavés
Et elle devient immobile.
.
GERTRUD KOLMAR, Rêves de bêtes
Tradution Fernand Cambon
.
Photographie Philoména Famulok