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Channel: EMMILA GITANA
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NOUS Y VOILA, NOUS Y SOMMES...

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Nous y voilà, nous y sommes.

Depuis cinquante ans que cette tourmente menace dans les hauts-fourneaux de l’incurie de l’humanité, nous y sommes. Dans le mur, au bord du gouffre, comme seul l’homme sait le faire avec brio, qui ne perçoit la réalité que lorsqu’elle lui fait mal. Telle notre bonne vieille cigale à qui nous prêtons nos qualités d’insouciance. Nous avons chanté, dansé.

Quand je dis « nous », entendons un quart de l’humanité tandis que le reste était à la peine. Nous avons construit la vie meilleure, nous avons jeté nos pesticides à l’eau, nos fumées dans l’air, nous avons conduit trois voitures, nous avons vidé les mines, nous avons mangé des fraises du bout monde, nous avons voyagé en tous sens, nous avons éclairé les nuits, nous avons chaussé des tennis qui clignotent quand on marche, nous avons grossi, nous avons mouillé le désert, acidifié la pluie, créé des clones, franchement on peut dire qu’on s’est bien amusés.

On a réussi des trucs carrément épatants, très difficiles, comme faire fondre la banquise, glisser des bestioles génétiquement modifiées sous la terre, déplacer le Gulf Stream, détruire un tiers des espèces vivantes, faire péter l’atome, enfoncer des déchets radioactifs dans le sol, ni vu ni connu. Franchement on s’est marrés. Franchement on a bien profité. Et on aimerait bien continuer, tant il va de soi qu’il est plus rigolo de sauter dans un avion avec des tennis lumineuses que de biner des pommes de terre.Certes.

Mais nous y sommes. A la Troisième Révolution.

Qui a ceci de très différent des deux premières (la Révolution néolithique et la Révolution industrielle, pour mémoire) qu’on ne l’a pas choisie. « On est obligés de la faire, la Troisième Révolution ? » demanderont quelques esprits réticents et chagrins. Oui. On n’a pas le choix, elle a déjà commencé, elle ne nous a pas demandé notre avis. C’est la mère Nature qui l’a décidé, après nous avoir aimablement laissés jouer avec elle depuis des décennies.La mère Nature, épuisée, souillée, exsangue, nous ferme les robinets. De pétrole, de gaz, d’uranium, d’air, d’eau.

Son ultimatum est clair et sans pitié : Sauvez-moi, ou crevez avec moi (à l’exception des fourmis et des araignées qui nous survivront, car très résistantes, et d’ailleurs peu portées sur la danse).

Sauvez-moi, ou crevez avec moi.

Evidemment, dit comme ça, on comprend qu’on n’a pas le choix, on s’exécute illico et, même, si on a le temps, on s’excuse, affolés et honteux. D’aucuns, un brin rêveurs, tentent d’obtenir un délai, de s’amuser encore avec la croissance. Peine perdue.

Il y a du boulot, plus que l’humanité n’en eut jamais.

Nettoyer le ciel, laver l’eau, décrasser la terre, abandonner sa voiture, figer le nucléaire, ramasser les ours blancs, éteindre en partant, veiller à la paix, contenir l’avidité, trouver des fraises à côté de chez soi, ne pas sortir la nuit pour les cueillir toutes, en laisser au voisin, relancer la marine à voile, laisser le charbon là où il est –attention, ne nous laissons pas tenter, laissons ce charbon tranquille- récupérer le crottin, pisser dans les champs (pour le phosphore, on n’en a plus, on a tout pris dans les mines, on s’est quand même bien marrés). S’efforcer. Réfléchir, même. Et, sans vouloir offenser avec un terme tombé en désuétude, être solidaire. Avec le voisin, avec l’Europe, avec le monde.

Colossal programme que celui de la Troisième Révolution. Pas d’échappatoire, allons-y. Encore qu’il faut noter que récupérer du crottin, et tous ceux qui l’ont fait le savent, est une activité foncièrement satisfaisante. Qui n’empêche en rien de danser le soir venu, ce n’est pas incompatible. A condition que la paix soit là, à condition que nous contenions le retour de la barbarie –une autre des grandes spécialités de l’homme, sa plus aboutie peut-être. A ce prix, nous réussirons la Troisième révolution.

A ce prix nous danserons, autrement sans doute, mais nous danserons encore.

