Quantcast
Channel: EMMILA GITANA
Viewing all 4542 articles
Browse latest View live

PARIS OBSCENE

$
0
0

 

 .

 

Un Paris-plage pour rendre hommage à Tel-Aviv, une ville, un pays, une colonie qui vient juste de retirer la vie à un bébé ! Qui l'aurait parié sans passer pour un attardé mental ou moral ?
Notre part d'infamie peut-être ? Ou alors notre lien d'amitié avec un pays qui nous apprend chaque jour comment se débarrasser des arabes à peu de frais... On est passé du nationalisme primaire au national-sionisme secondaire... pour signifier aux puissants que notre pays n'est plus antisémite. Il œuvre désormais pour le même mythe... judéo-chrétien.
Ne sachant faire la paix, on aiguise l'épée de celui qui sait faire la guerre.
Autrement dit, on abdique, on laisse le champ libre à l'envahisseur, mieux encore on libère sa conscience et on oublie ses offenses.

La Palestine n'est plus qu'un trou de mémoire.
Paris entérine.
Anne et Marie culminent.
Il n'y a plus de morale en politique, mais des ruines !

D'où mon sentiment d'indignation devant ce qu'il y a de plus tordu dans le droit : la Loi du plus fort. Il ne nous reste plus qu'à gazer Gaza... l'effacer de nos tablettes, comme l'a fait notre gouvernement de girouettes.
Que célèbre-t-on ?
Notre impuissance à empêcher le plus gros d'avaler le plus petit ?
Israël est partout et la Palestine plus nulle part.
Tout a été englouti, y compris le sens de l'histoire.
De quoi devenir insensé ? Je crois que je le suis devenue : parce que je m'apprête à remplir un seau d'eau et à me rendre le jour J devant l'Arc de Triomphe avec un visage grimé aux couleurs de la Palestine et à faire mille et une fois le tour du rond point.
Pourquoi faire ?
Pour éteindre l'incendie... parce que j'ai l'intime conviction que notre raison française prend feu, de toutes parts.
Un seau ne suffira pas, je vous le concède !
Mais vous pouvez vous joindre à moi, avec votre seau à la main...
Juste pour vous rafraîchir les idées et ne pas mourir étouffé ou pendu avec les cordons de la Bourse !

.

LE JOURNAL DE PERSONNE

http://www.lejournaldepersonne.com/2015/08/paris-obscene/


MESSAGES INDIENS

$
0
0

On t'a découvert derrière ton ombre,

avec dans le dos le soleil couchant,

et ta déroute c'est cela.

Si le soleil est sur ton cœur,

s'il dore tes pieds et ta tête,

les homme ne peuvent te vaincre,

ni les dieux ni les éléments.

 

Maintenant humilié tu regardes sans yeux,

tu entends sans oreilles, tu palpes sans mains

et tu parles sans langue,

condamné au silence

tu n'as plus d'autre cri que le sang sur tes plaies.

 

Quelles herbes profondes en toi

nourrissent ton haleine de jarre et d'eau douce ?

 

Tu tires de la cendre ton aurore

et tu la roules parmi des plumes

d'oiseaux transis dont les trilles attendent

que renaisse ton rire. Non le rictus, le rire,

le rire perdu de tes belles dents.

 

Le soleil brillera de nouveau sur ta gorge,

sur ta poitrine, sur ton front,

avant que la nuit des nuits descende

sur ta race, sur tes villages,

et comme tout sera humain : le cri, le bond,

le rêve, l'amour, le repas.

 

Aujourd'hui c'est toi, et demain

un autre comme toi continuera l'attente.

Point de hâte, point d'exigence.

Les hommes jamais ne s'achèvent.

Là où se dresse un mont était une vallée.

Là où s'ouvre un ravin s'élevait un coteau.

L'océan pétrifié s'est changé en montagne

et les éclairs en lacs se sont cristallisés.

 

Survivre à tout cela qui change est ton destin.

Point de hâte, point d'exigence. Les hommes jamais

    ne s'achèvent.

.

 

MIGUEL ANGEL ASTURIAS

 

.

 

INDIEN,

L'INTERROGATEUR / EL INTERROGADOR

$
0
0


Je ne questionne pas sur les gloires ni les neiges,
je veux savoir où se retrouvent les hirondelles mortes,
où vont les boîtes d’allumettes usées.
Aussi grand que soit le monde
il y a les ongles à couper, les effiloches,
les enveloppes fatiguées, les cils qui tombent.
Où vont les brumes, le dépôt du café,
les almanachs d’un autre temps ?

