Et ainsi nous allons, chacun de nous,
Séparés, méconnaissant ce poids
De lumière, notre seule charge.
Notre unique force.
Et quand elle nous inonde, brusquement,
Renvoyée par qui devient miroir, à son insu,
Nous ne sommes plus que des oiseaux de nuit,
Nous n'avons plus que le cri déchiré
De l'effraie qui s'arrache au rocher,
Nous n'entendons plus que le raclement de terreur
De nos corps embourbés.
Nous ne supportons pas la lumière,
Nous ne supportons pas l'écho
Qui nous révèle notre propre clarté.
Nous ne nous trompons pas, nous la connaissons bien,
Avec tous ses visages, même les plus furtifs.
Nous l'entendons brûler
Dans quelques mots d'une voix qui se met à trembler,
Dans le métal qu'une main percute
Et qui résonne soudain
Près du chiffre sacré.
Là où il n'y a plus ni corps ni esprit
Mais seulement la vie,
L'éternité souriante.
Et si nous ne faisons pas semblant d'être sourds,
Si nous ne faisons pas semblant d'être aveugles,
La grêle de plomb et de noirceur,
L'obscurité et la souillure
S'abattent sur la lumière.
Il nous faut la quitter sans un mot,
Nous en détourner pour qu'elle ne se brise pas.
L'oiseau de feu ne se laisse pas saisir.
Et nous qui avons déjà traversé la mort,
Nous qui savons que la lumière est simple,
Qu'elle est de cette terre,
Dans la pâleur des cendres
Nous l'attendons encore.
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HELENE PERAS