 

 

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FRED VARGAS

 

 

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monde2


JUIN ET LES MECREANTES...Extrait

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N'importe où un homme est mort
d'avoir ramassé une étoile
d'avoir respiré une poussière de musique
d'avoir marqué la terre de rires
lâché bêtes fleuries aux entrées de la ville

N'importe où
sous la joue gauche du monde
dans tes yeux qui découpent le ciel
en prières
en figures de danses
en cercles bleuis par amour

N'importe où
sous la voix qui répète le temps
dans l'épaisse folie d'un visage qui brûle
d'avoir ôté le masque du soleil
envahi par les autres

N'importe où un homme est mort
d'avoir glissé sur la lumière

 

 

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NADIA TUENI

 

 

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tham54,

Photographie Thami Benkirane

https://benkiranet.aminus3.com/

JUIN ET LES MECREANTES ...Extrait II

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J'ai retenu la vie
Pour que dure l'instant sous le poids des mémoires
j'ai retenu la nuit
plus doucement qu'une main de femme
plus longuement sans oublier
contre des murs vivants
sur un étroit chemin utile comme un arbre
Pour que le don de Mort recouvre les eaux sûres
J’ai retenu la mer
loin des cathédrales dont elle se glorifie
loin de ces araignées qui tissent encore des vagues pour attirer la plage
et des rochers tordus où s’en ira la vie
j'ai retenu la vie
j'ai retenu la mer
Pour que reste le cri des oiseaux de l'orage
ceux qui n'ont plus rien dit depuis la grande attente
ceux qui prient chaque fois pour les morts en puissance
et détiennent la tour d'où soufflent tous les vents
j'ai retenu la mer
la nuit est moins féroce
qui permet au soleil
un temps de revenir

 

 

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NADIA TUENI

 

 

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Federico Infante- (70),

 Oeuvre Federico Infante

JARDINIER DE MA MEMOIRE...Extrait

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Ils sont morts à plusieurs
C'est-à-dire chacun seul
sur une même potence qu'on nomme territoire
leurs yeux argiles ou cendres emportent la montagne
en otage de vie.

Alors la nuit
la nuit jusqu'au matin
puis de nouveau la mort
et leur souffle dernier dépose dans l'espace la fin du mot.
Quatre soleils montent la garde pour empêcher
le temps d'inventer une histoire.

Ils sont morts à plusieurs
sans se toucher
sans fleur à l'oreille
sans faire exprès
une voix tombe: c'est le bruit du jour sur le pavé.

Crois-tu que la terre s'habitue à tourner?
Pour plus de précision ils sont morts à plusieurs
par besoin de mourir
comme on ferme une porte lorsque le vent se lève
ou que la mer vous rentre par la bouche...

Alors
ils sont bien morts ensemble
c'est-à-dire chacun seul comme ils avaient vécu.

 

 

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NADIA TUENI

 

 

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OSWALDO GUAYASAMIN6,,

Oeuvre Oswaldo Guayasamin

LA TERRE ARRETEE...Extrait

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Peut-être
Chaque geste est coupable de briser une enfance.
L'enfant livre de sable avec bâtonnets noirs comme chat pour servir de repère. Une horloge du temps qui s'habille est amour. Longs petits moines avec des poings ronds et utiles, avec des cernes autour de tes yeux vides. Tu penses en couleur au portrait d'un oiseau, à la fleur qui se vide.
Le ciel au bout du jardin tendu vers toi.
Viens le chercher.

Enfant, tu retiens la genèse.
Le cordon qui relie l'enfant à la matière inépuisée n'est pas vraiment tranché.

La magie vient tout simplement à pas de fantaisie.

Les soleils qu'ils promènent, une fête sacrée dessus tes boucles blondes. Tu les enroules autour de ces jardins que l'on ne comprend pas.

J'ai longtemps oublié. Pour toi reviendront à leur gréétendues de silence, poissons rouges qui parlent un langage d'étoiles.

C'est le manège à l'image du monde ; celui que tu connais, celui qui est vraiment, que l'on doit arracher à ton savoir d'enfant.

La montagne secrète et les eaux odorantes, les villages hideux, le poinçon des abeilles sur chaque fleur sucrée, autant de longues marches dans tes rêves qui tombent.

L'écho va répéter le souffle de ta joie et tous ces petits bruits.
Tu possèdes la terre et les souffrances. L'eau qui se cache pour inviter aux pistes.