Je questionne sur le vide qui nous anime ;
je présume que dans ces cimetières
la peur pousse peu à peu
et que c’est là où couve le *Rokh.

.

No pregunto por las glorias ni las nieves,
quiero saber dónde se van juntando
las golondrinas muertas,
adónde van las cajas de fósforos usadas.
Por grande que sea el mundo
hay los recortes de uñas, las pelusas,
los sobres fatigados, las pestañas que caen.
¿Adonde van las nieblas, la borra del café,
los almanaques de otro tiempo?
Pregunto por la nada que nos mueve;
en esos cementerios conjeturo que crece
poco a poco el miedo,
y que allí empolla el *Roc.

.

*Rokh ou Roc est un oiseau géant de la mythologie arabo-persane. On le rencontre notamment dans des passages des Mille et Une Nuits dans Histoire de Sindbad le marin : Les ratites de Madagascar appelés Aepyornis seraient une des influences de l'imagination des écrivains qui inventèrent cet oiseau.

 

.



JULIO CORTAZAR

.

 

HIRONDELLES Kt

Oeuvre Kt

http://www.galerie-com.com/artiste/kt/10362/

 

 

L'ETE...Extrait

$
0
0

Merci Leila...

 

"Sur ces plages d’Oranie, tous les matins d’été ont l’air d’être les premiers du monde. Tous les crépuscules semblent être les derniers, agonies solennelles annoncées au coucher du soleil par une dernière lumière qui fonce toutes les teintes. La mer est outremer, la route couleur de sang caillé, la plage jaune. Tout disparaît avec le soleil vert ; une heure plus tard, les dunes ruissellent de lune. Ce sont alors des nuits sans mesure sous une pluie d’étoiles. Des orages les traversent parfois, et les éclairs coulent le long des dunes, pâlissent le ciel, mettent sur le sable et dans les yeux des lueurs orangées.
Mais ceci ne peut se partager. Il faut l’avoir vécu. Tant de solitude et de grandeur donne à ces lieux un visage inoubliable. Dans la petite aube tiède, passé les premières vagues encore noires et amères, c’est un être neuf qui fend l’eau, si lourde à porter, de la nuit. Le souvenir de ces joies ne me les fait pas regretter et je reconnais ainsi qu’elles étaient bonnes. Après tant d’années, elles durent encore aujourd’hui, quelque part dans ce cœur aux fidélités pourtant difficiles. Et je sais qu’aujourd’hui, sur la dune déserte, si je veux m’y rendre, le même ciel déversera encore sa cargaison de souffles et d’étoiles. Ce sont ici les terres de l’innocence."

 

.

 


ALBERT CAMUS

(1913-1960)

 

.

 

plage-madagh-oran,

MAGIC SLIM

NOCTURNE

$
0
0

Je les ai vu toutes plonger

Dans les remous sous la cascade,

Aussi vrai que je vous regarde,

Leur disait Jef le braconnier.

 

Elles étaient nues comme la main

Et blondes comme les légendes

Qui tremblent aux sources d'Ardennes.

Je les ai vues... deux qui s'embrassaient.

Les belles garces de minuit !

 

Dans l'estaminet de Maria

Le genièvre allumait la nuit

Mi-close sur les enchanteuses

Devant les buveurs stupéfaits.

 

Je les prendrai dans mes filets,

Je te les ferai crier d'aise

Si je les tiens entre mes bras

Les deux qui s'embrassaient, sais-tu...

 

Maria lui dit : cherche toujours

C'étaient des putes de Bastogne

Qui s'en revenaient de Kermesse

Et t'auraient foutu la vérole,

Au lieu que moi...

 

Le gars sourit, leva son verre

Embué tel leur souvenir

D'un givre à peine ;

Toute sa soif en la fraîcheur

Fondait, fondait à perdre haleine.

Sans mot dire il ouvrit la porte

D'un coup de pied et disparut.

Le vent sentait la mousse humide...

 

Le rêve attend le petit jour

Pour nous dérober ses merveilles

Et l'accord des ombres pareilles

Aux jeux secrets de notre amour.


.



ANDRE HARDELLET

 

.

