Ils se tiennent par la main
Fragiles
D’avoir traversé le temps
Sur des échasses de sable
Et des marées d’amour
Ils vont dans leur lueur
Comme un soleil couchant
Chavire un bord de mer
Les feuilles d’érable ont rougi leurs paupières
Et quand souffle le vent
Leurs yeux s’envolent
Tourbillonnent
Comme les plumes du temps
Où l’oiseau saluait leur printemps
D’un chant de sentinelle
Gardienne de leurs minuits
Etonnés du voyage
Ils se tiennent par la main
Leurs pas fidèles racontent
Un chemin sans retour
Un chemin quotidien
Bordé de souvenirs
Brodé de cheveux blancs
Ils n’ont qu’un seul miroir
Pour se faire un visage
Ils n’ont qu’une seule patience
Pour demeurer encore
Ils savent que leur amour
A mangé toute leur chair
Et que ce qu’il leur reste
Est-ce pas siamois qui jumelle leurs ombres
Et cette main qui tremble
De s’être donnée à l’autre
En défaite habitable
En murmure de lumière
Ils se tiennent par la main
Misérables
Splendides
Comme des cailloux semés dans leur conte d’enfant
Ils sont les passants
Les passeurs
Que l’amour tient debout
Quand il dresse une tendresse
Que l’amour tient debout
En marins de l’extrême
Ils sont l’exemple vivant
De ceux qui vont au port
Pour jeter à la terre la raison de leurs rides
De leurs vagues effeuillées
Depuis la première voile
Avant de s’amarrer à des ailes d’oiseaux
Ils se tiennent par la main
Par les pieds
Par le cœur
Par ce oui sans défaut
Qui leur sert de mémoire
Par ce oui de l’horloge
Qui bégaie dans leurs pas
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ERNEST PEPIN
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