Sauve-toi, enfant.
à quatre pattes et à plus l'infini.

 

 

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NADIA TUENI

 

 

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Federico Infante- (70)

Oeuvre Federico Infante 

LA RIVE ADVERSE...Extrait

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Cela va sans lire, la Poé-sie
 n’est pas en organdi de soie
de soirée, non, elle squatte le
cœur de ceux qui déambulent loin
des bulles de moi ou de Mémoire ;
elle s’ente sur le lent sourire
des patients ; elle offre ses cendres à
la terre, aux souches pour qu’en novembre
tranche       la splendeur de l’arbousier.

 

 

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JEAN-FRANCOIS AGOSTINI

Editions Souffles, 2007

 

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ar 2

Fresques Pompéi

CLAIRE SYLVIE VINCENSINI...Extrait

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A ma fille

 

Il ne neige pas
Mon amour
C'est juste
Nos anges
Qui battent des ailes

 .

 

CLAIRE SYLVIE VINCENSINI

 

 

ANGES

NADIA TUENI ...Extrait

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Se souvenir

- d'un village escarpé, posé comme une larme au bord d'une paupière;

on y rencontre un grenadier, et des fleurs plus sonores qu'un clavier.

Se souvenir

- de la vigne sous le figuier, des chênes gercés que Septembre abreuve,

des fontaines et des muletiers, du soleil dissous dans les eaux du fleuve.

Se souvenir

- du basilic et du pommier, du sirop de mûres et des amandiers.

Alors chaque fille était hirondelle,

(…)

Se souvenir

- de l'ermite et du chevrier, des sentiers qui mènent au bout du nuage,

(…)

Se souvenir

- de chacun, de tous, du conteur, du mage, et du boulanger...

 

 

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NADIA TUENI

 

 

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CAPO ROSSO-001

Thierry Raynaud Photographie


NADIA TUENI...Extraits

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Et mes yeux sont un port

d'ou partent les navires
dont on dit qu'ils sont beaux
comme un enfant qui pleure
dans la nuit des miroirs.

...

La mer se cache dans ses eaux
Le vent est un fardeau de prince, mais la lampe et la nuit s'en vont en chuchotant, écoutent la respiration des mémoires.

...

O que la vérité est menteuse,
car l'infini de l'eau est démenti par le sable.
Tout n'est si beau que parce que tout va mourir,
dans un instant...

 

...

Je ne préfère rien aux vérités de l’eau, aux coups de vent chargés des embruns de la vague

 

 

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NADIA TUENI

 

 

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nadia tueni2

Nadia Tuéni

LA SAGESSE DES SORCIERES...Extrait

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Remplir ce qui est vide,
vider ce qui est plein,
la lumière
comme corps,
la lumière
comme souffle.

Accueillir les fleurs :
jonquilles
baptisées dans le beurre,
lilas léchant le ciel avec volupté,
colliers de glycine
se penchant sur des mamans magnolias,
les fleurs de cerisier sont des lames de rasoir,
les dahlias des neiges sont aussi tranchants que la pisse de chat,
les lis dans la vallée sont
des lis de plume,
des lis de cuir,
des lis d’écaille,
des lis de peau,
la rose presque Miss Amérique,
les orchidées sont de grasses langues de lécheuses,
et elles sentent toutes si bon
et je suis avalé par leur divinité terrestre et charnelle.

Tu
réchauffes
mon cœur,
je pose ma tête sur ta poitrine
et me sens libre,
remplir
ce qui est vide,
vider
ce qui est plein,
remplir ce qui est
vide, vider
ce qui est plein,
remplir ce qui est vide, vider ce qui est plein,
remplir ce qui est vide, vider ce qui est plein,
nous sommes
les dieux
que nous connaissons,
nous étions
les dieux
que nous connaissions.

Je te sens
avec mes yeux,
te goûte
avec mes oreilles,
te touche
avec mon nez,
t’entends
avec ma langue,
je veux que tu t’assoies
dans mon cœur,
et que tu souries.

Les mots viennent du son,
le son vient de la sagesse,
la sagesse vient du vide,
profonde détente
d’une grande perfection.