 

PAUL CHABAS1

Oeuvre Paul Chabas

 

EL MALEFICIO DE LA MARIPOSA...Fragmento

$
0
0


Volaré por el hilo de plata.
Mis hijos me esperan
Allá en los campos lejanos,
Hilando en sus ruecas.
Yo soy el espíritu
De la seda.
Vengo de un arca misteriosa
Y voy hacia la niebla.
Que cante la araña
En su cueva.
Que el ruiseñor medite mi leyenda.
Que 1a gota de lluvia se asombre
Al resbalar sobre mis alas muertas.
Hilé mi corazón sobre mi carne
Para rezar en las tinieblas,
Y la Muerte me dio dos alas blancas,
Pero cegó la fuente de mi seda.
Ahora comprendo el lamentar del agua,
Y el lamentar de las estrellas,
Y el lamentar del viento en la montaña,
Y el zumbido punzante
De la abeja.
Porque soy la muerte
Y la belleza.
Lo que dice la nieve sobre el prado
Lo repite la hoguera;
Las canciones del humo en la mañana
Las dicen las raíces bajo tierra.
Volaré por el hilo de plata;
Mis hijos me esperan.
Que cante la araña
En su cueva.
Que el ruiseñor medite mi leyenda.
Que la gota de lluvia se asombre
Al resbalar sobre mis alas muertas.

 

.



FEDERICO GARCIA LORCA

.

 

papillon-bleu

IMPUISSANCE

$
0
0

Je ne sais pas si je sais vivre.
Plusieurs fois chaque jour je devrais arrêter
L’instant qui se faufile et fuit,
Et désespérément me cramponner à lui.
Je devrais serrer sur mon cœur
Les voluptés que j’ai conquises
Contre les hommes et la bise,
Sentir en moi, autour de moi sourdre la vie,
Entendre murmurer, dans l’espace et le temps,
Le cantique éternel des recommencements,
Tandis qu’éparpillé, distrait, hors de mon centre
Je ne puis retenir mon esprit qui combat
Pour m’enlever deçà, delà
Des bonheurs qui de loin sont clairs et définis
Mais sitôt près de moi paraissent des brouillards.
Chaque matin je suis mordu
Du besoin d’aller vers un but
Que mon désir découpe au lointain, dans la paix.
Plus loin, toujours plus loin la plaine reposante !
Et je marche... mais quand j’arrive,
Comme si j’apportais avec moi la tourmente,
Je trouve une prairie hérissée par le vent.

Je cherche en vain la vérité.
Un homme dit : "Elle est ici",
Un autre fait signe : "Elle est là",
Mais je ne trouve rien qu’un décalque d’eux-mêmes.

Je ne sais s’il vaut mieux être un simple d’esprit
Auquel on a tracé sa route,
Ou celui qui s’abreuve à toutes les idées,
Qu’assaillent tous les doutes.
Je ne sais s’il vaut mieux que le monde déploie
Les sombres violets et le pourpre du mal
Parmi quoi la bonté, pur diamant, flamboie,
Ou qu’il devienne sage et terne.
Je ne sais même pas
Si mieux vaut une nuit d’orgie ou de pensée.
Je repousse du pied des dieux
Que dans mille ans d’autres, peut-être, adoreront
Comme je l’ai fait à mon heure.
Parmi les vérités contraires,
Chacune calmante à son tour,
Je suis comme au milieu des plantes salutaires
Mais dont nulle ne peut me soutenir toujours.

Je ne sais pas encore
Si je n’ai pas toujours rêvé.
Tout à coup je perçois que jaunissent les feuilles
Et je dis : C’est l’automne !
Mais qu’ai-je donc fait de l’été ?

Je cherche alors ce qui m’advint dans le passé,
La colonnade de ma vie,
La volonté libre et suivie
Par laquelle je fus moi-même éperdument.
Les montagnes et les vallées de l’existence
Impérieusement dictèrent ma conduite.
La faim me bouscula jusqu’aux lieux d’abondance,
Mon courage naquit de l’effroi d’un malheur,
D’un malheur à venir plus grand
Que celui du moment.
Je ne sais sur quoi m’appuyer,
Je vis de mouvement et rêve de bonheur
Alors que le bonheur, m’arrêtant, me tuerait.
Aucun jour ne ressemble au jour qui le précède,
Incessamment la voix des âges se transforme.
Je passe au milieu de mes frères,
Je les vois se rosir de la flamme première,
Puis se plisser, pareils à des outres vidées,
Et, quelque matin, disparaître.
Magiquement croît la forêt
Où jadis l’herbe s’étalait.
La vie aux formes innombrables
S’impose à mes regards, me commande, m’étreint
Sans dévoiler ses fins.
Et, face à l’étendue, ballant, désemparé,
Perdu sur cette terre absurde
Où nul ne pénètre les autres,
Où nul ne se connaît lui-même,
Où nul ne comprend rien,
Je crie mon impuissance aux formidables forces
De la matière en marche, éternelle, infinie.