Accueillir les fleurs :
brassées de chèvrefeuille
et de colombines,
lames couronnées de rouge du pinceau indien,
les champs de marguerites sont les gens
qui m’ont trahi
et les lupins étaient égoïstes et méchants,
les bougainvilliers volumineux et voluptueux
lèchent le feu en aimant ce qui ne peut brûler,
l’énorme bouquet de mille roses rouges
est tous ceux à qui j’ai fait l’amour,
frappe mon nez avec la tige d’une rose,
les pavots ont les poches pleines de festins narcotiques,
les chrysanthèmes sont une guirlande de crânes.

Je vais à la mort
bien volontiers,
aussi serein et joyeux
que lorsque je pose ma tête
sur la poitrine de mon amant.

Accueillir les fleurs :
le troisième bouquet, une couronne de cloches bleues,
un carillon de digitale pourprée,
un tournesol se blottit contre moi
et contemple le ciel,
puissent les petits insectes noirs
qui grouillent sur les pétales de pivoine
être les fils et filles de mes vies à venir,
grandes boules de lumière
émettant blanc, rouge, bleu,
un éclat concentrique
jaune, verte,
une grande exaltation,
le monde me fait rire.

Puissent le son et la lumière
ne pas surgir et apparaître comme deux ennemis,
puissé-je connaître tout son comme mon propre son,
puissé-je connaître toute lumière comme ma propre lumière,
puissé-je spontanément connaître tout phénomène comme moi-même,
puissé-je comprendre la nature originelle,
qui n’est pas fabriquée par l’esprit,
conscience nue
vide.

 

 

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JOHN GIORNO

Editions Al Dante, 2005

 Traduction Gérard-Georges Lemaire

 

 

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YSIS2

 Oeuvre Ysis

https://les-toiles-d-ysis.fr/

 

FABIENNE VERDIER...Extrait

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Savez vous qu’il m’arrive parfois de vivre dans un état second
où je ne perçois plus de différence entre le moi
le genévrier sauvage
le petit caillou ballotté par les marées
le scarabée rhinocéros
ou la feuille de choux rongée par les chenilles…
Pourquoi vouloir toujours nommer l’innommable,
l’éphémère je le suis
incandescente de nature.
Où se situer si ce n’est
au cœur de l’ouragan
au bord d’une faille rocheuse
à la lisière du vide et de la matière
percevant furtivement
dans le miroir de ma pierre à encre
de multiples métamorphoses ?
Je ne suis rien sinon l’errance d’un destin.

 

 

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FABIENNE VERDIER

 

 

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JOSS3

 Oeuvre Josiane G.

 

FERNANDO PESSOA...Extrait

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De tout, il resta trois choses...
La certitude que tout était en train de commencer,
La certitude qu'il fallait continuer,
La certitude que cela serait interrompu avant que d'être terminé...
Faire de l'interruption un nouveau chemin...
Faire de la chute un pas de danse...
Faire de la peur un escalier...
Faire du rêve un pont...
Faire de la recherche une rencontre...

 

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FERNANDO PESSOA

 

 

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ano

 

 

LES MOTS NOUS MANQUENT...Extrait

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Pour Alexo...

 

 

Devant l’énigmatique beauté qui nous
submerge et nous dépasse.

Devant toute ivresse qui rêve l’infini et
devant l’infini que l’on devine entre les herbes
ou les étoiles, les gestes courbes de l’amour,

les mots nous manquent.

Devant la crue et l’incendie, la peur du vide,
l’effroi, le plaisir qui geint ou la douleur qui
hurle, devant le temps qui nous tourmente,

les mots nous manquent.

Ils nous manquent devant le cercueil des
êtres aimés, l’irréversible que l’on s’épuise à
vouloir corriger pourtant et le chaos des
existences.

Ils nous manquent, comme ils manquent à
tant de gosses mortifiés que le langage laisse
dehors sans aucune clef pour aucune porte.

Devant ceux-là mêmes ayant grandi,
humiliés par leur propre bêtise, écrasés par
l’indigence de leurs rêves, qui se sont mis à
ânonner des invectives en forme de versets tout
juste bons à tromper la peur, à boucher les
issues, à voiler la lumière,

les mots nous manquent

Et voilà qu’ils nous manquent plus
cruellement encore sur le trottoir, devant ces
morts, ces téléphones au sol qui sonnent sans
réponse.

(…)

Des mots à mettre au bout des mains,
comme des outils, des caresses ou des lanternes.

Pour faire un peu de lumière dans sa propre
obscurité. Un peu de paix.