 

.

 

ALPHONSE BEAUREGARD

Poète québecois (1881 -1924)

 

.

 

beauregard

Oeuvre ?

 

 


MERCAN DEDE

BERNARD PERROY

$
0
0

La pauvreté me dévisage
et je ne sais pas
si elle vient de moi
ou de cet homme
assis sur le trottoir,

tandis que sa voix
et la mienne se perdent
dans la rue qui bourdonne
comme pour mieux nous faire saisir
ce silence d'empathie
qui bourgeonne de nos deux coeurs.

.

BERNARD PERROY

.

JEF

Oeuvre Jef Aerosol (J.F. Perroy) & Lee Jeffries

© extraits pochoirs de l'expo « Synergy » 

ARPEGGIONE SONATA DE SCHUBERT

ALBA

$
0
0

Mi corazón oprimido
Siente junto a la alborada
El dolor de sus amores
Y el sueño de las distancias.
La luz de la aurora lleva
Semilleros de nostalgias
Y la tristeza sin ojos
De la médula del alma.
La gran tumba de la noche
Su negro velo levanta
Para ocultar con el día
La inmensa cumbre estrellada.

¡Qué haré yo sobre estos campos
Cogiendo nidos y ramas
Rodeado de la aurora
Y llena de noche el alma!
¡Qué haré si tienes tus ojos
Muertos a las luces claras
Y no ha de sentir mi carne
El calor de tus miradas!
¿Por qué te perdí por siempre
En aquella tarde clara?
Hoy mi pecho está reseco
Como una estrella apagada

 

.

 

FEDERICO GARCIA LORCA

 

.

F

Photographie F. Simeoni

 

MONDE

$
0
0

Angle éternel
la terre et les ciel.
Pour bissectrice, le vent.

Angle immense,
le chemin tout droit.
Pour bissectrice, le désir.

Les parallèles se rencontrent
dans le baiser.
Ô cœur
sans écho.
C'est en toi que commence et s'achève
l'univers.

 

.

 

FEDERICO GARCIA LORCA

 

.

 

Andrew Bret Wallis2

Oeuvre Andrew Bret Wallis

DERRIERE LE DOS DE DIEU...Extrait

$
0
0

«Gisement de ténèbres et d’éclairs
d’immobilité et de mouvement
Gisement d’air qui vibre et de langues
au fond du silence tenace.
Ici un mot, là un geste, une absence
que nous montre, nous épelle l’érosion.
Dénudés sur les routes du Sud
Nous portons plus loin nos gîtes d’énigmes,
Nos quêtes d’aurore dans la nuit—

Entre deux margelles de clarté
Un pléistocène grouillant et obscur.
L’accord ici est hors clavier.
Dans l’écartèlement –bonheur, détresse-
nous accouchons parfois d’une vie vraie
dans l’espace habitable—»

 

.

 

LORAND GASPAR

 

.

 

mohamed jaamati

Oeuvre Mohamed Jaamati

PRENEZ UN CHAT

$
0
0

Coupez-le en rouge,
et racontez-le en vers :
ça vous rendra heureux, parbleu !
Et oui ! La poésie
donne des couleurs aux souris.
Mais par bonheur,
pas que du gris !
Elle les peint aussi en morose,
et pas que les souris ;
les marchands d’art aussi.
Si ça lui plait,
elle peut cracher du fuchsia
sur la cité Neruda
ou du mordoré
sur le rire d’un général
mal décoré.

Si elle peut atteindre les étoiles
la poésie peut aussi
broyer du noir
parce qu’il faut savoir,
de temps en temps,
pleurer le soir
si l’on veut revoir au matin
un humain
dans son miroir.

 

.

 

ALAIN SERRES

 

.