Et rassembler les morceaux éparpillés de
notre part commune en dessinant quelque chose
qui vaille.

Quelque chose qui ressemblerait à la vie
désirable que vantent les poèmes.

 

 

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MICHEL BAGLIN

 

 

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Un-SDF-retrouve-mort-de-froid-

 

PATRICK ASPE...Extrait

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J'ai lancé l'espace dans le grand ciel du temps qui va,

nuages, arbres arborés de ta lumière,

à la lisière de ton chemin, mains dans nos mains,

à travers les siècles des pierres, des pistes et des instincts,

ventres des femmes, sources créations, pulsions, gémissements, floraisons...

Et les images en suspension

- les encres, les coups de crayon, les calques,

et la passion,

même les poussières font de la mémoire un univers qui gagne le coeur

compte à rebours -

 je prends sur moi, la lune brève, les lèvres chaudes,

les pages, les pays, les gens, la terre, la tolérance, et les semailles...

Enfance dans la montagne des pâturages aux vaches rouges des volcans,

royaume des révolutions, funambules, arlequins,

jongleuses des heures prises à la fenêtre des greniers,

prisonnier, prisonnière, foudre des foudres,

la société fragilise l'esprit des nouvelles espérances,

lignes du paysage, paysans, urbanisme à l'outrance des virages,

mirages, mirages, les arbres vivent et ils sont en marche...

Kaléidoscope généreux des ondulations de couleurs,

les différences sont nos richesses nécessaires...

 

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PATRICK ASPE

 

 

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asinao 12 aout 2019

LE BOIS D'EPAVE

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Il y a des lieux qui nous mènent ailleurs, un arrêt sur image, une page arrachée, une tache blême sur un mur où il y avait un cadre, le sillage d’un bateau, les murs d’un village, une ornière de boue, le sourire d’une plage, la fadeur d’une fadaise, la hauteur d’une falaise, un mot d’auteur. Mon chant est trop petit pour les oreilles du monde. Mes pieds boitent comme un verbe éclopé qui se conjugue mal. Le même paysage accroche les regards. Chacun le voit à sa façon. Je n’ai rien demandé, mais le malheur rôde autour de moi. J’ai pris mon visage dans une boite à ordures, mes mains dans le sac des gestes, mes pas au baluchon des routes. Ma valise en peau de vache s’est remise à brouter et mon cerveau rumine. J’ai grappillé mes pas sur le bord des routes. J’ai gaspillé mon temps. Je ne suis pas un héros. Ma vie est inutile. Merci Autin-Grenier de la dire à ma place. Le oui cogne à la porte du non. Sachant qu’il restera dehors, il continue sa route. L’oreille contre le sol, j’écoute chanter les morts. Par la suture du temps, nos plaies se recousent. Nos blessures se mélangent avec le même sang. Notre langue cicatrise les trous de l’histoire.

Je dois redonner vie au bois d’épave, refaire le monde à partir de ses ruines, faire pousser les fruits à partir des pépins, repeindre à neuf les planches pleines d’échardes, apprendre la langue de chacun. Les vieux parlent aux pigeons, les ébénistes au bois, les jardiniers aux plantes, les poètes au silence. Je ne suis pas celui qu’on attend pour la fête, je suis le mort qu’on pleure, l’intrus qu’on met dehors, l’étranger qu’on dépouille de son identité. Le pain est noir lorsque le blé est triste. J’avance dans la foule, plus seul d’être mille. La terre a trop de poids sur les épaules, trop d’haltères à soulever, trop de maux, trop de pus, pas assez de mots pour rompre le silence, pas assez de gestes pour redonner la vie, pas assez de regards pour redonner la vue, pas assez de bois pour rallumer le feu, trop de migrants captifs sur des radeaux de fortune, d’émigrants sans passeport, trop d’hommes qui ont peur à la moindre tempête, trop d’athées que l’on force à prier, trop d’enfants qu’on transforme en adultes, de chômeurs qu’on habille en soldats. J’attends tout de la vie, le sourire d’un visage, la caresse d’une main, le goût du pain sur la langue des famines, le goût du vin, la soif du raisin, un grelot qui grelotte dans le cuivre des cloches, quelques billes dans les poches, un galet, des allumettes, une cenne noire écrasée par le train, un cœur qui bat, un œil qui voit, l’âme qui pleure, l’homme debout, un sexe pour l’amour. On s’égare souvent dans le courant de la vie. On se trompe de porte. Ceux qui cherchent un pays, on leur donne un papier, mais c’est du pain qu’ils veulent, un lit douillet, un bout de paix loin des canons.