 

Justyna Kopania

Oeuvre Justyna Kopania

 


LE MASSACRE DE GUERNICA

$
0
0
26 avril 1937
.
«Soudain, à 4 heures et demie de l'après de l'après-midi, toutes les cloches de Guernica se mettent à sonner. Les entendre à une heure qui n'est ni celle d'une messe, ni des vêpres ou d'un salut, les habitants de cette petite ville basque savent ce que cela signifie: une alerte. Guernica ne dispose d'aucune sirène. En 1937, au Pays basque, rares sont les localités assez riches pour s'équiper d'un système d'alerte. (...)

Ce jour-là, le 26 avril 1937, un marché se tient comme chaque lundi à Guernica. Aux paysans venus pour vendre et acheter, s'ajoutent les nombreux réfugiés: cela fait bien trois mille personnes supplémentaires accueillies dans la petite ville (de 7000 habitants). Trois mille qui, dès les premières volées de cloches, se sont avec les autochtones acheminés en bon ordre dans les caves et les abris aménagés dans la ville depuis le bombardement qui, un mois plus tôt, a écrasé Durago, autre ville basque. Un prêtre énergique canalise la foule vers les refuges. De tels réflexes, en temps de guerre, les civils les acquièrent très vite.
Les imprudents, les négligents, les curieux vont bientôt -très bientôt- regretter de n'avoir pas suivi le mouvement.


Cinq minutes se sont à peine écoulées que, dans le ciel, on entend le grondement d'un avion. D'évidence, un avion lourd. Ceux qui sont restés dehors le voient, à basse altitude, s'approcher. Il est seul. Apparemment sûr de l'impunité, le pilote ne prend aucune précaution. Il se met à décrire un cercle autour de la ville. Il vole si bas que pour peu on distinguerait l'équipage casqué de cuir. Tout à coup, l'enfer se déchaîne. On voit distinctement la soute du bombardier s'ouvrir et un chapelet de bombes glisser vers le sol. Certains les comptent: six. «Elles étaient grosses», diront les survivants. Des grenades viennent «compléter» le travail.
On a cru d'abord que le bombardier viserait la gare. Or, les bombes s'écrasent sur le lycée, les maisons et les rues voisines. Les murs s'abattent, des cratères se creusent. Les flammes, en quelques secondes, se tordent. Le bombardier a rempli sa mission. Il s'éloigne.

Ceux qui n'ont pas été touchés s'élancent vers les rues et les maisons bombardées. Des gens se trouvent peut-être emmurés! Ce geste secourable est brisé sur-le-champ. Dans le ciel gronde déjà un autre moteur. Le second bombardier ne vole pas plus haut que le premier. À quoi bon, puisqu'il n'y a pas de DCA à Guernica. De nouveau, la soute s'ouvre. De nouveau, des bombes tombent vers le sol. Le même nombre: six. Des grenades, une fois encore, sèment la mort et l'épouvante. Le bombardier, comme son prédécesseur, s'éloigne. Cinq minutes s'écoulent: on attend. Dix minutes: on espère. Un quart d'heure: on se rassure. À la recherche des emmurés, on entame des fouilles hâtives. On tente d'éteindre les brasiers.

Alors, trois nouveaux avions surgissent dans le ciel. Les premiers on les avaient aussitôt reconnus: c'étaient des bombardiers Heinkel 111, des allemands. Ceux-ci, n'en pas douter, sont des Junkers 52, d'autres allemands. Les hommes qui se sont battus en Espagne les connaissent bien. Les civils aussi. Quelles routes n'a pas vu piquer des Junkers 52, si habiles au mitraillage? Avec leur museau noir, leur train sorti, leur allure trapue, la croix sur le fuselage, leurs quatre ailes, tout le monde les connaît. Dès lors, Heinkel et Jukers vont alterner. Le bombardement ne s'interrompra plus, cependant que son intensité augmentera sans cesse. Il a commencéà 16 h 40. Il ne cessera qu'à 19 h 45.

Quand les derniers appareils allemands disparaissent, Guernica n'existe plus.

Guernica. «Devant la façade de sa Casa de Juntas, l'hôtel de ville, on montre (... on montrait) un vieux chêne, célèbre dans tout le pays. Dès le haut Moyen Age, des assemblées se réunissaient sous son ombre tous les deux ans. (...)

En 1937, Guernica se veut toujours la ville sacrée des basques. Mais le 26 avril 1937, Guernica n'existe plus.

 

.

 

guernica2,

Guernica

AGNES SCHNELL

$
0
0

Être juste ce piéton fabuleux*
retenu par les sortilèges

un être marchant affairé
dans la lenteur
qui s’offre terre fauve
et ciel mouillé.

Rencontre
un oiseau mort au cou rompu
chant d’amour arrêté dans la gorge
par un lacet de crin.

Combien de naufrages
d’arbres effondrés de fruits délaissés
dans l’éloignement ?


.


AGNES SCHNELL

*piéton fabuleux* expression de Julien Gracq

.

murat Turan2,

Oeuvre Murat Turan

BROCELIANDE...Extrait

$
0
0


Rien ne finit jamais comme on voit dans les livres
Une mort un bonheur après quoi tout est dit
Le paladin jamais la belle ne délivre

Et du dernier baiser renaît la tragédie
L'homme a le souffle court et pour peu qu'on le berce
Le dimanche l'endort que c'est déjà lundi

La vie est une avoine et le vent la traverse
Sans y trouver jamais un accord résolu
Si l'histoire y poursuit comme les rimes tierces

L'irréversible amour des jours qui ne sont plus
Tout semble suffisant à l'étrange commère
Pour enchaîner sur le beau temps quand il a plu

Ou quand les amoureux enfin se désaimèrent
Au doigt d'autres enfants pour repasser l'anneau
Que pas un seul moment ne chôment les chimères

Elle transmet sans plus l'alphabet des signaux
Qui dicte à l'avenir une phrase secrète
Comme au ciel sans savoir fait un vol de vanneaux

Un passant dans la rue un second qui l'arrête
Avec le geste appris que la coutume veut
Il touche son chapeau montre sa cigarette

Et le rite accompli s'éloigne avec le feu
Que savent-ils de l'autre Un souffle Une étincelle
L'homme change mais pas la flamme et pas le jeu

La légendaire nuit ces étoiles l'ocellent
Il chantait l'air que tantôt vous fredonnerez
La fugue le reprend du bugle au violoncelle

Et le monde est pareil à l'ancienne forêt
Cette tapisserie à verdure banales
Où dorment la licorne et le chardonneret

Rien n'y palpite plus des vieilles saturnales
Ni la mare de lune où les lutins dansaient
Inutile aujourd'hui de lire le journal

Vous n'y trouverez pas les mystères français
La fée a fui sans doute au fond de la fontaine
Et la fleur se fana qui chut de son corset

Les velours ont cédé le pas aux tiretaines
Le vin de violette est pour d'autres grisant
Les rêves de chez nous sont mis en quarantaine

Mais le bel autrefois habite le présent
Le chèvrefeuille naît du cœur des sépultures
Et l'herbe se souvient au soir des vers luisants

Ma Mémoire est un chant sans appogiatures
Un manège qui tourne avec ses chevaliers
Et le refrain qu'il moud vient du cycle d'Arthur

Les pétales du temps tombent sur les halliers
D'où soudain de ses bois écartant les ramures
Sort le cerf que César orna de son collier

L'hermine s'y promène où la source murmure
Et s'arrête écoutant des reines chuchoter
Aux genoux des géants que leurs grands yeux émurent

Chênes verts souvenirs des belles enchantées
Brocéliande abri célèbre des bouvreuils
C'est toi forêt plus belle qu'est ombre en été

Comme je ne sais où dit Arnaud de Mareuil
Broussaille imaginaire où l'homme s'égara
Et la lumière est rousse où bondit l'écureuil

Brocéliande brune et blonde entre nos bras
Brocéliande bleue où brille le nom celte
Et tracent les sorciers leurs abracadabras

Brocéliande ouvre tes branches et descelle
Tes ténèbres voici dans leurs peaux de mouton
Ceux qui viennent prier pour que les eaux ruissellent
Tous les ans à la fontaine de Bellenton

.

 

LOUIS ARAGON

 

.

 

gustave dore,

 

UN PEU D'OMBRE SERA LA REPONSE...Extrait

$
0
0

Crépuscule au bord
des fenêtres, fleurs
fidèles, corolles
chaleureuses, puis la nuit

avec ses légendes, ses
miroirs sous l’obscurité,
la nuit refermée
sur les gestes humains,
la nuit paisible –
et la gourmandise du silence
lorsqu’un chat, avec
sa tiédeur, se glisse
contre toi pour réparer le monde.

 

.

 

RICHARD ROGNET

 

.

 

CHAT

 

 

LHASA DE SELA - EL DESIERTO

Viewing all 4542 articles
Browse latest View live




Latest Images