 

 

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JEAN-MARC LA FRENIERE

 

 

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bois epave

Oeuvre ?

 

 


BROTHERS OF STRING - MATHIAS DUPLESSY

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Mathias Duplessy revisite " Dire Straits " ... Brothers in arms...

ZIAD MEDOUKH... LETTRE OUVERTE AU PRESIDENT EMMANUEL MACRON

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Monsieur le Président,

 



Je vous adresse cette lettre, non pas en tant que professeur de français au Département de français à l'université de Gaza - un département créé avec le concours du Consulat de France à Jérusalem, et soutenu par des associations francophones - ni en tant que chercheur universitaire ou bien encore comme écrivain, poète d'expression française ; je vous écris en tant que simple citoyen palestinien qui vit le blocus, la souffrance et l'horreur dans cette prison à ciel ouvert de Gaza.

Je suis un Palestinien francophone qui développe l'enseignement du français dans la bande de Gaza en dépit de toutes les difficultés, et cela en coopération avec le Consulat Général de France à Jérusalem, un consulat très actif en faveur la francophonie dans les Territoires palestiniens. Mais un Palestinien souvent bloqué dans sa ville et empêché de sortir de sa cage pour participer à des conférences et colloques universitaires dans des pays francophones à cause du blocus impitoyable et des fermetures des frontières qui relient la bande de Gaza à l'extérieur.

Je suis un Palestinien qui garde espoir d'un lendemain meilleur, un lendemain de paix et de justice, et qui a décidé de rester très attachéà son pays et à sa ville natale, aux côtés de ces jeunes et ces enfants afin de les soutenir et de leur remonter le moral dans le contexte très difficile de Gaza.

Je suis un Palestinien qui a décidé de résister contre les mesures atroces de l'occupation par l'éducation et par l'enseignement de cette si belle langue, le français.

 

Je suis un Palestinien très attaché aux principes de démocratie, de liberté et des droits de l'Homme, principes inspirés de la Révolution française.

Je suis un Palestinien qui espère beaucoup en la France, un pays qui partage avec la Palestine une somme de valeurs ; un pays très apprécié par les Palestiniens, qui essaye toujours de développer des relations politiques, économiques, culturelles, et éducatives avec les Palestiniens.

Les Palestiniens comptent beaucoup sur la France et sur l'Europe pour relancer le processus de paix en plein échec, à l'agonie plus exactement. Un processus de paix commencéà Oslo en 1993, alors que 27 ans après les Palestiniens n'ont rien obtenu, bien au contraire puisqu'ils voient leurs terres volées et colonisées jour après jour.


Je vous écris cette lettre au nom des enfants de Gaza qui sont privés de leurs loisirs et de la simple joie, des enfants qui apprennent dans des écoles et des classes détruites par les différentes agressions israéliennes. Même leurs rares centres culturels sont quasiment tous détruits suite à des bombardements israéliens.

Je vous adresse cette lettre au nom des jeunes palestiniens qui ont entre 20 et 25 ans et qui n'ont jamais quitté leur ville ; des jeunes désespérés et qui souffrent du chômage, du blocus, et de l'absence de perspectives pour l'avenir.

Je vous envoie cette lettre au nom de ces familles palestiniennes en Cisjordanie qui souffrent de la colonisation, du mur de l'apartheid, des check-points de l'armée de l'occupation et qui, malgré tout cela, envoient leurs enfants à l'école.
Je vous adresse cette lettre au nom des mères des enfants et des jeunes palestiniens tués tous les jours en Cisjordanie et dans la bande de Gaza par les tirs de l'armée israélienne ; au nom des mères qui ne trouvent personne pour effacer leurs larmes ou clamer leur colère.

72 ans après la décision de l'ONU, nous sommes encore et toujours occupés, humiliés et privés de nos droits. Le temps n'est-il pas venu, Monsieur le Président, d'instaurer la justice dans notre région ?

Nous sommes en 2020. Le temps n'est-il pas venu pour que la France prenne une décision courageuse pour dire non à l'injustice, à l'oppression, et pour mettre fin à l'occupation ?

Aidez-nous, Monsieur le Président, par une décision courageuse, qui va sans doute encourager d'autres pays européens qui bougent sur ce sujet, à reconnaître notre Etat afin d'aider à mettre fin à la souffrance de toute une population civile et à réaliser les espérances et les revendications de tout un peuple.

Nous demandons un geste politique fort et utile à la France : nous lui demandons la reconnaissance de l'Etat de la Palestine. Nous demandons de la France une décision pour la justice car nous croyons qu'elle a une voie singulière à exprimer dans notre région.

Nous sommes pour une paix juste et durable, une paix qui passera avant tout par l'application des décisions internationales et par la création d'un Etat palestinien libre et indépendant.

Vive la France !

Vive la Palestine !

Vive les relations franco-palestiniennes !

Veillez accepter, Monsieur le Président, mes meilleures salutations distinguées de Gaza la vie.
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ZIAD MEDOUKH
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Ziad Medoukh
Ziad Medoukh est un professeur de français, écrivain et poète palestinien d’expression française. Titulaire d’un doctorat en sciences du langage de l’Université de Paris VIII, il est responsable du département de français de l’Université al-Aqsa de Gaza et coordinateur du Centre de la paix de cette université. Il est l’auteur de nombreuses publications concernant la Palestine, et la bande de Gaza en particulier, ainsi que la non-violence comme forme de résistance. Il a notamment publié en 2012 Gaza, Terre des oubliés, Terre des vivants, un recueil de poésies sur sa ville natale et son amour de la patrie. Ziad Medoukh a été fait chevalier de l’ordre des Palmes académiques de la République française en 2011. Il est le premier citoyen palestinien à obtenir cette distinction. En 2014, Ziad Medoukh a été nommé ambassadeur par le Cercle universel des ambassadeurs de la paix. Il a remporté le premier prix du concours Europoésie en 2014 et le prix de la poésie francophone pour ses œuvres poétiques en 2015.
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PALESTINA

JEAN DIHARSCE... Extrait

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Le temps qu'il reste à faire simple.

Tout ce qu'on aime à faire seul,
bien mieux le faire,
aussi,
en se tenant,
et puis aimer portes ouvertes,
faire de l'air,
laisser le vent
respirer.

Marcher longtemps au bord des eaux,
aller plus loin,
mettre les îles en capuchon,
ouvrir les yeux.
Partir au ciel où il fait bleu,
prêter un livre,
faire musiques
dire merci

Longer du doigt les cicatrices,
se caresser.

S'accompagner,
faire du temps un avantage.

Et se dormir au creux des bras s'il fait envie ou bien besoin.

Se serrer doux.
En tendre, en fort.

Tenir la main.

 

 

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© JEAN DIHARSCE

 

 

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julia zanes2

Oeuvre Julia Zanes 

L'ENCRE EST MA DEMEURE...Extraits

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...

 

Je sortais quelquefois de la blessure

ouverte de la mer

telle la dernière minute de ton regard

vers les paroles invisibles

qu’on ne peut toucher du doigt

matière tambourinante des rêves

dont les notes sont de grandes cages

d’oiseaux

où toutes nos mémoires

sont sur la plus haute tige



dans le silence mal ponctué

la première porte qui s’ouvre

c’est ton corps

embué dans sa déclivité interminable.

...

 

le peu de temps qui nous reste


à lécher les songes

penche

dans la nuit des mots

avec rafales d’yeux entre les branches



la mer insuffle la peur

le peu de temps qui nous reste

à lécher les songes

penche

dans la nuit des mots

avec rafales d’yeux entre les branches

 

la mer insuffle la peur

de parler aux rames

 

parfois

tes yeux sont introuvables


de parler aux rames



parfois

tes yeux sont introuvables

 

 

.

 

 

GEORGES CASTERA

 

 

.

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POUR LA ENIEME FOIS...Extrait

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A Port-au-Prince

Je déplace encore les mots

à ma guise

mais les maisons sont trop lourdes

à porter

aucun miroir phraseur

pour nous informer

seul les trottoirs

nous disent ironiquement :

maisons sans amants

maisons sans enfants

maisons larmoyantes

descellées

esseulées

vides

 

A chaque famille

Sa ration de morts

Partout s’imposent  les murs

Plus intimement

Dans notre vie

Sans bonjour

Sans sommation

 

 

.

 

 

GEORGES CASTERA

 

 

 

.

 

 

HaitiWeb

 

Haiti 

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